Désherbage des céréales : comment s’adapter à la météo ?
Cet automne, la pluie s’est de nouveau invitée jusqu’au 20 octobre, avec très peu de jours sans entre le 25 septembre et le 15 octobre, compliquant les semis de céréales. Le cumul de début septembre à début novembre est excédentaire de 70 à 100 mm par rapport à la médiane des vingt dernières années, soit juste en dessous de deux années sur dix parmi les plus humides. Cet épisode vient à la suite d’une précédente campagne très humide, donc sur des sols encore pour la plupart peu ou pas ressuyés. On observe deux périodes de semis sur la région : une première, minoritaire sur début octobre, puis une deuxième fin octobre à début novembre après l’épisode pluvieux et les récoltes retardées de maïs, tournesol, soja. Pour la première vague, les céréales sont actuellement au stade tallage tandis que pour la seconde, ils sont en cours de levée et au maximum entre 2 et 3 feuilles, avec une majorité des parcelles entre le stade 1 et 2 feuilles. Dans ce contexte, comment gérer le désherbage ?
Des prévisions météorologiques à relativiser
Les prévisions annoncées sont variables entre les modèles météo, avec des indices de confiance sur la pluie parfois faibles mais qui interrogent sur les possibilités d’intervention de désherbage à venir. A titre indicatif, le modèle de Météo France prévoit, au 21 novembre, environ 40 mm dans les six prochains jours à Dijon ou à Noyers. Cette pluie prévue fait suite à une période de froid accompagnée de neige en fin de semaine dernière (figures 1 & 2).
Intervenir dans les bonnes conditions
Prudence dans les situations suivantes, avec manque de sélectivité et risque de phytotoxicité plus ou moins importante :
- Dans les sols filtrants, un cumul de pluie de plus de 20 mm suivant l’application peut entraîner un dépositionnement de la matière active plus en profondeur ; et conduire à un risque de phytotoxicité consécutif à des herbicides racinaires comme la pendiméthaline, le flufénacet, ou le prosulfocarbe (mise en contact trop rapide entre l’herbicide et les graines de céréales).
- Les implantations avec des grains en surface et / ou des lits de semence motteux sont également les plus exposées aux risques de manque de sélectivité et amplifiées par le risque précédent.
- Eviter de traiter s’il y a une chute brutale des températures prolongée (-3°C dans les jours suivants l’application). Les céréales à 1-2 feuilles sont particulièrement sensibles à une application d’herbicide racinaire en période assez douce suivie de froid prolongé car elles pourront moins facilement détoxifier l’herbicide. Les amplitudes thermiques ne sont pas d’actualité, les conditions météo prévues la semaine prochaine sont correctes et le moindre créneau à l’automne est à saisir dans un contexte où les rattrapages de printemps sont peu efficaces. On préconise d’attendre sept jours avant de traiter avec un herbicide après un épisode de froid (-3°C à -5°C).
Bien consulter les prévisions météo locales au plus proche de l’éventuel désherbage afin d’affiner sa décision (ou reporter).
Dans quelles situations reporter l’intervention ?
Tout d’abord, l’accessibilité et la portance de la parcelle restent la base. Ensuite, l’arbitrage devra se faire en fonction du stade de la culture - le stade pointant pouvant être déconseillé -, de la réalisation d’une première intervention et des prévisions météo localement :
1- Les semis du 20-30 octobre actuellement entre 2 feuilles et 3 feuilles avec une pression graminées historique :
- Si l’application de prélevée a été effectuée et qu’un programme double automne était prévu, il conviendra de reporter l’intervention après le passage pluvieux ; et ainsi éviter tout risque de transfert et de sélectivité.
- Dans le cas contraire, si la parcelle nécessite prioritairement un désherbage de postlevée, l’intervention doit être tactique et doit se référer aux conditions météo locales réunissant les conditions climatiques les plus favorables (point précédent).
2- Les semis de la première décade de novembre arrivent à 1 feuille et bénéficient de l’effet du décalage de la date de semis : ils peuvent attendre la fin de la période pluvieuse.
3- Les semis réalisés en début de semaine dernière dont la prélevée n’a pas été effectuée vont arriver très prochainement ou sont au stade pointant : dans ces conditions, il sera nécessaire de reporter après le passage pluvieux vers une postlevée précoce.
→ La possibilité de le désherber avec les herbicides habituellement appliqués à l’automne en janvier reste ouverte avec le nouveau catalogue des usages. Toutefois, des précautions sont à prendre avec des spécialités dont l’AMM spécifie une interdiction d’application au-delà du 31 décembre (par exemple Merkur) ou pour lesquelles la firme mentionne explicitement des conditions d’emploi particulières.
Dans les cas de reports du désherbage, Il est possible que lorsque les conditions seront à nouveau réunies, la culture ait dépassé le stade 3 feuilles (BBCH 13) (tableau 1).
Pour les orges de printemps semées à l’automne (OpsA) dont la surface a progressé cette année par rapport à l’année dernière, les produits racinaires d’automne autorisés sur les orges d’hiver le sont également sur OpsA. Dans le cadre du cahier des charges brassicole, il conviendra de se référer aux listes des produits autorisés définies par l’IFMB/Malteurs de France. Attention à la sélectivité : il faut privilégier une application en prélevée avec des produits « solo ». Ex. : Trooper 2,5 l ou Trinity 2 l.
- Des prévisions météo à relativiser avec le retour des pluies.
- Intervenir dans les bonnes conditions doit rester la priorité en évitant de désherber avant du gel et/ou des grains mal enterrés.
- Reporter l’intervention si un désherbage de post-semis / prélevée a déjà été effectué ou si le blé est au stade pointant – 1 feuille.
- Dans le cas de report, si le blé a déjà dépassé 3 feuilles, se référer au tableau 1 pour la liste des herbicides racinaires autorisés.
- La majorité des produits listés dans le tableau sont des antigerminatifs : il est recommandé de ne pas attendre d’observer des graminées pour intervenir.
Article rédigé par les partenaires de « Objectif Cultures Propres » (OCP) Bourgogne-Franche-Comté : CHAVASSIEUX Diane et Léa BOUNHOURE (ARVALIS), BAROT Jean-François (Soufflet Agriculture), FOLTIER Benjamin (Axereal), LACHMANN Alexandre (Bourgogne du Sud), CHOPARD Patrick (CA39), COURBET Emeric (CA70), PILLIER Arnaud (CA21), DELATTRE Marc (Columa Vegephyl), DERELLE Damien (SeineYonne), FLAMAND Romain (SAS Bresson), GELOEN Michael (Terres Inovia), GUITTARD Jean Michel (Terre Comtoise), ROBLIN Yohann (Interval), LACHAUD Dominique (SAS Ruzé), Equipe grandes cultures Chambre d’agriculture de l’Yonne (CA89), MIMEAU Mickael (Alliance BFC), VILLARD Antoine (CA71) et ZAMBOTTO Cédric (CA58).
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