Retournement de céréales : tenir compte du désherbage d'automne dans le choix de la nouvelle culture
En cas de réimplantation d'une culture en cours de campagne, il convient d’être vigilant sur la nature des herbicides utilisés à l’automne afin d’éviter tout désagrément au printemps. Toutes les cultures n’ont pas la même flexibilité vis-à-vis des produits utilisés à l’automne.
Le recours aux applications d’automne en céréales à paille est de plus en plus courant dans la gestion des adventices. En maîtrisant la concurrence de manière précoce et en alternant les modes d’action, ce type d’itinéraire concourt à maximiser l’efficacité de la lutte chimique tout en préservant le potentiel de la culture. Mais en cas de destruction de la culture (après un gel ou de mauvaises conditions à l'automne…) et de réimplantation d’une culture de printemps, la persistance des substances actives utilisées à l’automne est à considérer afin d’éviter tout effet de phytotoxicité résiduel. Pour mieux appréhender les possibilités de réimplantation d’une culture dans ce type de situation, ARVALIS avait mis en place un essai sur blé tendre à Boigneville (91) de 2013 à 2015.
Dix candidats de substitution au banc d'essai
Les possibilités de réimplantation d'une culture sont prises en compte dans le processus d’homologation des différents produits disponibles sur le marché et sont référencées par spécialité commerciale. Cependant, les applications d’automne sont généralement des mélanges et/ou des programmes. Dans notre essai, différents types de mélanges d’automne ont été testés sur céréales à paille (tableau 1) à dose simple ou double, sur un sol argilo-calcaire moyennement profond. La culture a ensuite été détruite volontairement en février (simulation d’un gel) avec un herbicide non sélectif. Les nouvelles cultures (blé dur, orge de printemps, pois de printemps, féverole de printemps, ray-grass, colza, tournesol, luzerne, betterave, maïs) ont été implantées aux dates classiques en sortie d’hiver ou au printemps, sans labour afin de maximiser les risques. Les notations de sélectivité ont été réalisées à la levée, puis 15 et 30 jours après et enfin début juin. Les résultats montrent que les possibilités de remplacement après application d’un mélange à l’automne sont parfois limitées.
Tableau 1 : Possibilité de réimplantation des cultures de printemps en fonction des programmes d’automne (essais ARVALIS à Boigneville (91) de 2013 à 2015)
NB : l’isoproturon a été retiré du marché en 2017, la flurtamone en 2019 (sur céréales) et le bromoxynil en 2021.
Le tournesol a été étudié deux années consécutives mais la destruction de la culture par les pigeons empêche toute conclusion.
Globalement, dans cet essai, blé dur, orge de printemps et maïs sont les cultures qui peuvent suppléer le plus facilement une culture d’hiver détruite. Des symptômes de phytotoxicité passagers sont parfois visibles mais sans remettre en cause la culture nouvellement implantée. Ce sont ces solutions qu’il conviendra de mettre en œuvre prioritairement. La luzerne, le ray-grass et la betterave sont, à l’inverse, quasi impossibles derrière la majorité des applications d’automne étudiées. Ces cultures sont à éviter dans la plupart des cas. La betterave a peu de chances d’être concernée, celle-ci n’étant pas par principe une culture « de substitution » en cas de problème.
Lire aussi : « Réussir la culture de blé dur de printemps ».
Le colza de printemps ou un protéagineux de printemps (pois ou féverole) ont plus de potentiel, mais il conviendra de se pencher sur les spécialités appliquées avant de prendre une décision.
En cas de mélange, tenir compte du produit le plus restrictif
Historiquement, peu de cultures étaient possibles derrière une application d’automne de chlortoluron (céréales, à l’exception de l’avoine, et maïs) du fait du risque de phytotoxicité sur les cultures de remplacement inhérent à cette famille de produit.
Le mélange Fosburi + Monitor + Huile est lui systématiquement rédhibitoire sur trois ans. Les dégâts sont parfois tels que certaines cultures ne lèvent pas du tout derrière ce type de programme. Pourtant, l’orge est donnée « possible » derrière Monitor de même que derrière Fosburi. L’effet « cumulatif » de chacun des produits est donc probablement en cause.
Les informations obtenues pour les spécialités employées en solo, à pleine dose, peuvent cependant se combiner afin de donner une idée du comportement d’un mélange, voire d’un programme. Cette règle a notamment été utilisée pour évaluer l’effet de cumul de certaines spécialités (sulfonylurées notamment). Le produit le plus restrictif déterminera le niveau de risque global du mélange (ou du programme), même si, comme l’essai l’a mis en évidence, certaines nuances existent. La vigilance est donc de mise. En cas de doute, la dose utilisée pourra jouer pour diminuer le risque. Dans certains cas, un travail du sol spécifique peut apporter de la souplesse dans ce choix.
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