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Comment conduire un blé tendre de printemps ?

Le blé tendre de printemps est une solution pour remplacer une culture d’hiver mal levée ou qui n’a pu être semée. Son potentiel de rendement est inférieur de 10 à 20 % à un blé d’hiver. Mais la concurrence des adventices, le risque verse et la pression maladie sont plus modérées. Le point sur l’itinéraire technique de cette espèce.

semoir

Le blé tendre de printemps représente quelque 0,4 % des surfaces de blé tendre en France, avec 20 000 ha cultivés (moyenne 2014-2023 - Agreste).

En dehors des quelques exploitations pratiquant régulièrement des semis de blé au printemps, c’est une solution pour remplacer une culture d’hiver suite à des dégâts importants de gel, phytotoxicité, ou mauvaises conditions de semis à l’automne. Les surfaces sont ainsi montées à 44 000 ha après le gel de février 2012, et à 40 000 ha après l’automne/hiver 2019 très humide.

Lire aussi : « Resemis : tenir compte du désherbage d’automne dans le choix de la nouvelle culture ».

10 à 20 % de rendement en moins qu’un blé d’hiver

Avec un rendement moyen sur dix ans de 63 q/ha, le potentiel d’un blé de printemps est plus faible qu’en culture d’hiver (10 à 20 % de moins). Cela s’explique par un cycle plus court et décalé vers des périodes plus exposées au stress hydrique et autres excès thermiques. Il y a de ce fait moins de « plasticité » entre les composantes de rendement. Avec une phase de tallage plus réduite et un enracinement plus superficiel, la phase de montée à épis est cruciale et particulièrement sensible à la sécheresse. C’est donc une espèce à éviter en sols superficiels.

Lire aussi : « Comment s’élabore le rendement des céréales à paille ».

Les teneurs en protéines des blés de printemps sont souvent supérieures à celles des blés d’hiver, en lien avec un rendement limité. La concurrence des adventices habituellement rencontrées en blé d’hiver, le risque verse et la pression maladie sont moins élevés. Concernant les maladies, la pression septoriose est globalement moins forte, mais la rouille brune est à surveiller sur les variétés sensibles.

Côté fertilisation, la dose d’azote est à ajuster au potentiel plus limité, mais son fractionnement en trois apports se justifie toujours. Quant au soufre, les besoins sont généralement couverts en semis de printemps.

Si une irrigation est possible, elle est souvent bien valorisée par cette espèce.

Choisir une variété adaptée à la date de semis

Les dates optimales de semis d’un blé de printemps débutent au 15 février pour se terminer au 15 mars. Au-delà, le potentiel de rendement décroît rapidement. Avant le 15 février, le semis est possible s’il bénéficie de très bonnes conditions d’implantations ; cependant, il est délicat à cette période d’avoir des sols totalement ressuyés, et les levées peuvent être très longues, avec le risque d’une exposition au gel ou du développement d’une croûte de battance en sols limoneux.

Dans la moitié nord de la France, à partir du 1er mars, les variétés implantées doivent être à la fois alternatives ou dites de printemps (note d'alternativité > 7) et précoces à épiaison. Une variété non alternative semée au printemps risque de ne pas monter à épis ou d’épier trop tardivement si le printemps est chaud et que les besoins en vernalisation ne sont pas satisfaits.

Entre le 15 janvier et le 1er mars, il faut progressivement écarter les variétés hiver, ½ hiver et ½ alternatives qui risquent d’être trop tardives pour réaliser leur cycle dans de bonnes conditions.

Tableau 1 : Recommandations ARVALIS d’alternativité et de précocité des variétés de céréales à paille en cas de semis très tardifs

Tableau 1 : Recommandations ARVALIS d’alternativité et de précocité des variétés de céréales à paille en cas de semis très tardifs
Téléchargez le tableau des caractéristiques des quelques variétés de blé tendre de printemps ou alternatives disponibles
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Des conditions d’implantation plus exigeantes

La recherche de bonnes conditions de semis est primordiale pour réussir un blé de printemps, compte tenu de la plus grande sensibilité à la levée et de la durée de tallage réduite. Éviter le labour est souvent souhaitable et privilégier une implantation superficielle dans la zone ressuyée. Mais le labour peut parfois être obligatoire à cause des rémanences d’herbicides appliqués dans le cas de culture détruite ou pour restructurer un sol affecté par un excès d’eau hivernal.

Densités de semis : viser 300 à 350 grains/m²

Les densités de semis doivent être soutenues pour compenser le faible tallage en semis de printemps. Par contre, les pertes à la levée sont normalement réduites (moins d’hydromorphie et de gel, moindre présence de limaces). Il faut toutefois viser au moins 300 à 350 grains/m².

En sol superficiel et caillouteux, les semis précoces sont à privilégier, avec des densités à majorer de 15 % environ.

Une protection des semences incontournable

Une protection fongicide minimale reste nécessaire vis à vis de pathogènes portés par la semence et/ou présents dans le sol, comme par exemple les fusarioses. Le risque pucerons est fortement réduit au printemps ; en cas de forte infestation, il pourra être géré avec un traitement insecticide en végétation dès lors que le seuil de risque est atteint.

Fertilisation azotée : une dose ajustée au potentiel plus limité

Comme pour les blés d’hiver, la dose totale d’azote est calculée en fonction de l’objectif de rendement et des fournitures du sol. Pour ces dernières, le reliquat de sortie d’hiver (RSH) peut être pris en compte, en adaptant la date de prélèvement au cycle et aux besoins décalés. De la même façon, les postes minéralisation et précédent sont identiques à ceux pris en compte pour un semis d’hiver. Les différences avec une céréale d’hiver correspondent à un objectif de rendement moindre et l’absence d’azote absorbé en sortie d’hiver.

Comme pour son homologue semé à l’automne, le fractionnement en trois apports est conseillé sur un blé tendre semé au printemps, tant pour le rendement que pour la qualité. Le premier apport est à positionner entre le semis et 2 feuilles, avec une dose de 50 kg N/ha. Le dernier apport interviendra au stade dernière feuille étalée, avec une dose à adapter à la variété (de 40 à 80 kg N/ha). Le complément sera positionné au stade épi 1 cm.

Comme les cultures d’hiver, la fertilisation des blés de printemps peut être pilotée grâce à des outils d’aide à la décision (ex. : N-Tester…).

Lire aussi : « Blé tendre : fractionner l’azote en trois apports ».

Fertilisation soufrée : des besoins généralement couverts

Concernant le soufre, la gestion de cet élément est identique à celle des céréales d’hiver. Mais les besoins sont mieux couverts par la minéralisation du sol du fait d’un cycle décalé, bénéficiant de températures plus élevées.

Un risque de carence demeure toutefois possible suite à des hivers très pluvieux sur sols superficiels, pauvres en MO et ne recevant pas d’apports de produits organiques. Dans ces situations caractérisées à la fois par de fortes pertes de soufre par lixiviation et un faible potentiel de minéralisation du sol, un apport de 20 à 30 kg de SO3/ha peut être recommandé.

Désherbage : moins de solutions, mais moins d’infestations

Après un semis de printemps, les parcelles sont souvent moins infestées de graminées en lien avec la biologie des adventices. Il convient d’être vigilant concernant les herbicides homologués sur blés de printemps car ils sont moins nombreux que sur céréales d’hiver et les doses peuvent être réduites.

Vis-à-vis des dicotylédones (renouées, chénopodes, stellaires…), leur gestion est moins complexe. Cette flore peut être assez facilement maîtrisée courant tallage.

Téléchargez la liste des herbicides utilisables sur blé tendre de printemps
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La rouille brune : cible prioritaire sur variétés sensibles

Compte tenu de la date de semis, le risque piétin verse est négligeable et ne nécessite pas de traitement spécifique. Le risque est également réduit pour la septoriose, mais cette maladie doit être surveillée. Compte tenu de la vitesse d’émission des feuilles, une intervention est rarement utile avant le stade dernière feuille étalée. Ce traitement pivot peut alors viser septoriose et rouille brune. Cette dernière est la maladie à surveiller en semis de printemps sur variétés sensibles.

Le risque fusariose est normalement plus faible compte tenu d’une floraison décalée en juin, plus sec que mai. En cas de pluie annoncée, le raisonnement d’un traitement peut se faire à l’identique d’un semis d’automne.

2 commentaires

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  • Bonjour, non, il n’y a pas d’équivalence calendaire entre un bth noté 7 à épiaison et un btp. La note de précocité des variétés permet de les classer lorsqu’elles sont semées dans les mêmes conditions : une variété notée 7 épiera en moyenne 5 jours avant une variété notée 6. Par contre, une variété notée 7 semée à l’automne devrait épier bien avant une variété notée 7 semée au printemps. Pour des semis de printemps, il faut avant tout s’assurer de semer une variété suffisamment alternative par rapport à la date de semis. Une variété qui ne serait pas assez alternative risque d’être encore plus tardive à épiaison, voire de ne pas épier du tout. Bien à vous. Nicolas Bousquet pour ARVALIS

  • Bonjour, concernant les notes d'épiaison des variétés de blé de printemps, est-ce qu'à note identique avec un blé semé à l'automne, le blé de printemps épis à la même période ou y a t-il un décalage ? ( un 7 sur BTH épis en même temps qu'un 7 de printemps ?)
    Merci par avance, cordialement.

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