Pommes de terre : quelques rappels pour préserver la qualité à la récolte et durant la conservation
Sur les premiers arrachages de pommes de terre, Nous avons observé de beaux potentiels de rendements avec des matières sèches plutôt dans la moyenne haute. 2024 semble être une année prometteuse pour les débouchés « fécules ». Attention à bien respecter quelques consignes dans les semaines à venir pour préserver la qualité.
Sur des pommes de terre sénescentes ou en cours de défanages, les fortes pluies peuvent entrainer la présence de spores sur tubercules. Pour éviter l’apparition de mildiou sur tubercules, il convient de protéger jusqu’à dessication totale du feuillage, voire jusqu’à l’arrachage pour les récoltes en « vert ».
La lutte préventive contre le mildiou sur tubercules doit être réalisée avec des produits « sporicides » tels que Ranman Top 0,5 l, Leimay 0,5 l ou Shirlan 0,4 l.
Tubercules atteints par le mildiou
Enfin, il n’est pas rare de voir d’autres champignons (Pythium) ou des bactérioses type Erwinia sp. Les zones les plus propices sont souvent les zones où l’eau stagnante à engendrer une asphyxie. Il est opportun de jalonner ces zones et d’éviter la récolte lors de l’arrachage. Pour toutes parcelles à risque, réaliser un bon triage à la mise en stockage et identifier les lots à risque, pour les entreposer de façon à pouvoir les déstocker rapidement au besoin. De même, maximiser la ventilation (capacité ventilation idéale 75 m3 palox à 100 m3 vrac par m3/h) avec de l’air de faible hygrométrie pour sécher.
Bien conduire son stockage en trois étapes
- Le séchage (2-6 jours) : l’objectif est de capter l’humidité dégagée par les pommes de terre en ventilant de l’air sec (max 80 % d’hygrométrie). La température de l’air et la température du stockage est de 2°C max.
- La cicatrisation : bien cicatriser pour limiter des contaminations par des pathogènes via les lenticelles/Blessures. Pour cela la température doit être maintenue autour de 12°C pendant trois semaines.
- La descente à la température de consigne : après la cicatrisation, diminuer la température jusqu’à la température de stockage, en veillant à respecter les paliers progressifs :
→ Baisse de 0,5 à 1°C par jour pour les variétés du frais afin de refroidir rapidement et éviter le développement de pathogènes (gale argentée, dartrose).
→ Baisse de 0,2 à 0,5°C par jour pour les variétés industrie afin d’abaisser progressivement la température pour éviter tout sucrage.
Attention : une fois la température de consigne atteinte, veiller à renouveler régulièrement l’air pour dégager le CO2. L’air soufflé doit avoir une hygrométrie autour de 85-90 % pour limiter la déshydratation des pommes de terre et la perte de poids.
Contrôler la germination avec les antigerminatifs
Un bon contrôle de la germination commence par une bonne gestion du stockage. La température de consigne doit être la plus stable possible, avec les sondes bien réparties dans l’ensemble du bâtiment. Stocker les variétés avec des repos végétatifs proches dans une même cellule pour faciliter sa gestion et limiter les coûts.
Avant tout traitement antigerminatif, la cicatrisation des tubercules ainsi que le séchage doivent être finalisés. Un traitement à base d’hydrazide maléique au champ, réalisé dans de bonnes conditions, permet d’apporter plus de souplesse pour le premier traitement en cours de stockage et réduire la quantité totale de produit utilisé sur la campagne. Les différents produits antigerminatifs peuvent être utilisés au cours d’une même campagne notamment pour associer l’effet préventif et curatif des matières actives en fonction de l’état des tubercules. Attention cependant à respecter les doses et quantités de produits homologués ainsi qu’à ne pas appliquer les produits simultanément.
Les solutions à action préventive
Deux matières actives ayant un mode d’action préventif peuvent être utilisées à savoir l’éthylène (noms commerciaux : Restrain ; Biofresh) et le 1,4 Diméthylnaphtalène (nom commercial : Dormir).
La première, homologuée en agriculture biologique, permet de ralentir le développement du germe. Une fois les tubercules secs et cicatrisés, la procédure d’augmentation progressive est mise en place afin d’atteindre la concentration souhaitée allant jusque 10 ppm, elle sera appliquée en continue et ce jusqu’au déstockage. Un germe qui pourrait se développer sous traitement éthylène est plus fragile et cassera plus facilement lors des manipulations. Il faut être vigilant pour un débouché industriel puisqu’il existe un risque d’augmentation de la coloration à la friture des tubercules sous traitement éthylène. Les variétés Fontane, Markies et Magnum montrent, selon les résultats d’essai ARVALIS, un risque limité. Dans cette situation, la concentration d’éthylène est inférieur à 4 ppm et le niveau de CO2 peut être réglé autour de 2 500 à 3 000 ppm.
Le 1,4 Diméthylnaphtalène (1,4 DMN) a une action préventive en augmentant la dormance des tubercules. Ce produit s’applique jusque 20 ml/t par application avant le début de germination, au début de l’apparition de point blanc. Pour les tubercules à peau fine comme les chairs fermes, il peut être préférable de réaliser des traitements à 10 ml/t ou moins. Côté réglementaire, la société Dormfresh annonce avoir reçu un avis favorable de l’ANSES pour la réduction à 3 jours du délai de commercialisation après le dernier traitement (contre 30 jours auparavant). De même, elle annonce le retrait officiel de la mention « Ne pas utiliser les pommes de terre traitées avec le produit Dormir en alimentation animale » qui bénéficiait d’une dérogation depuis février 2021.
Les solutions à action curative
Deux huiles essentielles sont actuellement homologuées, en agriculture biologique et biocontrôle, pour leurs actions curatives : l’huile de menthe (nom commercial : Biox M) et l’huile d’orange (nom commercial : Argos). Elles permettent de nécroser des germes présents lors du traitement. Il est préférable de l’appliquer au stade point blanc au risque d’être moins efficace sur des germes développés ou de nuire à la qualité visuelle pour le marché du frais (résidus de germes nécrosés).
En ce qui concerne l’huile d’orange, il est conseillé de combiner ses applications de 100 ml/t dans un programme avec un produit préventif, hydrazide maléique ou 1,4 DMN, aidant à ralentir le développement du germe et facilitant sa nécrose.
Germes nécrosés après traitement Biox M à 60 ml/t
L’huile de menthe peut s’utiliser soit par thermonébulisation avec des doses modulables de 30 à 90 ml/t en fonction du niveau de germination et de la variété, soit par un dispositif Xedavap permettant une application en continue à 1 ou 2 ml/t par jour pour nécroser les germes dès leur apparition. Il peut y avoir une bonne capacité de rattrapage d’un stockage qui aurait eu un démarrage de germination non contrôlé avec 90 ml/t d’huile de menthe. Cependant, cette méthode de rattrapage a tout de même ses limites.
Une attention particulière est à apporter au déstockage puisque seul l’hydrazide maléique permet de ralentir la germination à température ambiante.
OptiGERM, le nouvel Outil d’aide à la décision gratuit d’ARVALIS, permet de réaliser un diagnostic et donne des conseils personnalisés pour optimiser le contrôle de la germination des pommes de terre au stockage. L’outil peut être utilisé en anticipation de la campagne de stockage pour tester différentes stratégies, mais aussi en cours de campagne pour trouver des solutions curatives en cas de germination avérée.
OptiGERM prend en compte de nombreux facteurs pour proposer un diagnostic complet de votre situation et des solutions adaptées :
- aux conditions de culture : variétés, date de plantation, date de défanage, date de récolte, irrigation, traitements au champ…
- aux conditions de conservation : type de stockage, isolation, ventilation, application de thermonébulisation possible…
- aux contraintes liées au débouché : type de débouché, cahier des charges spécifique…
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