Maïs : miser sur des stratégies alliant désherbage chimique et mécanique
Alors que les chantiers d’implantations des maïs sont quasi tous finis et que les premières parcelles lèvent, se pose la question de la conduite du désherbage. D’autant plus que les conditions sèches rendent compliqué le positionnement des applications herbicides. Le recours aux outils mécaniques en complément est particulièrement le bienvenu dans le contexte de cette année.
Identifier la flore pour adapter son programme chimique
Avant toute chose, il est important de bien identifier lors des visites de parcelles des années précédentes, la flore majoritaire de ces parcelles. Cette indication va orienter le programme (un ou plusieurs passages) et leur positionnement (prélevée pour la pression graminée ou postlevée pour gérer les dicotylédones).
Tableau 1 : Stratégies de désherbage recommandées selon la flore présente en maïs
Tableau 2 : Classification de la flore adventice
Pression graminées : le positionnement de la prélevée est compliqué
L’efficacité des produits racinaires positionnés en prélevée est conditionnée par l’humidité du sol avec les recommandations d’avoir 10 mm dans les 10 jours suivant l’application. Cette année, seuls les semis réalisés avant le 20-23 avril dans le sud de la région de manière très locale ont pu bénéficier de ces conditions idéales pour une prélevée. Pour ceux de fin avril-début mai, peu de situations sont propices à la pleine efficacité de la prélevée.
Carte 1 : Somme de pluie en mm entre le 21 et 25 avril 2022
Source : Météo-France
Lorsque le positionnement de la prélevée est rendu compliqué, un décalage vers la postlevée très précoce à 2-3 feuilles du maïs est envisageable, avec l’utilisation de produits racinaires et foliaires. Toutefois, cela nécessite toujours de l’humidité dans le sol (10 mm dans les 10 jours) pour les produits racinaires et de bonnes conditions de températures et d’hydrométrie pour les produits foliaires.
Que faire en cas de forte pression ray-grass et ray-grass résistants ?
L’efficacité de la prélevée et de la postlevée très précoce risque d’être compromise pour une majorité des situations en Bretagne. Toutefois, l’usage de la prélevée s’avère nécessaire pour les situations à pression graminées type ray-grass, notamment avec la présence de populations résistantes pour qui les solutions de postlevée sont inefficaces. Dans ces situations, pour éviter des situations incontrôlables en postlevée, il faudra malgré tout envisager une intervention, soit juste après le semis en espérant avoir l’humidité résiduelle suffisante, soit en postlevée très précoce à 2 feuilles du maïs pour des pressions un peu moins importantes.
Tableau 3 : Solutions herbicides de prélevée à privilégier sur ray-grass (dose/ha)
Tableau 4 : Exemples de solutions en rattrapage de postlevée
Postlevée : attention aux conditions d’applications des prochains jours
Dans le contexte de l’année et des prévisions à venir, il est important de prendre en compte les bonnes conditions d’application pour éviter des phytotoxicités. Plusieurs points sont importants :
- pour une bonne sélectivité, viser un traitement entre 2 et 6 feuilles du maïs, en évitant impérativement le stade pointant.
Stades des adventices :
- Pour les flores annuelles avec des traitements foliaires, pour une première application en postlevée, viser des stades jeunes (3-4 paires de feuilles maximum pour les dicotylédones et 1 à 3 feuilles des graminées). Au-delà, la destruction est plus ardue.
- Pour cette année, la vigilance est de ne pas se faire avoir par un avancement rapide des stades des adventices.
Conditions climatiques :
- L’hygrométrie est importante en ayant à minima 70 %. En 2022, par ce temps sec, privilégier au maximum les interventions tôt le matin ou après 20 h pour obtenir l’hygrométrie la plus élevée de la journée.
- Les températures doivent permettre d’avoir une application dans des conditions poussantes sans avoir de fortes amplitudes ni d’excès. Dans les prochaines semaines, la vigilance sera d’éviter d’intervenir avant des journées chaudes (températures maximum supérieures à 25°C)
Une année pour des programmes mixtes mécanique/chimique
Le climat sec est idéal pour maximiser l’efficacité des interventions de désherbage mécanique en ayant le temps d’intervenir sur de larges surfaces. Dans le cadre de l’utilisation de ces outils, plusieurs points sont à prendre en compte : le stade de la culture, le stade de l’adventice, le sol et la météo.
Stade des adventices
L’optimum pour le désherbage en plein (herse étrille ou houe rotative) est de viser le stade filament blanc, voire 1 feuille, pour la herse étrille, plus agressive que la houe. Pour la bineuse, les stades d’intervention sont beaucoup moins contraignants en raison de son action de scalpage. Les outils de désherbage mécanique sont néanmoins inefficaces contre les vivaces.
Tableau 5 : Efficacité des outils mécaniques selon le type et le stade des adventices
Stade du maïs
Quel que soit l’outil, ne pas intervenir à la levée du maïs. Pour la herse étrille et la houe rotative, l’optimum est d’intervenir en plein à l’aveugle avant la levée du maïs. Pour le binage, intervenir uniquement à partir de 2 feuilles du maïs en prenant la précaution de protéger le rang aux premiers stades (jusque 4-5 feuilles) avec des protège-plants. À des stades avancés (7-8 feuilles), le buttage du rang aura au contraire un effet appréciable pour étouffer les adventices peu développées sur le rang.
Le sol
Pour l’utilisation du désherbage mécanique, il est important d’avoir une surface plane, rappuyée sans gros débris végétaux. La herse étrille va trouver sa limite dans les terrains avec des débris végétaux, au contraire de la houe rotative. Néanmoins, la herse sera mieux adaptée à des parcelles caillouteuses que la houe. La battance limite l’efficacité également de la herse.
La météo
La météo est indispensable dans le désherbage mécanique puisqu’elle joue le rôle de lutte directe en desséchant les plantes déracinées par les outils. Sans les conditions météorologiques propices, l’efficacité des outils mécaniques est fortement atténuée. Cette année, aucun souci pour intervenir dans de bonnes conditions. Il faut un sol ressuyé avec un temps sec dans les 3-5 jours après l’intervention.
Les synthèses d’essais ont montré des résultats intéressants à utiliser des programmes de désherbages mixtes, tant sur l’efficacité contre les adventices que l’intérêt technico-économique. Les essais ont permis d’identifier deux stratégies.
Figure 1 : Première stratégie possible pour le désherbage mixte
La première utilise du matériel classique, avec, soit une prélevée (ou postlevée très précoce) en plein, soit la combinaison d’un passage de herse étrille à l’aveugle puis une postlevée très précoce. Cette deuxième option utilisant la herse trouve pleinement son intérêt cette année. Ensuite, un ou plusieurs passages de bineuse permettent de maîtriser l’interrang.
Figure 2 : Deuxième stratégie possible pour le désherbage mixte
La deuxième stratégie plus technique requiert du matériel spécifique pour localiser sur le rang le premier traitement chimique en prélevée ou postlevée très précoce, avant d’enchaîner un binage puis un rattrapage chimique en plein pour maîtriser le rang.
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