Azote sur blé tendre - En cas de défaut d’approvisionnement, quelle stratégie de fertilisation adopter ?
La tension sur le marché des engrais laisse présager que de nombreuses commandes ne pourront pas être honorées à temps pour les apports d’azote au printemps prochain. Dans les situations où les besoins en approvisionnement n’auront pas été entièrement satisfaits, comment ajuster la fertilisation azotée sur blé ? Sur quel apport peut-on lever le pied ? Et de combien peut-on réduire la dose d’azote ?
Au-delà des considérations sur le prix de l’engrais, dans un certain nombre de situations, il faut s’attendre à une pénurie d’azote, qui va contraindre les agriculteurs à réduire la dose à apporter, entraînant probablement des baisses de rendement et de teneur en protéines.
Tant que cette réduction de la dose d’azote correspond peu ou prou à l’écart entre la dose à l’optimum technique et celle à l’optimum technico-économique, la marge brute du blé devrait être assez peu impactée (voir article « Quel impact de l'envolée des prix sur le calcul de la dose totale sur blé »).
En revanche, si la disponibilité en engrais azoté est insuffisante pour atteindre l’optimum technico-économique, plus la dose d’azote totale sera réduite, plus le manque à gagner pourrait être important.
Plus que jamais, chaque unité d’azote apportée va compter, et il conviendra d’être extrêmement vigilant à bien valoriser tous les apports !
Toute unité d’azote épandue doit être absorbée !
Il est bon de rappeler que la fertilisation azotée doit venir uniquement en complément de l’azote du sol disponible sous forme minérale, pour soutenir les besoins du blé tout au long de son cycle de développement.
Il est également important de souligner que les besoins en azote sont relativement faibles durant toute la phase de tallage du blé, période où s’établit le nombre de tiges. En revanche, à partir de la montaison, les besoins journaliers sont les plus élevés (figure 1).
Figure 1 : Cinétique d’absorption de l’azote par le blé
Apporté tôt dans le cycle et en quantité importante, l’azote va favoriser le développement des talles secondaires qu’il faudra ensuite être en mesure d’alimenter en azote tout au long du cycle. Le fait d’apporter l’azote un peu plus tard pourra conduire à la régression de certaines talles, mais ceci se produira au bénéfice des talles restantes, qui, chacune, disposeront davantage d’azote pour poursuivre leur développement.
Lorsque le besoin journalier en azote est élevé, l’absorption d’azote par le blé est rapide. A l’inverse, en période de moindre besoin, l’azote apporté reste plus longtemps exposé aux pertes par volatilisation ou par organisation microbienne, ce qui réduit fortement l’efficacité de la fertilisation azotée. Les conditions de réalisation des apports sont également déterminantes, notamment dans un contexte de défaut d’approvisionnement : afin de valoriser chaque kg d’azote apporté, il faudra veiller à ne pas positionner d’apport pendant une journée avec des températures élevées et avec du vent, ou avant une période sèche, qui conduirait à des pertes par volatilisation.
De manière générale, on déconseillera de réduire la dose d’azote du dernier apport et, a fortiori, de le supprimer. En effet, avec une pluviométrie souvent plus importante en fin de printemps qu’en sortie d’hiver dans la plupart des régions, cet apport est généralement très bien valorisé et permet d’assurer à la fois rendement et protéines. A l’inverse, les apports précoces réalisés en sortie d’hiver dès la date de fin d’interdiction des épandages, ne sont pas toujours indispensables.
Ne pas se précipiter pour déclencher les apports d’azote, mais bien calculer son bilan prévisionnel !
En sortie d’hiver, la priorité ne sera pas de réaliser des apports d’azote, mais de mesurer des reliquats d’azote minéral dès que possible sur la totalité des horizons du sol de la parcelle (0-30, 30-60 et 60-90 cm en fonction de la profondeur du sol).
Réalisés suffisamment tôt, les reliquats permettront de calculer la dose d’azote totale prévisionnelle plus précisément avant la période habituelle de déclenchement de l’apport au tallage.
Si la dose totale prévisionnelle est faible, en lien avec de reliquats élevés, l’impasse de l’apport tallage pourra s’envisager. Dans le cas contraire, on cherchera à décaler cet apport autant que possible, tout en visant les meilleurs créneaux météorologiques, afin de maximiser l’efficacité de l’engrais, en se limitant à une dose modérée de 30 à 40 kg N/ha.
Préférer le fractionnement des apports
Pour les apports suivants, le conseil de fractionnement des apports ne change pas ou peu par rapport aux autres années. Il devra être adapté localement en positionnant autant que possible les apports d’azote à des périodes où la plante en a besoin et où les conditions climatiques sont favorables. De plus, l’utilisation d’un OAD est d’autant plus recommandée pour piloter le dernier apport d’azote.
S’il n’y a pas eu d’impasse au tallage, ou, si malgré l’impasse, il est encore nécessaire de réduire la dose, mieux vaut donc répartir la diminution de la dose sur plusieurs apports que de supprimer intégralement le dernier apport. En effet, cet apport tardif a un effet positif sur la teneur en protéines, critère de qualité essentiel pour assurer une bonne rémunération du blé.
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