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Bourgogne-Franche-Comté

Désherbage des céréales : partir du bon pied pour ne pas être infesté

L’automne 2023 a marqué les esprits, avec des pluies incessantes dès le 18 octobre jusqu’à la récolte. Au niveau national, 12 % des blés n’avaient pas pu être semés, avec des régions très touchées à l’Ouest et au Nord. En Bourgogne-Franche-Comté, le taux était un peu moins élevé grâce aux bonnes capacités de ressuyage en sols argilo-calcaires et des parcelles déjà emblavées avant les pluies : ainsi, 2 % des surfaces manquaient sur la dernière récolte, soit environ 7 000 hectares (par rapport à la moyenne sur 5 ans en blé). L’adage dit que les années se suivent et ne se ressemblent pas ! Il apparaît néanmoins que les premiers semis n’ont pas toujours été les plus productifs, cumulant verse et pression septoriose élevée. De plus, le contexte graminées des parcelles régionales nécessite une vigilance agronomique pointue.

Faux-semis et destruction des adventices avant implantation des blés 2024 en Bourgogne

Combiner plusieurs solutions pour gérer les vulpins-ray-grass, et surtout, ne pas semer tôt sur les parcelles sales !

Certaines parcelles ont été particulièrement sales lors de la dernière campagne : peu de créneaux pour désherber à l’automne, une gamme d’herbicides qui se réduit en céréales et des résistances, des pratiques récurrentes qui favorisent la levée des graminées (semis précoces, cultures d’automne, travail du sol simplifié) et une météo idéale pour le développement des adventices (douceur et humidité régulière).

Sur ces parcelles, une stratégie reposant uniquement sur l'utilisation d'herbicides est vouée à l’échec, même en cas de double passage à l’automne. Ce n’est pas une nouveauté, malheureusement, selon les observations printanières lorsque les graminées dépassent des céréales.

Il faut absolument combiner plusieurs solutions agronomiques. Plus le nombre est élevé, plus il y a de chances de réussite. En effet, ce type de leviers n’assure pas 100 % d’efficacité à chaque fois, certaines pratiques sont dépendantes du climat.

Dans notre boîte à outils, pour réussir le désherbage :
- Faux-semis superficiels (quelques centimètres) associés à un décalage de la date de semis de 20 jours, pour permettre aux graminées de lever et de les détruire.
- Labour à privilégier après un échec, 1 année sur 3-4, l’automne 2024 est peut-être l’occasion de ressortir la charrue ?
- Choix de la culture (moins de solutions efficaces en orges de printemps pour désherber).
- Alternance de cultures de printemps / été (minimum deux) et d’automne pour casser le cycle des adventices et alterner le mode d’action des herbicides.
- Diversification et association des modes d’action herbicides en intégrant différentes cultures dans la rotation.

Quels impacts du décalage de la date de semis ?

Pour la récolte 2024, les semis tardifs ont donné, dans notre région, des rendements équivalents, voire supérieurs à ceux de début octobre. C’est le cas quand cela permet de mieux maîtriser une pression bioagresseurs (adventices, jaunisse nanisante de l’orge, maladies, verse) ou d’éviter un stress climatique, comme en 2016 avec les pluies début juin, à floraison des semis précoces. Au printemps 2024, la pression septoriose était extrême sur certaines variétés en semis précoces et moins forte pour les semis de novembre.

Figure 1 : Synthèse d’essais sur les écarts de rendement entre différentes dates de semis par rapport à un semis de début octobre, pour le blé et l’orge, 2017-2023 – Bourgogne-Franche-Comté – essais réalisés en parcelles propres en adventices graminées
Figure 1 : Synthèse d’essais sur les écarts de rendement entre différentes dates de semis par rapport à un semis de début octobre, pour le blé et l’orge, 2017-2023 – Bourgogne-Franche-Comté – essais réalisés en parcelles propres en adventices graminées

En blé, avec un décalage de 15-20 jours (semis au 20-25 octobre), les pertes de rendement sont quasiment négligeables, d’autant plus que les hivers doux actuels permettent de rattraper ce retard au départ.

En orge d’hiver, jusqu’au 25 octobre, les rendements obtenus sont stables. Après cette date, le décalage de la date de semis est plus aléatoire : on observe des écarts de rendements positifs ou négatifs plus marqués par rapport à la référence de semis classiques (première quinzaine d’octobre).

Après le 25 octobre, une orge de printemps semée à l’automne pourra être envisagée en veillant à la sélectivité des produits de désherbage utilisée (ne pas mélanger trop de matières actives les unes avec les autres). Par ailleurs, l’application d’herbicide à l’automne semble augmenter le risque de destruction de l’orge de printemps semée à l’automne par un fort gel hivernal.

Pour les parcelles avec un fort risque graminées, un semis du 20 octobre reste donc dans la fourchette de recommandation des dates de semis. Dans tous les cas, décaler les dates de semis permet également « d’améliorer » l’efficacité du désherbage : la perte potentielle pour la culture (semis tardif) est largement compensée par le gain sur la nuisibilité des vulpins sur les parcelles sales. Par exemple, un semis décalé associé à un faux-semis permet de réduire de 50 à 80 % environ la population de graminées.

Le décalage de la date de semis sera donc une priorité pour les parcelles les plus infestées en graminées.
De plus, dans un contexte de changement climatique et pour répartir les risques, il faut diversifier les cultures, variétés et dates de semis, afin que les parcelles ne soient pas toutes au même stade en cas de stress ponctuels.

Demain : il faudra sûrement revoir les densités de semis à la baisse

Avec la récurrence des automnes-hiver doux, les biomasses en sortie hiver sont souvent trop denses pour les semis début octobre. Cela provoque un trop grand nombre de tiges à épi 1 cm qui vont consommer de l’eau, de l’azote, du rayonnement. En cas de facteurs limitants, les pertes de rendement sont plus importantes pour ces situations ; et de fortes régressions de tiges sont observées courant montaison (pas plus d’épis au final), parfois des problèmes de fertilités et remplissage des grains.

Sans oublier que ces excès de végétations sont favorables à la verse et aux maladies.

Sous réserve de semis réalisés en bonnes conditions, il faudra sûrement revoir nos préconisations de densités de semis : des travaux d’ARVALIS sont en cours dans la région sur ce sujet.

Identifier le bon compromis date de semis / variétés en blé tendre

Le décalage de la date de semis sera d’autant mieux valorisé que la variété de blé retenue n’est pas implantée au-delà de la fin de sa plage optimale. Sans être exhaustif, le tableau 1 présente les plages de dates de semis des variétés de blés les plus cultivées dans la région. Les conditions d’implantation sont également importantes pour garantir une bonne qualité de semis.

Tableau 1 : Dates de semis optimales pour les variétés les plus cultivées en Bourgogne-Franche-Comté
A retenir :
- Dans la majorité des situations et particulièrement celles avec une forte pression graminée, un semis du 20 octobre reste donc dans la fourchette de recommandations de dates de semis.
- Il est important de préserver les substances actives herbicides actuelles, aucune innovation n’est à prévoir sur le court terme. Ce sont les substances actives herbicides qui sont le plus fréquemment retrouvées dans les analyses d’eau.
- Dans un contexte de changement climatique et pour répartir les risques, le décalage de la date se semis est une priorité pour les parcelles le plus infestées.
- Il faut absolument combiner plusieurs solutions agronomiques : décalage de la date de semis, faux-semis, labour, rotation (ex. : partir sur une orge de printemps au lieu d’une orge d’hiver après un blé très infestée…).
- Régularité et supériorité des programmes double automne sur les graminées par rapport à un simple passage en situation de parcelles très infestées.

Article rédigé par les partenaires de « Objectif Cultures Propres » (OCP) Bourgogne-Franche-Comté : CHAVASSIEUX Diane et Léa BOUNHOURE (ARVALIS), BAROT Jean-François (Soufflet Agriculture), FOLTIER Benjamin (Axereal), LACHMANN Alexandre (Bourgogne du Sud), CHOPARD Patrick (CA39), COURBET Emeric (CA70), PILLIER Arnaud (CA21), DELATTRE Marc (Columa Vegephyl), DERELLE Damien (SeineYonne), FLAMAND Romain (SAS Bresson), GELOEN Michael (Terres Inovia), GUITTARD Jean Michel (Terre Comtoise), ROBLIN Yohann (Interval), LACHAUD Dominique (SAS Ruzé), Equipe grandes cultures Chambre d’agriculture de l’Yonne (CA89), MIMEAU Mickael (Alliance BFC), VILLARD Antoine (CA71) et ZAMBOTTO Cédric (CA58).

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