Stratégie fongicide sur blé dur : nos préconisations pour l’Ouest-Océan
Raisonner sa protection contre les maladies passe par plusieurs étapes, ce qui revient à répondre à plusieurs questions pour s’ajuster au mieux à chaque contexte
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Préconisations ARVALIS pour le choix de programme fongicides par bassin de production :
> Bassin Centre
> Bassin Ouest Océan
> Bassin Sud-Ouest
> Bassin Sud-Est
A lire dans cet article :
- De quelles maladies doit-on se prémunir de manière générale ?
- A quelle nuisibilité doit-on s’attendre ?
- Combien de traitement prévoir ?
- Quel investissement prévoir a priori ?
- Nos propositions de programmes fongicides
- Comment s’ajuster si la pression maladies augmente ou diminue ?
De quelles maladies doit-on se prémunir de manière générale ?
Les maladies de l’épi (Fusarium et Microdochium) sont les plus nuisibles sur blé dur : elles dégradent à la fois le rendement et la qualité en augmentant les teneurs en mycotoxines (DON) ou la moucheture. Parmi les facteurs de risque, la variété arrive derrière le climat, le précédent et le travail du sol. S’il est important de cumuler le maximum de précautions, le choix d’une variété moins sensible à ces maladies peut permettre de faire la différence.
La rouille brune est peu présente ces dernières années. Quant à la rouille jaune, elle a parfois généré des dégâts importants sur variété sensible dans la région (2014). En cas de foyer actif, elle peut provoquer des dégâts importants en arrivant tôt dans le cycle. C’est essentiellement la douceur de l’hiver, l’évolution des souches et la sensibilité de quelques variétés qui expliquent les attaques les plus fortes.
La septoriose est présente de manière plus régulière sur blé dur ces dernières années, mais cette maladie reste discrète et peu nuisible. A ne pas négliger notamment en année humide comme 2024 où sa présence et son impact ont été prépondérants dans la région. A surveiller sur variétés sensibles.
Pour rappel : les septorioses et les rouilles brunes sont assez spécifiques de l’espèce, ce qui veut dire que la rouille brune ou la septoriose du blé tendre n’attaque pas le blé dur, et inversement. Leur présence sur blé tendre n’est pas synonyme de présence sur blé dur, même sur des parcelles voisines.
A quelle nuisibilité doit-on s’attendre ?
La nuisibilité attendue est la conjonction de la nuisibilité moyenne, de la tolérance variétale aux maladies et du système de culture. Dans la région, la nuisibilité moyenne des maladies sur blé dur est de 12 q/ha dans les essais variétés menés en groies moyenne autour de la station du Magneraud (17), mais elle peut varier de 1 à plus de 40 q/ha selon les années et les variétés.
Les effets variétaux sont forts, du simple au double avec les variétés cultivées actuellement. Cela va conditionner le niveau de protection et le nombre de passage à prévoir.
Sur RGT Voilur et Canaillou, variétés naturellement tolérantes aux maladies et bien implanté dans notre bassin de production, une protection plus faible est possible. A l’inverse, il faudra prévoir une protection plus conséquente sur Relief, plus sensible aux maladies, cultivé de manière plus anecdotique sur le territoire.
Bien évidemment, certaines situations agronomiques sont favorables au développement précoce des maladies et augmentent la nuisibilité : semis précoces, sols limoneux, précédent paille favorable à la septoriose.
Combien de traitement prévoir ?
Le plus souvent, un programme en deux traitements permettra de gérer la nuisibilité de l’année : un premier traitement positionné au stade « dernière feuille » ciblera principalement la rouille brune et la septoriose, puis un traitement à floraison protègera en priorité contre les fusarioses.
En cas d’attaque précoce de maladie : rouille jaune début montaison, rouille brune ou septoriose présentes dès le stade « 2 nœuds », un programme en trois traitements sera à prévoir. Cela correspond aussi aux situations de forte nuisibilité maladie. Un traitement précoce est loin d’être rentabilisé chaque année, des économies sont donc possibles. L’ajustement doit être réalisé en fonction de la variété et de la pression de l’année.
En l’absence de rouille brune et avec une montaison très sèche (scénario de 2020 et 2022 sur variétés les moins sensibles), un traitement unique début floraison est envisageable : il visera une efficacité fusariose et rouille brune optimale (PROSARO 0,8 l par exemple).
Une protection précoce rarement utile
La protection précoce (T0) n’est généralement pas nécessaire dans la région. Elle vise à contrôler une arrivée précoce de rouille jaune. A partir du stade 2 nœuds, une intervention sera à prévoir dès l’apparition de la maladie.
Dans quelques cas très exceptionnels et sur variété sensible, en cas d’attaque de rouille jaune très précoce, un traitement est possible avant le stade 2 nœuds, mais pas avant épi 1 cm. Les produits à base de triazoles (tébuconazole ou metconazole par exemple) ont une efficacité très satisfaisante sur cette cible. Ils peuvent être complétés éventuellement par une strobilurine.
Une protection à dernière feuille fréquente mais pas indispensable
La protection des feuilles au stade « dernière feuille étalée » (T2) est généralement nécessaire tous les ans pour protéger les trois dernières feuilles contre la septoriose et la rouille brune, et garantir un rendement optimal. Cependant, en l’absence de rouille brune et avec une montaison très sèche, l’impasse est envisageable.
A ce stade, les équilibres triazoles / SDHI / strobilurines amènent de très bonnes efficacités. Il est parfois possible de se passer de strobilurine mais, sur dominante rouille brune, ce sont les matières actives les plus efficaces. La seule matière active SDHI qui peut se passer de strobilurine pour lutter contre la rouille brune est le benzovindiflupyr. Celui-ci est présent dans les spécialités à base d’ELATUS (ceci est vrai pour le blé dur et pas pour le blé tendre où les souches de rouille brune sont devenues plus résistantes).
En présence de rouille brune, l’utilisation d’une strobilurine associée à un triazole au stade dernière feuille étalée permet de la contrôler en préventif.
Une protection de l’épi à assurer en fonction de la météo et du potentiel
Le traitement ciblant les fusarioses (T3) doit être réalisé idéalement au début de la floraison, quand les premières étamines apparaissent. S’il intervient avant ou après, son efficacité est réduite.
Seul le prothioconazole est efficace à la fois sur Fusarium graminearum et sur Microdochium spp. Il convient donc de garder cette molécule pour ce traitement et l’associer à d’autres triazole pour augmenter son efficacité en présence de rouille brune.
A noter que, pour maintenir la qualité sanitaire, il convient d’éviter l’utilisation de l’azoxystrobine et de la pyraclostrobine. En revanche, la fluoxastrobine (Fandango S) peut être utilisée en T3 pour lutter contre les fusarioses. Les résultats acquis ont montré que les effets négatifs observés sur la qualité sanitaire, du fait de l’utilisation des strobilurines à la floraison, étaient généralement absents ou peu marqués avec cette molécule.
Quel investissement prévoir a priori ?
En reprenant l’ensemble des courbes de réponses aux fongicides en blé dur, il est possible de calculer l’optimum technico-économique en fonction de la nuisibilité. Pour cela, on résonne en gain net (en retranchant le prix des produits appliqués). Il faut donc prendre en compte les prix attendus du blé dur (en moyenne entre 280 et 350 €/t ces dernières années). Plus le prix du blé dur est haut, plus l’optimum technico-économique va être élevé. A l’inverse, si le prix est attendu bas, seul les programmes à très bon rapport production/prix seront privilégiés.
Nos propositions de programmes fongicides
Nos propositions de programme de protection contre les maladies compilent l’ensemble des paramètres essentiels à leur élaboration : sensibilités variétales, maladies fréquentes, nuisibilité habituelle, nombre de traitement, investissement à envisager.
Elles prennent en compte les recommandations inscrites dans la note commune Inrae, ARVALIS, Anses pour limiter le développement de résistance : pas plus d’un SDHI et d’une strobilurine par an, alterner les triazoles au cours de la saison (éviter d’utiliser 2 fois la même matière active), privilégier les molécules les plus efficaces contre les maladies présentes.
Attention en cas de risque rouille jaune :
- sur variété sensible, en présence de foyers actifs au stade épi 1 cm ou à l'arrivée des premières pustules entre 1 nœud et dernière feuille étalée : une intervention spécifique contre la rouille jaune est nécessaire (Sunorg pro 0,75 à 27 €/ha) ;
- sur variété résistante, pas d'intervention avant 2 nœuds. Entre 2 nœuds et dernière feuille étalée, en cas de présence de pustules : une intervention spécifique est nécessaire (Sunorg pro 0,75 à 27 €/ha).
Dans les propositions de programme, les solutions proposées sont techniquement comparables. Il existe cependant quelques nuances en fonction de la maladie visée.
Comment s’ajuster si la pression maladies augmente ou diminue ?
Tous les points précédents permettent de construire un programme prévisionnel de protection. Il est important de l’ajuster en fonction de l’évolution des maladies à la baisse ou à la hausse. Généralement, l’investissement calculé a priori s’ajuste de plus ou moins 40 €/ha.
En fonction des observations et des maladies, il existe des seuils d’intervention. En dessous de ces seuils, la maladie n’est pas une problématique technico-économique et le retour sur investissement n’est pas assuré. A l’inverse, quand les seuils sont dépassés, la nuisibilité doit être levée.
Pour suivre l’évolution des maladies en cours de campagne, consultez le bulletin de santé du végétal de votre zone : Poitou-Charentes ou Pays de la Loire.
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