Biostimulants à base de bactéries fixatrices d’azote : retour sur trois ans d’essais sur blé
Plusieurs biostimulants revendiquent une amélioration de la nutrition azotée des cultures grâce aux bactéries fixatrices de l’azote atmosphérique qu’ils contiennent. ARVALIS et de nombreux partenaires en ont testé un sur blé durant trois campagnes : le Blue N, aussi commercialisé sous les noms Utrisha N et Presto N.

Les bactéries fixatrices d’azote les plus connues en France sont celles appartenant au genre Rhizobium, qui réalisent la symbiose au sein des nodosités des légumineuses. Ces bactéries sont dites « symbiotiques », c’est-à-dire qu’elles ne peuvent remplir leur rôle qu’en s’associant avec une plante dont elles sont par ailleurs souvent spécifiques.
Il existe aussi des bactéries fixatrices d’azote « libres », qui vivent dans la rhizosphère et qui fixent l’azote de l’air pour leur propre consommation. Une fois appliquées au sol, elles ont la capacité de se déplacer pour rejoindre la rhizosphère puis de capter l’azote atmosphérique afin de le rendre disponible pour les plantes. Ces bactéries puisent en retour leur énergie dans les exsudats racinaires produits par la plante. Les bactéries Azotobacter appartiennent à cette catégorie. La principale difficulté avec ces espèces est de les introduire dans un milieu dont elles ne sont pas natives, et d’y assurer leur survie.
Lire aussi : « Biostimulants : de quoi parle-t-on ? »
Enfin, il existe des bactéries dites « endophytes » qui pénètrent dans les tissus végétaux et qui réalisent la fixation de l’azote directement à l’intérieur des plantes. Ces bactéries sont plus ou moins spécifiques de certaines espèces cultivées. La principale difficulté avec ces espèces est qu’elles parviennent à coloniser efficacement les tissus des plantes.
Quel que soit le milieu de vie des bactéries, sol rhizosphérique ou feuilles, appliqués en conditions favorables, ces biostimulants mettraient à disposition du blé, entre le moment de l’application et la maturité, de l’ordre de 20 à 30 kg/ha d’azote, selon les fabricants.

Blue N : des résultats sur blé en-deçà des attentes
Blue N a été testé de 2021 à 2023 dans 39 essais*, majoritairement sur blé tendre (1 essai blé dur), conduits par ARVALIS et de nombreux partenaires, dans une large gamme de contextes pédoclimatiques et en conditions légèrement limitantes en azote.
Dans l’ensemble des essais, l’effet de ce biostimulant a été évalué en comparant le rendement du blé et la teneur en protéines des grains avec ou sans biostimulant, à fertilisation identique.
Toutefois, ces essais ont été conduits le plus souvent en situation de dose d’azote suboptimale (dose X-30 à X-80) dans les deux-tiers des situations, et à la dose X dans les situations restantes. Au global, cela correspond, en moyenne, à une dose inférieure de 29 kg N/ha par rapport à la dose X prévisionnelle) en comparaison avec un témoin à dose d’azote équivalente.
Ces conditions d’essais où l’azote était légèrement limitant pouvaient, a priori, être favorables à l’observation d’un effet azote du biostimulant sur la culture. Cependant, utilisé en complément de la fertilisation azotée, Blue N n’a permis d’améliorer ni le rendement, ni la teneur en protéines de manière significative, aussi bien en situation de sous-fertilisation que lorsqu’il est testé à la dose X.
Il convient de préciser qu’il s’est parfois avéré difficile dans les essais de réunir l’ensemble des conditions optimales d’application du biostimulant, qui doivent permettre la survie et le développement des micro-organismes. Lorsque c’était le cas, en moyenne, un effet négatif significatif sur le rendement a été observé dans les essais (figure 1).
Par ailleurs, dans 6 essais seulement, le gain d’azote absorbé dans les parties aériennes permis par Blue N a également été évalué. Ce gain varie de - 6 à + 28 kg N/ha avec une valeur moyenne de + 6 kg N/ha qui, statistiquement, n’est pas significative.
Compte tenu du surcoût lié à l’achat du produit, l’application de Blue N n’est donc, en moyenne, pas rentable dans les conditions où il a été testé.
* 13 essais ARVALIS + 26 essais en partenariat avec CA Alsace, CA 02, CA 17, CA 52, CA 59, CA 62, CA 80, CRA Pays de la Loire, CETA HAM, NORIAP, SETAB, SOUFFLET et VAL’EPI.
2 commentaires
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Bonjour,
Dans cette synthèse, nous avons 8 essais en AB avec des doses d'azote allant de 0 à 60 kg N/ha.
Si l'on isole uniquement ces essais, on obtient en moyenne +0.6 q/ha de rendement avec Blue N mais cet écart n'est pas significatif.
La synthèse inclut quelques essais sans fertilisation (3 en AB et 3 en conventionnel) : dans ces essais sans apport d'azote, on obtient en moyenne +2.7 q/ha de rendement avec Blue N. Cet écart est faiblement significatif (risque alpha de 10%) mais ce résultat est très fortement influencé par un seul essai dans lequel un gain de rendement de 8.8 q/ha a été obtenu avec Blue N. Malheureusement, rien ne permet d'expliquer pourquoi on obtient un très bon résultat uniquement dans cet essai et pas dans les autres.
Grégory Véricel (Arvalis)
Avez vous mesuré sans apport d'azote ? Une situation " légèrement limitante " ne peut pas mettre en valeur ce type de produit.