Risque piétin-verse sur blé : l’observation avant tout !
Les parcelles de blé atteignent le stade épi 1
Des températures élevées et des cumuls de pluie importants depuis les semis
Depuis mi-octobre, la température moyenne est excédentaire d’environ 2°C sur les stations de Lyon-St-Exupéry (69) et Misérieux (01) par rapport à la moyenne des vingt dernières années. Le cumul de températures sur cette période est excédentaire de 30 % par rapport à la médiane, soit d’environ 300°C. Le mois de février a été particulièrement doux, favorisant un démarrage rapide de la végétation en sortie d’hiver.
La pluviométrie a également été excédentaire, particulièrement en octobre et novembre. On cumule 450 à 500 mm de pluie sur les deux stations à Lyon St-Exupéry et Misérieux, contre environ 300 mm en moyenne sur vingt ans.
Figure 1 : Positionnement de l’année 2024 en termes de cumuls de pluie et de températures sur la période 15 octobre - 10 mars – stations de Lyon-St-Exupéry (69) et Misérieux (01) – Analyse fréquentielle 2004-2023
Source : Météo France
Ce climat, en moyenne chaud et humide depuis le semis, a provoqué une avance du stade épi 1 cm, de l’ordre de dix à quinze jours par rapport à la médiane des vingt dernières années pour les semis effectués à une date « habituelle » (seconde quinzaine d’octobre). Pour les semis effectués plus tardivement, l’avancée des stades a également été rapide, les semis de fin novembre atteignent généralement le stade épi 1 cm durant la dernière décade de mars, proche des dates habituelles dans la région. Le retard de ces parcelles est presque entièrement rattrapé.
Evaluer le risque à la parcelle
Le potentiel de risque climatique pour les parcelles semées à des dates classiques est relativement élevé vis-à-vis du piétin-verse, et assez semblable à l’année haute 2001 (tableau 1 et figure 3). Cela s’explique par la douceur exceptionnelle de la fin d’année 2023, suivie d’un mois de février 2024 humide et doux, avec de nombreuses contaminations.
Il faut préciser que pour les semis tardifs, nombreux cette année dans la région, le risque climatique devient faible à modéré (tableau 1).
Il est donc important de relativiser le nombre de parcelles concernées par un risque climatique élevé.
De plus, le risque effectif de développement du piétin-verse dépend de plusieurs facteurs :
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Résistance de la variété de blé cultivée
Certaines variétés possèdent un gène de résistance (PCH1) au piétin-verse. Il s’agit du levier le plus efficace et le plus économique pour se prémunir de la maladie. Les variétés avec des notes de sensibilité supérieure ou égale à 5 ne justifient pas de traitement (KWS Ultim, LG Absalon, Grekau, Prestance, LG Aikido…). Aucune surveillance vis-à-vis de ce champignon n’est nécessaire.
Au contraire, des variétés très sensibles (note de 2) sont cultivées dans la région (RGT Vivendo, LG Abilene, RGT Pacteo, Balzac…) et doivent faire l’objet d’une surveillance particulière.
Figure 2 : Echelle de tolérance des variétés de blé tendre au piétin-verse - 2023
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Potentiel infectieux de la parcelle : précédent, type de sol et travail du sol
Les parcelles de blé avec un précédent blé, les sols de limons battants et le labour favorisent la persistance de l’inoculum dans la parcelle via les résidus de culture. Des attaques récentes de piétin-verse sur la parcelle dans les années antérieures représentent également un risque car l’inoculum peut se maintenir plusieurs années. Dans notre région, les successions de blé sur blé sont assez rares et les sols de limons battants se retrouvent dans quelques secteurs délimités. Ces dernières années le piétin-verse a été plutôt discret, même s’il a été un peu plus observé en 2023 que les années précédentes.
La grille d’évaluation ARVALIS permet d’identifier les parcelles à risque.
Figure 3 : Grille d’évaluation du risque piétin-verse
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Risque climatique de l’année (modèle TOP)
Le modèle TOP calcule un indice de risque climatique prenant en compte la pluie et les températures journalières à partir de la date de semis. La valeur de cet indice à épi 1 cm est prise en compte dans la grille d’évaluation (figure 3). Des valeurs seuils permettent de définir l’effet climatique annuel lié au risque piétin-verse :
- Indice < 30 : risque faible ;
- 30 < Indice < 45 : risque moyen ;
- Indice > 45 : risque fort.
Le risque climatique est modéré à élevé pour les semis du 15 octobre, mais devient faible pour les nombreux semis réalisés autour du 20 novembre.
Tableau 1 : Indice de risque climatique pour le piétin-verse du modèle TOP, pour deux dates de semis pour différentes stations météo de Rhône-Alpes
Ce modèle n’indique qu’une potentialité climatique de développement du piétin-verse. Il est calibré en considérant que l’inoculum n’est pas limitant. La maladie s’est faite plutôt discrète ces dernières années, ne laissant que peu d’inoculum dans les parcelles. Le risque est largement déterminé par les critères agronomiques de la parcelle. En 2023, on a pu observer un développement tardif de la maladie, peu fréquent et avec une nuisibilité faible à moyenne.
Observer avant toute intervention
Dans tous les cas, c’est l’apparition de symptômes sur les tiges entre épi 1 cm et 1 nœud qui va dicter le besoin de protéger la parcelle ou non. L’observation des parcelles reste indispensable pour déterminer l’intérêt ou non d’une protection fongicide. A partir du stade épi 1 cm, observer les tiges principales sur 40 pieds prélevés au hasard dans la parcelle et déterminer le nombre de tiges atteintes. Une tige est comptée comme telle lorsque la tache de piétin-verse traverse au moins une gaine.
Figure 4 : Les seuils d’intervention
Le piétin-verse peut s’extérioriser jusqu’à la fin de la montaison. Cependant, un traitement spécifique ne se montre efficace que lorsqu’il est réalisé entre épi 1 cm et 1 nœud. C’est la raison pour laquelle il est conseillé d’observer cette maladie en début de montaison mais aussi de prendre en compte l’historique de la parcelle en cas de risque moyen. En effet, dans ces situations, si du piétin-verse était présent les années précédentes, il est très probable que la maladie se réexprime. Le déclenchement d’un traitement, même si les seuils ne sont pas atteints dans ces situations spécifiquement, peut permettre de prévenir le développement de symptômes tardifs qui ont parfois pu être observés.
Identifier le piétin-verse
Les symptômes de piétin-verse se caractérisent par la présence de taches elliptiques sur les gaines. Cette dernière est bordée par un liseré brun diffus (photos 1 et 2). Après avoir soulevé successivement les gaines, on peut observer un ou plusieurs points noirs sur la tige correspondant à des amas mycéliens (stromas).
Astuce : pour s’assurer que les symptômes correspondent à du piétin-verse, il faut passer un doigt humide sur les taches (photos 3 et 4) ; si le stroma ne s’efface pas, il s’agit bien de piétin-verse.
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