Récolte du maïs et datura : comment limiter les intoxications dans les élevages ?
Le datura est présent en Bretagne depuis plusieurs années, son apparition est encore récente en Normandie. Il est observé en particulier dans les parcelles implantées en légumes d’industries et en sarrasin mais aussi en maïs destiné l’alimentation animale, parfois en agriculture biologique. On le retrouve également en bords de champs, de route et dans les lotissements. Cette adventice aux allures séduisantes, avec ces jolies fleurs blanches, est extrêmement toxique pour l’homme et les animaux. Cette année, les levées tardives font craindre un manque de vigilance et de surveillance. Ainsi, autant que possible, il est indispensable de bien gérer les récoltes pour limiter les contaminations.
Le datura en quelques mots
Le datura est une adventice de la famille des dicotylédones. Sa période de levée préférentielle est au printemps : cette année, les conditions climatiques ont provoqué des levées plus tardives et échelonnées. Elle est donc très présente dans les cultures de printemps comme le sarrasin, les légumes d’industries ou encore le maïs.
Une plante de datura peut produire 5000 graines et une graine peut survive plus de 40 ans dans le sol ! Au-delà de sa nuisibilité directe sur le rendement et sur le salissement à long terme des parcelles, c’est une plante toxique. Sa toxicité provient des alcaloïdes tropaniques qu’elle contient dans les tiges, les feuilles et les graines. Ainsi, il existe des seuils réglementaires à respecter :
- En alimentation animale : 1 gramme de graines/kg de céréales.
- En alimentation humaine : 15 µg atropine + scopolamine/kg de maïs grain (5 µg/kg de maïs pop-corn).
A titre de comparaison, sa toxicité est 500 fois plus importante que les mycotoxines de type DON !
Tolérance zéro pour le datura dans le maïs ensilage et le maïs grain humide
En termes d’ordre de grandeur, on retiendra les seuils suivants en fonction de la destination du maïs :
- En maïs ensilage pour les bovins :
1 pied de datura pour 25 m² suffit à provoquer une intoxication mortelle chez les bovins dans le maïs ensilage.
- En maïs grain humide pour les porcs :
Peu de bibliographie existe sur le sujet, certains articles évoquent le seuil de toxicité de 1,21-1,5 mg alcaloïdes par kg d’aliment, étant donné que les porcs sont beaucoup plus sensibles que les bovins.
Un ordre de grandeur peut être donné à 1 à 2 pieds de datura pour 100 m² (pour 90 q/ha de rendement grain). Cette quantité peut suffire pour provoquer des symptômes graves chez le porc.
IMPORTANT : les graines de datura sont rarement réparties de manière homogène dans les silos, une zone du champ infestée de datura va se retrouver dans une partie seulement du silo. Lorsque cette partie va être donnée aux animaux, les risques sanitaires sont énormes allant jusqu’à la perte d’animaux.
Ainsi, au vu des enjeux sanitaires et économiques pour les élevages, la tolérance zéro est de mise dans les champs !
En présence de datura dans un champ, que faut-il faire avant la récolte ?
- Faire le tour des parcelles pour repérer les plantes. Certaines zones sont plus sensibles au développement du datura : zone à faible densité, mouillères, tournières, passage de gibier avec destruction de plantes, passages d’enrouleur…
- Détruire les plantes présentes pour éviter leur récolte et leur propagation.
- Si les plantes ne sont pas montées à graines :
- Passage de broyeur possible si la surface est importante.
- Arrachage manuel (porter des gants, enfouir/isoler les plantes).
- Ne pas les brûler (fumées toxiques).
- Si les plantes sont montées à graines :
- Ne pas broyer !
- Arracher les plantes (porter des gants) et/ou couper les bogues avant de les mettre à la poubelle (dans les ordures ménagères pour incinération).
- Ne pas les brûler (fumées toxiques), ne pas les laisser en bout de champs, ne pas les mettre sur les tas de composts.
- Si les plantes ne sont pas montées à graines :
Au moment de la récolte
- Toujours commencer les récoltes par les parcelles non infestées pour ne pas répandre d’éventuelles graines dans le reste du parcellaire de l’exploitation.
- Veiller au bon nettoyage du matériel (moissonneuse-batteuse, ensileuse) entre les chantiers. Surveiller particulièrement le début de chantier de la machine, là où des graines de datura peuvent tomber au sol.
- En cas de recours à une entreprise de travaux agricoles, prévenir l’opérateur pour s’assurer du nettoyage de la machine. Il s’agit de limiter les contaminations entre parcelles et entre exploitations.
- Informer le personnel lors de la livraison au silo d’une benne potentiellement contaminée. Les organismes stockeurs procéderont à des réfactions en cas de présence de datura et à des refus de marchandises.
Les conditions climatiques de cette année ont provoqué des levées tardives de datura dans les parcelles de maïs, bien après les derniers désherbages.
Le datura est une plante très toxique :
- 1/25e de graine peut intoxiquer un homme de 70 kg.
- Une seule plante de datura (5000 graines/pied) peut théoriquement intoxiquer une ville entière comme Brest.
- 1 pied de datura pour 25 m² suffit à provoquer une intoxication mortelle chez les bovins dans le maïs ensilage.
- 1 pied de datura pour 100 m² peut provoquer des symptômes graves chez le porc.
Au vu des enjeux sanitaires pour les élevages, la tolérance zéro est obligatoire.
Avant la récolte des maïs, repérer les parcelles infestées et détruire les plantes présentes.
Au moment de la récolte, éviter la contamination des autres parcelles : commencer par les parcelles non infestées, nettoyer le matériel, se débarrasser des lots contaminés à travers la méthanisation où le compostage n’est pas une bonne solution !
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