Cultures intermédiaires - Mélanges d'espèces de couverts : des synergies entre légumineuses et non-légumineuses
Mélanger plusieurs espèces de couverts est une pratique devenue courante. L'association d'une légumineuse à une graminée ou à une crucifère présente notamment l'avantage d’augmenter la fourniture d’azote à la culture suivante, sans pour autant pénaliser l’effet piège à nitrate.
Sommaire :
Profiter des atouts de chaque espèce composant le couvert
Les mélanges les plus courants sont des binaires. Ils associent une légumineuse à une graminée ou à une crucifère. Mais des mélanges plus complexes (à 3, 4 voire 5 espèces et plus) sont aussi parfois réalisés. L’expérience acquise montre que la composition finale en termes de proportion d’espèces peut varier fortement en fonction des conditions de développement.
Les mélanges ont pour premier objectif de diversifier les atouts et les contraintes liés à chaque espèce afin de diminuer au global les risques d’échec dus à tel ou tel facteur (implantation, conditions pédoclimatiques, ravageurs…). La stratégie consiste à ne pas mettre « tous ses œufs dans le même panier». Cependant, le plus grand intérêt réside sans doute dans la possibilité d’associer des familles d’espèces ayant un fonctionnement différent vis-à-vis de l’azote. Des non- légumineuses (crucifères, graminées…) peuvent être associées à des légumineuses qui peuvent aussi absorber l’azote minéral du sol mais surtout assimiler de l’azote de l’air par fixation symbiotique. Lorsque les fournitures d’azote par le sol sont limitées (faibles reliquat et minéralisation post-récolte), les couverts de non légumineuses produisent des biomasses faibles avec les inconvénients qui y sont liés : impact réduit sur la structure du sol ou les adventices, quantité d’azote limitée à fournir à la culture suivante… L’ajout d’une légumineuse n’empêche pas la non-légumineuse de jouer son rôle de piège à nitrates et permet de fixer en complément de l’azote atmosphérique. Les restitutions d’azote à la culture suivante en seront améliorées.
Associer des espèces nécessite de respecter certaines règles
Quelques règles doivent cependant être respectées pour constituer un mélange d’espèces de couverts :
- Choisissez des espèces adaptées aux contraintes de la parcelle : cultures de la rotation, culture suivante, date de semis, utilisation comme fourrage ou pas, type de semis et de destruction… Semer un mélange ne doit pas faire oublier ces principes de base. Par exemple, en cas de pois dans la rotation et de souhait d'éviter par précaution tout couvert susceptible de multiplier l’Aphanomyces, l’ensemble des espèces choisies doit répondre à ce critère. Cela signifie par exemple éviter les couverts de pois fourrager, gesse et lentille, qu’ils soient seuls ou associés. De manière générale, chaque espèce du mélange doit répondre aux contraintes agronomiques de la parcelle ou à son itinéraire technique. Pour vous aider à choisir, un outil "Choisir son couvert selon quelques critères simples>" vous est proposé. Il prend en compte la contrainte rotationnelle, la culture suivante, la date de semis du couvert et sa valorisation ou non en fourrage.
- Faites attention aux couverts trop étouffants, en particulier la moutarde qui par sa vigueur à l’implantation et sa hauteur laisse peu de chance aux autres espèces. La densité de la moutarde doit être très faible (ex : 1 kg/ha pour la moutarde blanche ou 0,5 kg/ha pour la moutarde brune). D’autres couverts se montrent moins étouffants et plus adaptés à l’instar du radis, de la phacélie ou de l’avoine.
- Raisonner les densités en vous fondant sur des pourcentages des doses en pur. Cela permet de garder une base correcte à la levée pour avoir un couvert ni trop dru, ni trop clair. Deux espèces peuvent se semer chacune à demi-dose. Par exemple, 4,5 + 90 kg/ha pour une association radis + féverole, leurs doses en pur étant respectivement de 9 et 180 kg/ha. Le choix des densités de semis dépend également des objectifs visés. A titre d'exemple, si le souhait est d'avoir l'équivalent de 50% de légumineuses pour une association avoine rude + phacélie + trèfle d’Alexandrie, les densités de semis pourront être les suivantes : 7,5 kg/ha de trèfle (50% de 15), 8,75 kg/ha de moutarde (25% de 35) et 1,75 kg/ha de phacélie (25% de 7).
Un tableau précisant les densités de semis conseillées pour les différents types de mélange est disponible ci-dessous
- Privilégier des espèces avec des semences de taille sensiblement identique. A moins de semer en deux fois ou de disposer d’un dispositif de double distribution sur le semoir, il est conseillé de choisir des espèces avec des semences de taille sensiblement identique, de manière à limiter le phénomène de sédimentation dans le semoir et, surtout, à placer chaque type de semence à une profondeur adaptée. Aux dires d’agriculteurs pratiquant des associations incluant de nombreuses espèces (5 à 10), la présence de semences très différentes « stabilise » le mélange malgré des semences de taille parfois très différentes. Cela évite que les semences ne se trient dans le caisson du semoir.
Privilégier des associations légumineuses / non-légumineuses
Dans plusieurs essais réalisés à Boigneville (91) de 2004 à 2010, 8 comparaisons mettent en relation dans les mêmes conditions un mélange de 3 non-légumineuses avec les 3 espèces qui le composent, seules. Les espèces seules ont produit en moyenne 1,5 t/ha de matière sèche et ont absorbé 28 unités d’azote, contre 1,3 t/ha et 25 unités pour les associations (voir tableau 1). Si mélanger différents couverts permet de ne pas mettre « tous les œufs dans le même panier », les synergies entre espèces n'ont, en revanche, pas pu être vérifiées malgré des architectures de végétation différentes ou des systèmes racinaires différents. 21 associations incluant des légumineuses et des non-légumineuses ont aussi été comparées aux espèces du mélange seules : 7 associations avoine+vesce, 3 associations radis+vesce ou lentille et 11 autres mélanges incluant 2 à 3 non-légumineuses et une à deux légumineuses. Les non-légumineuses seules ont produit en moyenne 1,8 t/ha de matière sèche et absorbé 29 unités d’azote contre 1,5 t/ha et 60 unités pour les légumineuses et 2,1 t/ha et 47 unités pour les associations (voir tableau 1). Des effets de synergie ont été notés entre les légumineuses et non-légumineuses. L’association des deux est un compromis pour concilier piégeage d’azote, couverture des sols et fourniture d’azote à la culture suivante.
L'association légumineuses / non-légumineuses augmentent la production de biomasse du couvert
Tableau 1 : Comparaison d'associations de couverts et des espèces seules qui le composent
En complément d'une approche purement agronomique, le réseau Agrifaune a identifié le type de couvert pouvant être favorable à la petite faune de plaine : il doit être relativement clair, avec des plantes de plusieurs hauteurs (hautes, moyennes et basses) et la présence d’espèces de couverts appétentes pour le gibier (légumineuses, graminées, caméline, radis, moutarde, tournesol, sarrasin). Dans la même optique, des couverts fleurissant en fin d’été ou début d'automne nourriront les insectes pollinisateurs en fin de saison (phacélie, sarrasin…). Cependant, une floraison précoce est synonyme de montée à graine précoce.
Quelques illustrations de couverts multi-espèces :
Moutarde blanche + Phacélie + Niger + Vesce Commune + Lentille noirâtre |
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