Opter pour la technique de destruction des couverts végétaux la plus appropriée
De nombreuses techniques de destruction des couverts végétaux existent. Chacune est plus ou moins adaptée aux espèces de couverts semées.
La date de destruction se raisonne en fonction de la culture suivante, de l'espèce du couvert et du type de sol (tableau 1). Si l’on exclut les contraintes liées au travail profond en sols argileux, on peut retenir que la destruction du couvert peut intervenir juste avant le semis d’une céréale d’hiver, ou environ deux mois avant l’implantation d’une culture de printemps.
De manière générale, un couvert bien développé est plus facile à détruire qu’un petit couvert, malgré un risque de bourrage plus élevé pour certains outils.
Se référer à la directive nitrate de son département pour déterminer à partir de quelle date la destruction d’un couvert est autorisée.
• Une destruction des couverts végétaux par le glyphosate
• Le broyage facilite le travail du sol à venir
• Profiter du labour pour « faire d’une pierre deux coups »
• Laisser le gel opérer
• Le roulage sur sol gelé
• Le déchaumage : une option possible
Une destruction des couverts végétaux par le glyphosate
Dans un rapport publié le 9 octobre 2020, l’ANSES a dévoilé les résultats de son évaluation comparative des alternatives au glyphosate en interculture. Il en ressort que cette molécule reste autorisée dans trois situations :
• en non-labour avant cultures d’hiver et de printemps, à la dose de 1080 g/ha/an,
• après un labour d’été/ début d’automne avant culture de printemps en sols hydromorphes uniquement, à la dose de 1080 g/ha/an,
• dans le cadre de la « lutte réglementée » (présence de chardon, ambroisie…) et quelques cas de lutte d’organismes nuisibles réglementés (présence de bactéries de quarantaine ou de nématodes sur repousses de pomme de terre par exemple), à la dose de 2880 g/ha/an.
Dans les situations où il restera autorisé (en non-labour ou en labour d’été/début d’automne en sols hydromorphes), le glyphosate garde son intérêt : facile à mettre en œuvre, débits de chantiers importants, assez peu dépendant de l’humidité du sol avec peu d'impact sur la structure du sol en cas d'automne humide.
De nombreuses espèces sont sensibles à cet herbicide, en particulier les graminées (couverts, repousses ou adventices). Il est également possible d’y associer du 2.4D pour améliorer l’efficacité de l’intervention sur les couverts de dicotylédones. Toutefois, l’emploi de ce produit entraîne un délai avant l’implantation de certaines cultures.
A ce jour, la directive nitrate peut limiter les possibilités de destruction chimique dans certains départements, en particulier sur des parcelles labourées régulièrement. Renseignez-vous auprès de votre préfecture.
Dans les situations où le glyphosate sera interdit, ou que la dose de 1080 g/ha/an pourra être mise en difficulté (notamment sur vivaces ou annuelles développées avant le semis d'une culture de printemps), le choix de l’espèce de couvert peut permettre de s’adapter en privilégiant les espèces faciles à détruire mécaniquement ou par le gel. Les couverts de graminées (seigle notamment) semblent cependant moins adaptés à ces techniques que d’autres, comme la moutarde ou la phacélie. La gestion des adventices ou des repousses restera également un problème à gérer, notamment si le couvert n’a pas pu jouer son pouvoir de compétition.
Le broyage facilite le travail du sol à venir
Le broyage est une technique très répandue et facile à mettre en œuvre. Il permet de réduire le volume de la végétation, ce qui facilite ensuite le travail du sol. Puisque le broyeur ne touche pas le sol, seul la portance du sol est à prendre en compte pour éviter la compaction. L’autre particularité de cette technique est de laisser 100 % des résidus en surface pour une bonne protection du sol. Cependant, le broyage est déconseillé sur des couverts de graminées puisque ces dernières sont capables de repousser après une coupe.
Certains nouveaux rouleaux « hacheurs » (lourds, pleins, équipés de lames saillantes et passés à grande vitesse) ont un mode d’action proche des broyeurs en hachant les tiges de plantes fragiles (moutarde, phacélie…).
Profiter du labour pour « faire d’une pierre deux coups »
En cas de labour, il est possible de profiter du retournement du sol pour détruire le couvert sans passage supplémentaire. Dans ce cas, la destruction du couvert ne génère rien de plus en termes de coût que la pratique habituelle sans couvert.
En revanche certaines complications peuvent survenir. Après enfouissement, des pieds peuvent repartir via leurs organes de réserve. C’est notamment le cas avec du radis ou de la navette. Des bourrages peuvent également arriver en présence de couverts très hauts comme la moutarde. Pour éviter ce problème, trois pistes peuvent être envisagées :
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Broyer le couvert avant le labour.
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Opter pour une espèce qui sera moins haute : on peut remplacer la moutarde par une phacélie par exemple. Le surcoût des semences de phacélie peut être « amorti » en économisant un broyage.
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Coucher le couvert pour faciliter son enfouissement.
Pour cela, diverses techniques existent : rouleaux à l’avant du tracteur, barres ou autres chaînes. Avec ces systèmes, il est préférable de retirer les rasettes pour faciliter l’écoulement de la végétation. Cela donne un labour moins esthétique mais plus pertinent d’un point de vue agronomique. Une partie des résidus est plaqué sur le flanc du labour au lieu que la totalité soit enfouie en fond de raie.
Laisser le gel opérer
Laisser le couvert geler est sans aucun doute la solution idéale.
Cependant, l’apparition du gel à des températures suffisamment basses est aléatoire et parfois tardive par rapport aux objectifs de date de destruction. Cette option est donc plus pertinente dans les régions au climat continental comme le nord-est de la France ou les secteurs de montagne. Il est possible de prédire ses chances de réussite en fonction du climat local, de la date de destruction souhaitée et des espèces de couvert semées. Plus le couvert est développé, plus il est sensible au gel.
Attention : le salissement de la parcelle doit également être pris en compte. De nombreuses adventices ou repousses de blé sont assez peu gélives. Les couverts très gélifs vont disparaître dès les premières gelées blanches et stopper la concurrence sur les adventices, laissant ainsi la parcelle reverdir pendant l’hiver.
Le roulage sur sol gelé
Le roulage des couverts par des températures négatives peut fonctionner en hiver : les blessures provoquées par le rouleau amplifient les effets du gel sur les plantes. Un roulage permet de garder le sol recouvert de résidus. Mais il peut occasionner des tassements du sol sous les roues du tracteur, en particulier si le sol n’est pas gelé sous le couvert. Le roulage effectué sur des petites gelées a une bonne efficacité sur de nombreuses espèces gélives, en particulier si elles sont bien développées.
A l’inverse, les couverts peu gélifs (graminées adventices ou repousses de blé) sont peu sensibles au roulage.
En l’absence de gel, les résultats d’un roulage sont décevants sur quasiment toutes les espèces, même avec un « rolo faca ». Seules certaines espèces très sensibles, comme la phacélie, seront détruites.
Assez rapide et peu coûteux, le roulage sur gel reste contraignant en termes d’organisation du travail : il faut être disponible les matinées ou les nuits où il va geler. Le gel peut également apparaître un peu tardivement, souvent en janvier ou février. Ce n’est donc pas bien adapté en vue de la mise en place de cultures de printemps précoces.
Le déchaumage : une option possible
Utiliser un outil de déchaumage peut permettre de détruire un couvert tout en préparant le lit de semences de la culture suivante. Cette stratégie conjugue coût et débit de chantier plutôt favorables. Les outils de ce type sont nombreux : déchaumeurs à disques indépendants, bêches roulantes, cultivateurs à deux ou trois rangées de dents… Même s’il est légèrement grossier, le travail effectué va s’affiner au cours de l’hiver sous l’action du climat. Il va également permettre d’avoir des terres qui ressuient en surface plus rapidement au printemps.
Avec des outils à dents, le couvert sera plus ou moins enfoui selon la profondeur de travail. Des phénomènes de bourrage peuvent survenir en cas de couverts très développés. Un broyage préalable peut alors être nécessaire.
Les déchaumeurs à disques indépendants permettent de faire un mulchage des couverts. Les outils à grands disques sont bien adaptés, mais l’adaptation d’équipements comme un rouleau couteau améliore l’efficacité des outils à petits disques. Cet équipement est désormais disponible pour la plupart des constructeurs.
Les bêches roulantes sont également très à l’aise dans les couverts, y compris avec de fortes végétations.
Pour éviter toute mauvaise surprise, il faut veiller à travailler en bonnes conditions de ressuyage. Ces bonnes conditions pouvant n’apparaître que tardivement pendant l’hiver (voire pas du tout en cas d’hiver doux et humide), il peut sembler intéressant d’envisager d’autres modes de destruction moins dépendants de l’humidité du sol, comme un broyage si le couvert est sensible à ce mode de destruction. Cet aléa climatique nous montre à quel point il est important d’adapter nos pratiques en commençant par un choix d’espèces de couvert sensibles à différents moyens de destruction mécaniques, de manière à garder plusieurs cordes à son arc.
1 commentaire
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Bonjour Jérôme et Damien.
Merci pour cet article.
Quelques remarques ou compléments, peut-être plus spécifiques aux itinéraires avec destruction de couverts sans chimie (BIO ou conventionnels) :
- En cas de déchaumage, il est fréquent que la totalité de la végétation ne soit pas détruite ou qu'il y ait des repousses ou repiquages après intervention (notamment sur des plantes suffisamment rustiques et poussantes). Je conseille donc d'éviter une destruction trop proche de la mise en place de la culture suivante pour pouvoir intervenir encore si besoin. Comme vous l'avez indiqué, un broyage préalable peut être pertinent. Il a l’avantage de pouvoir être effectué précocement, ce qui évite de se retrouver avec un sol nu trop tôt pendant l'hiver (les racines restent en place).
- En l'absence d'herbicide, la principale problématique est de trouver des déchaumeurs efficaces : capables de détruire un couvert en un minimum de passages. Pouvant scalper à moins de 10 cm et sur TOUTE la largeur de travail.
De nombreux outils à dents ont des difficultés pour maintenir les socs en position horizontale ; ils sont également trop souvent équipés de socs à ailettes (socs qui ne travaillent pas à plat) et qui ne recroisent pas suffisamment. Avec de tels équipements, les ailettes créent des "buttes de patates" non travaillées de part et d'autre du soc (zones de repousses ou de manques). Quelques constructeurs commencent à se pencher sur la question : forme et maintien des socs, nombre de rangées, nombre de dents par mètre et au final distance de recroisement entre socs.
Du côté des déchaumeurs à disques indépendants, le principal problème concerne le manque recroisement entre disques (en lien avec l'écartement entre disques et des angles d'attaque trop faibles). La majorité de ces outils sont plus adaptés à des reprises (labour ou déchaumage) ou à des interventions d'été sur sol ferme (là où les dents ne rentrent pas). Finalement, il est fréquent que les agriculteurs aillent rechercher les bons vieux cover-crop.
IL SERAIT INTESSANT DE CONFRONTER NOS EXPERIENCES SUR CE SUJET : état des lieux des marques et équipements intéressants. De mon côté je travaille avec des agriculteurs et la FDCUMA (essais).
- En cas de labour, veiller à éviter les sols creux pour limiter les problématiques limaces, enracinement de la culture, décomposition des matières organiques ("pourritures" notamment), ... Comme indiqué dans votre article, ici aussi un broyage préalable peut être avantageux et également la pratique d'un labour dressé (éviter de plaquer les MO en fond de raie)
- Enfin, et pour aller dans le sens de vos conseils, je préconise également la technique du mulchage dès que les couverts sont trop développés : destruction superficielle puis progressivement plus profonde (en cas de déchaumage) ou destruction superficielle puis labour agronomique (mélangé sur 15-18 cm de profondeur : suppose une charrue qui va bien et bien réglée ...)
Frédéric BERHAUT - Conseiller spécialisé BIO - CA52