Ce mois-ci dans Perspectives Agricoles : les outils du numérique vont-ils révolutionner le désherbage ?
Les capteurs et l’automatisation du matériel devraient faciliter le désherbage des cultures. Pour Benjamin Perriot, responsable du pôle flores adventices chez ARVALIS - Institut du végétal, « leur potentiel est à la hauteur des enjeux, il reste à réunir les conditions favorables à leur mise en œuvre ».
Perspectives Agricoles : Qu’attendre des applications numériques ?
Benjamin Perriot : Le désherbage est devenu une des principales problématiques dans la gestion des itinéraires techniques des grandes cultures. Face aux enjeux agronomiques, économiques et environnementaux, les technologies numériques peuvent contribuer à la réduction de l’utilisation des herbicides et à la préservation des potentiels de rendement des cultures. Citons par exemple l’informatique embarquée et les outils d’aide à la décision, qui agrègent un nombre croissant de facteurs.
Plusieurs voies, vraisemblablement à combiner, se présentent. Il s’agit par exemple d’associer un désherbage mécanique de l’inter-rang et chimique sur le rang. Les assistances au guidage du tracteur et de la bineuse sont particulièrement utiles en cas de dévers et limitent les risques d’erreurs. Ces solutions de désherbage mécanique ne sont plus réservées aux plantes sarclées et se développent en céréales à paille.
P.A. : Quelles technologies semblent les plus abouties ?
B.P. : Le guidage par satellite est déjà opérationnel. La technologie RTK, d’une précision centimétrique, se diffuse progressivement. Le guidage par caméra connaît également des développements techniques qui devraient démocratiser son utilisation en désherbage mécanique. Concernant les applications phytosanitaires, l’enjeu est de parvenir à détecter efficacement les adventices à l’aide de capteurs embarqués sur les outils de travail ou sur des drones. Cette détection peut être instantanée au moment du passage du pulvérisateur, avec ajustement en temps réel des zones d’application, ou décalée en établissant au préalable des cartes de présences des adventices. Associées à des technologies de modulation, comme les coupures de tronçon par GPS ou les porte-buses à sélection automatique, ces cartes ouvrent la voie au développement de la pulvérisation de précision. Allant encore plus loin, des prototypes de robots désherbeurs ont fait leur apparition. Toutefois, leur coût, leur autonomie et le débit de chantier restent des freins importants. De même, il existe des drones capables de réaliser des applications de produits phytosanitaires de manière localisée ; une piste d’étude supplémentaire mais actuellement non autorisée en France par la réglementation sur les traitements aériens.
P.A. : Le développement au champ de ces innovations est-il rapide ?
B.P. : Entre le moment où un prototype est créé, testé pour le rendre opérationnel, présenté dans les salons agricoles, et enfin commercialisé à grande échelle, il se déroule généralement plusieurs années. Actuellement, beaucoup de projets émergent, notamment à l’initiative de start-up qui se concentrent souvent sur une problématique très spécifique. On constate ainsi un décalage entre les souhaits de répondre aux enjeux du désherbage et les applications concrètes sur le terrain.
Pour favoriser les transferts de technologies, il faut rester, dès le départ, au plus proche des pratiques des agriculteurs, intégrer la dimension économique et anticiper autant que possible les évolutions futures, en particulier sur le plan réglementaire. ARVALIS apporte sa pierre à l’édifice notamment avec les Digifermes, des plateformes expérimentales dédiées au numérique, ouvertes à ceux qui souhaitent tester des outils en cours de développement.
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