Nouvelles technologies - Les potentialités et les limites des drones en agriculture
A l’heure où les drones survolent l’espace médiatique, la perspective de les utiliser pour surveiller les parcelles semble prometteuse, mais les difficultés techniques ne doivent pas être sous-estimées. ARVALIS – Institut du végétal décrit les usages possibles de cette jeune technologie en pleine évolution.
Les drones bénéficient actuellement d’un fort écho médiatique et de nombreuses sociétés se créent autour de cette technologie. Certaines se spécialisent ou se diversifient dans l’agriculture. Face à cette offre croissante, ARVALIS – Institut du végétal souhaite évaluer la qualité d’acquisition de ces systèmes aussi bien pour leurs apports à l’expérimentation que pour leur complémentarité avec les méthodes de télédétection actuellement utilisées.
Qu’est-ce qu’un drone ?
Pour rappel, les drones sont des aéronefs capables de voler sans présence humaine à bord. Ils sont équipés d’un système de bord permettant le pilotage et le vol de façon automatique et peuvent embarquer différents capteurs permettant l’acquisition d’images. Il existe deux types de drones : les drones à voilures fixe (ressemblant à des ULM) et les drones à voilures tournantes (avec hélices).
Le vol des drones est soumis à la réglementation aérienne :
- les opérateurs doivent figurer sur une liste établie par la DGAC (Direction générale de l’Aviation Civile) qui mentionne notamment la nature de l’activité, le scénario de mission (S-1 à S-4), le constructeur et le modèle d’aéronef utilisé ;
- les télépilotes doivent posséder une certification officielle (formation théorique) et une DNC (Déclaration de Niveau de Compétence) ;
- les autorisations de vol passent par le dépôt préalable auprès des Préfectures.
Les scénarios permettent de distinguer 4 cas d’utilisation :
- S-1 : opération en vue directe du télépilote se déroulant hors zone peuplée, à une distance horizontale maximale de 100 mètres du télépilote → altitude de vol < 150 m ;
- S-2 : opération se déroulant hors vue directe, hors zone peuplée, dans un volume de dimension horizontale maximale de rayon d'un kilomètre → altitude de vol < 50 m ;
- S-3 : opération se déroulant en agglomération ou à proximité de personnes ou d’animaux, en vue directe et à une distance horizontale maximale de 100 m du télépilote → altitude de vol < 150 m ;
- S-4 : activité particulière (relevés, photographies, observations et surveillances aériennes) hors vue directe, hors zone peuplée et ne répondant pas aux critères du scénario S-2 → altitude de vol < 150 m.
Les appareils sont également répartis dans plusieurs catégories :
- C : aéronefs captifs ;
- D : moins de 2 kg ;
- E : entre 2 et 25 kg ;
- F : plus de 25 kg et moins de 150 kg ;
- G : plus de 150 kg.
Image 1 : Drone de type multicopter autopiloté pouvant emporter une charge utile d'environ 2 kg
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Les utilisations potentielles
En agriculture, les drones pourraient être utilisés dans trois situations, chacune faisant appel à un type d’appareil différent :
► Achat par un agriculteur ou groupe d’agriculteurs pour suivre le développement des cultures, identifier des problèmes de levée, de croissance, d’adventices, de maladies, de dégâts de gibier… Dans ce cas, un drone léger à voilure fixe, type E ou D, en scénario S-1 ou S-3, est bien adapté : léger, robuste, économique, avec une bonne autonomie. Les capteurs doivent être très légers et assez simples. Ces systèmes légers doivent être économiques pour connaître une plus large diffusion.
► Prestation par une coopérative ou un opérateur économique à plus grande échelle : dans ce cas, des drones « longue portée », avec une utilisation type S-4, semblent plus adaptés pour couvrir des surfaces importantes sur un territoire. Les capteurs sont à définir suivant les conseils à délivrer.
► Utilisation pour les expérimentations en petites parcelles, la recherche, la sélection variétale : les drones type multicoptères sont probablement les mieux adaptés car ils ont une charge utile plus importante (autour de 1 kg) et peuvent faire du vol stationnaire. On peut ainsi emporter des capteurs plus performants. Par contre, leur autonomie est limitée à 20 min environ, ce qui est suffisant pour cartographier une plateforme expérimentale de quelques hectares.
Les projets en cours
Une série d’acquisitions sur la plateforme expérimentale ARVALIS de Châlons-en-Champagne a déjà été réalisée avec la société Airinov (drone léger à voilure fixe) en 2013 (10 dates, 976 micro-parcelles). L’objectif est de comparer les données obtenues par drone à celles obtenues à l’aide de systèmes embarqués sur des portiques tractés.
Dans le cadre de projets de recherche (par exemple le projet Phénome, engagé dans le cadre des « investissements d’avenir »), des tests de multicoptères équipés de caméras multispectrales (mesure de la réflectance du couvert dans un très grand nombre de longueurs d’onde) seront réalisés en 2014 à Avignon, en partenariat avec l’INRA.
L’objectif de ces démarches est d’appréhender le potentiel et les limites de l’ensemble du système : les drones en tant que « vecteurs » capables de survoler les parcelles, les capteurs en tant qu’outils de mesure et le traitement et l’interprétation des données en informations utilisables en agriculture.
Des limites à lever
Un des principaux avantages des drones est leur souplesse d’utilisation : à condition de disposer des autorisations nécessaires, la seule contrainte climatique majeure est le vent. Ils ont la possibilité également d’embarquer plusieurs capteurs, dont certains possèdent une très forte résolution, pouvant aller jusqu’au centimètre. En revanche, du fait de leur limite d’altitude de vol fixée à 150 m, la largeur de la surface acquise (« fauchée ») ne dépasse pas les quelques centaines de mètres, avec un recouvrement des images pouvant aller jusqu’à 80 %. A titre de comparaison, la fauchée d’une image acquise par satellite est de l’ordre de quelques centaines de kilomètres.
Tableau 1 : Avantages/limites de la technologie drones
Avantages | Inconvénients |
• Souplesse d’intervention • Vol sous la couverture nuageuse • Forte résolution • Possibilité d’embarquer plusieurs types de capteurs |
• Sensibles au vent • Faible surface d’acquisition du fait de la faible altitude de vol (inférieure à 150 m) • Vols soumis à la réglementation aérienne • Fort recouvrement des acquisitions (jusqu’à 80 %) • Les images nécessitent un traitement post-acquisition (complexité pour un groupe d’agriculteurs ou une petite coopérative, délai de récupération du conseil) |
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