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Normandie

Céréales : des semis raisonnés et de qualité pour la bonne réussite de la culture

La campagne céréales 2023/2024 nous aura réservé autant de surprises que de difficultés, mais gardons-nous de croire que la prochaine sera semblable ! Il y a toutefois un lot de conséquences à prendre en compte : problématiques de désherbage, sanitaire, structure du sol… Il est donc crucial de s’accorder un temps pour bien réfléchir à la situation de ses parcelles et ainsi, démarrer avec précaution la campagne à venir.

Semis de blé tendre en Normandie

Respecter les créneaux de semis des variétés

Le choix variétal est un levier essentiel pour la productivité, la qualité, mais aussi pour la lutte contre les maladies et les ravageurs. Ces qualités variétales sont valables à condition de respecter les créneaux de semis préconisés pour chaque variété (tableau 1).

On évitera l’implantation d’une variété tardive après fin octobre, au risque d’augmenter le risque de stress lié aux aléas climatiques, voire de pénaliser la montée à épi. A l’inverse, une variété précoce n’est pas adaptée à un semis en octobre : elle doit être réservée à des créneaux positionnés à partir de début novembre, afin de ne pas la pénaliser avec une pression maladies accrue, ou une montaison trop précoce exposée à des périodes à risque de gel important.

Tableau 1 : Précocité à épiaison et à montaison des variétés de blé tendre
Retrouvez le détail des préconisations pour les implantations d’automne dans le guide régional Choisir & Décider 2024/2025 – Variétés et interventions d’automne :
- en blé tendre,
- en orges d’hiver.

Gestion de la pression adventices : activer les leviers agronomiques avant les semis

La pression graminées importante en 2023-2024, avec des échecs de désherbage fréquents (météo capricieuse limitant les créneaux d’intervention, efficacité pas toujours optimale, levées tardives…), conduit à un risque important d’enherbement pour la campagne à venir. Afin de limiter cette pression, certains leviers agronomiques sont encore actionnables avant les semis.

En cas de forte infestation : un labour occasionnel est un levier particulièrement efficace

En particulier après un échec de désherbage, envisager un labour occasionnel permettra d’enfouir les graines produites pour empêcher leur émerger les années suivantes, le TAD (Taux Annuel de Décroissance) des ray-grass et vulpins étant relativement élevé. Ce levier est très efficace, à condition d’attendre au moins 4 ans avant un prochain labour, afin d’éviter de remonter des graines encore viables en surface.

Pour les parcelles à forte pression graminées : retarder le semis de 10 à 15 jours

  1. Ne pas commencer trop tôt (avant le 10-15 octobre), au risque de s’exposer à de très gros risques de salissement, même pour les parcelles plutôt propres (de plus en plus rares sur certains secteurs).
  2. Finir tard (après le 5-10 novembre) pour les parcelles les plus sales : les semis tardifs sont un levier puissant contre les graminées d’automne ! Pour ces parcelles très infestées, un semis précoce conduirait inévitablement à une impasse de désherbage, et donc une pénalisation du rendement

En effet, les essais ARVALIS montrent une très bonne efficacité du levier date de semis pour la gestion des graminées.

Figure 1 : Evolution de la population de ray-grass en fonction de la date de semis du blé – Mespuits (91) - 2016 - 2017 - 2018
Figure 1 : Evolution de la population de ray-grass en fonction de la date de semis du blé – Metpuits (91) - 2016 - 2017 - 2018

La règle de d’or : semer sur sol propre !

Le jour du semis, on ne doit observer aucun repiquage suite au passage de semoir. Cela suppose d’avoir correctement nettoyé la parcelle avant de semer. Les levées tardives doivent impérativement être détruites avant le semis, soit chimiquement, soit par le travail du sol : enfouies par un labour avant semis, ou par déchaumage mais dans ce cas, viser au moins trois semaines avant semis pour éviter les repiquages.

Miser sur une application d’herbicides en prélevée

Réaliser un désherbage de prélevée le plus proche du semis. Cette intervention pourra être complétée par un passage en postlevée précoce, en fonction des conditions climatiques de l’automne.

Maîtriser les ravageurs et maladies

Les semis précoces sont plus exposés aux ravageurs d’automne…

Un semis trop précoce entraîne un risque accru vis-à-vis des ravageurs d’automne, augmentant notamment l’exposition aux pucerons et cicadelles, vecteurs des virus de la JNO (jaunisse nanisante de l’orge) et de la maladie des pieds chétifs. Pour rappel, une variété tolérante à la JNO ne permet pas d’anticiper la date de semis.

…Et aux maladies racinaires et foliaires

Une date de semis décalée permet également un meilleur contrôle des maladies racinaires (piétin-verse, piétin échaudage), ainsi que des maladies foliaires. Une variété semée plus tardivement présente une intensité de septoriose diminuée de 10 à 20 % par rapport à une variété semée précocement.

Des conditions climatiques favorables aux limaces, mais l’observation reste la clé de décision

En lien avec la pluviométrie importante tout au long de la campagne, la gestion des limaces s’invite dans la réflexion pour les semis prochains. La seule solution pour une décision éclairée est l’observation, et un suivi régulier des populations par la pose de pièges.

Les limaces pondent et se réfugient dans les reliefs du sol : les sols motteux sont donc plus sensibles à voir des populations importantes de ce ravageur. Les repousses et certains couverts végétaux peuvent être des sources de nourriture pour les limaces. Ils maintiennent aussi une humidité du sol favorable à leur développement.

La destruction des repousses par déchaumage – suite aux faux-semis réalisés récemment par exemple – permettra de limiter la nourriture et le refuge des limaces.

Si un traitement avant semis est nécessaire – à réserver aux situations à risque fort -, il est recommandé de réaliser une application de granulés anti-limaces au moins une dizaine de jours avant le semis. Ce délai permet de profiter de toute l’efficacité du produit avant qu’il ne soit incorporé dans la terre. Dans tous les cas, il faut continuer à surveiller le ravageur après semis et continuer à raisonner les interventions.

Evaluer la qualité germinative des semences

Pour les semences de ferme, compte tenu de la pression maladies et des aléas climatiques de la récolte 2024, il faut faire preuve de vigilance et vérifier la faculté germinative (FG). Celle-ci peut être altérée par plusieurs paramètres, comme la présence de fusarioses (responsables de la fonte des semis). Même si la maladie ne s’est pas distinguée visuellement sur les parcelles de blé, il est possible que les lots des futures semences contiennent des grains fusariés. La conservation des semences trop humides (> 15 % d’humidité) ou encore une casse de grains trop importante lors de la récolte peuvent également nuire à la faculté germinative. Connaître cet indicateur permet de déterminer si le lot de semences est utilisable, et le cas échéant, évaluer avec précision la densité de grains à semer par m². Si la FG est inférieure à 80 %, le lot n’est pas utilisable pour faire des semences et il faut prévoir obligatoirement des semences certifiées.

formule
A retenir
• Ne pas se précipiter dans les dates de semis : semer trop tôt (avant le 10-15 octobre), c’est s’exposer à de très gros risques de salissement, mais aussi de pression maladies (virales et fongiques). A l’inverse, pour gérer les parcelles les plus sales, retarder la date de semis (après le 5-10 novembre) est un levier puissant !
• Semer les variétés dans leur créneau de semis, aussi bien pour des risques d’accidents climatiques que de développement des maladies.
• Semer sur sol propre !
• Vérifier la qualité des semences sur le plan de la faculté germinative, notamment et sanitaire (ergot) : attention aux reports de semences de l’année dernière et semences de ferme.

Et en amont des semis :
• Vérifier la structure du sol : une intervention corrective pourra être nécessaire en cas de tassement sévère, même sur culture moins sensible au tassement comme les céréales d’hiver sur sols sensibles (hydromorphes)
• Une météo favorable aux limaces : la surveillance est de mise pour raisonner une intervention.
• Le labour : un levier efficace pour maîtriser un échec de désherbage.

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