Blé tendre d’hiver : évaluer le risque fusarioses et assurer la protection des semis tardifs
Avec l’étalement des dates de semis et l’excès d’eau qui a affecté le développement des cultures, les stades restent toujours très hétérogènes et échelonnés : les semis d’octobre arrivent à floraison tandis que ceux de fin novembre approchent de dernière feuille étalée. Ces écarts compliquent la gestion de la protection des parcelles. Les dernières interventions fongicides sont à calibrer en fonction de chaque situation.
Des conditions climatiques particulièrement favorables au développement des maladies
La campagne 2023-2024 se caractérise comme la plus humide et la plus douce de ces vingt dernières années. Les conditions climatiques sont donc particulièrement favorables à l’apparition et au développement rapide des maladies, foliaires ou de l’épi !
Cartes 1 et 2 : Ecarts à la médiane 20 ans de cumul de pluie (en mm) et de températures (en °C) entre le 1er septembre 2023 et le 27 avril 2024 (source : Météo France, ARVALIS)
Les cumuls de pluies et de températures sont largement excédentaires, à l’échelle de la région, en comparaison à la médiane de ces vingt dernières années.
Semis d’octobre : surveiller la fusariose des épis
Evaluer le niveau de risque dans les parcelles
Le risque de contamination s’évalue d’abord a priori, en prenant en considération le précédent, le travail du sol et la sensibilité variétale (Figure 1).
Mais il est très fortement lié aux cumuls de précipitations autour de la floraison. La période perturbée actuelle est donc particulièrement sensible pour les semis d’octobre qui arrivent à ce stade. La décision d’intervenir spécifiquement sur cette maladie se prend au regard des cumuls de pluie tombés entre 7 jours avant et 7 jours après la floraison de la céréale (en cumulant la pluie déjà tombée et les prévisions météo).
Figure 1 : Grille d’évaluation du risque d’accumulation de DON (déoxynyvalénol) dans le grain de blé tendre et d’aide au traitement contre la fusariose sur épi (Fusarium graminearum)
Légende : recommandations associées à chaque niveau de risque :
1 et 2 : le risque fusariose est minimum et présage d’une bonne qualité sanitaire du grain vis-à-vis de la teneur en DON. Pas de traitement spécifique vis-à-vis des fusarioses quelles que soient les conditions climatiques.
3 : le risque peut être encore minimisé en choisissant une variété moins sensible. Traiter spécifiquement vis-à-vis des fusarioses en cas de climat humide (cumul de pluie > 40 mm pendant la période entourant la floraison).
4 et 5 : il est préférable d’implanter une variété moins sensible ou de réaliser un labour pour revenir à un niveau de risque inférieur. A défaut, effectuer un broyage le plus fin possible et une incorporation des résidus rapidement après la récolte. Pour ces deux niveaux de risque, envisager un traitement spécifique vis-à-vis des fusarioses, sauf si le climat est très sec pendant la période de floraison (cumul de pluie < 10 mm pendant les +/- 7 jours entourant la floraison).
6 et 7 : modifier le système de culture pour revenir à un niveau de risque inférieur. Labourer ou réaliser un broyage le plus fin possible des résidus de culture avec une incorporation rapidement après la récolte sont les solutions techniques les plus efficaces et qui doivent être considérées avant toute autre solution. Choisir une variété peu sensible à la fusariose. Traiter systématiquement avec un traitement * anti-fusarium efficace.
* Traitements efficaces contre F. graminearum et F. culmorum : principalement produits à base de prothioconazole, tébuconazole ou metconazole, utilisés début floraison à une dose suffisante (60 à 80 % de la dose homologuée minimum, selon le produit utilisé). Noter que parmi les solutions efficaces contre les Fusarium spp., il existe des différences marquées d’efficacité sur Microdochium spp. Une nuance qui peut s’avérer importante certaines années.
Figure 4 : Sensibilité des variétés au DON (fusarium graminearum) – échelle 2023-2024
Le stade d’intervention est essentiel
Le premier facteur d’efficacité du traitement est son positionnement : il faut être le plus proche possible du début de la floraison de la céréale (stade correspondant à la sortie des toutes premières étamines).
Par ailleurs, nos essais ont mis en évidence que le volume de pulvérisation est plus important que le choix des buses ou le recours à d’éventuels adjuvants. Aussi, il est recommandé d’intervenir avec un volume d’eau minimal de 150 l/ha.
Parmi les substances actives les plus efficaces, le prothioconazole est la seule à disposer d’une polyvalence sur les principales espèces du complexe des fusarioses. D’autres spécialités à base de tébuconazole ou de metconazole permettent également de lutter efficacement contre F. graminearum, mais présentent un intérêt limité sur les espèces du genre Microdochium.
Il faut néanmoins rappeler que les meilleures protections fongicides ne dépassent pas, en moyenne, les 50 % d’efficacité. Il est donc primordial d’agir en amont, sur l’ensemble des leviers à notre disposition (choix variétal et travail du sol notamment), ne serait-ce que pour contrecarrer l’effet du climat, non maîtrisable et difficilement prévisible.
Semis tardifs : veiller à assurer une protection efficace contre la septoriose
Dernière feuille étalée : stade clé pour la protection foliaire des céréales
Les semis tardifs oscillent actuellement entre les stades dernière feuilles pointante et dernière feuille étalée. Si des impasses de T1 ont été possibles pour de nombreuses parcelles semées tard, il faut désormais ; compte tenu de la très forte pression septoriose observée cette année, jouer la carte de la sécurité en protégeant efficacement les blés !
Les blés tendres d’hiver semés à partir de la fin novembre arrivent actuellement au stade dernière feuille étalée : stade clé de la protection des céréales ! Compte tenu de la pression septoriose, il convient d’assurer une protection suffisante y compris pour ces semis tardifs.
Recommandations pour la protection des derniers semis de blé tendre contre la septoriose
La plupart des spécialités fongicides actuellement homologuées contre la septoriose agissent davantage en préventif qu’en curatif. Il est donc nécessaire de positionner les interventions au stade dernière feuille étalée afin d’assurer une protection de l’ensemble des feuilles.
Compte tenu de la pression maladies observée cette année, il est nécessaire de choisir une spécialité et/ou une association performante (privilégier notamment les mélanges à base de SDHI), et de ne pas réduire les doses préconisées (notamment dans le cas des variétés sensibles).
Enfin, il faut veiller à alterner les matières actives et familles chimiques autant que possible si un T1 a déjà été réalisé, ou si une intervention spécifique pour la fusariose est prévue.
Message rédigé par ARVALIS en concertation avec Agrial, CAPL, CAVAC, la Chambre d’Agriculture des Pays de la Loire, Eureden, la coopérative d’Herbauges, les établissements Hautbois, Soufflet Agriculture
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