Ce mois-ci dans Perspectives Agricoles : comment s’adapter à des ressources en eau limitées ?
Avec une recharge hivernale historiquement faible cette année dans plusieurs régions, la campagne d’irrigation s’annonce délicate. Thibaud Deschamps, ingénieur régional Poitou-Charentes chez ARVALIS – Institut du végétal, rappelle les solutions à mettre en œuvre pour valoriser au mieux les apports d’eau.
Perspectives Agricoles : Quel raisonnement tenir face au risque d’une irrigation insuffisante ?
Thibaud Deschamps : Une campagne d’irrigation se prépare dès la récolte du précédent en préservant au mieux la structure du sol et en adaptant les pratiques culturales. Un sol tassé réduit les capacités de rétention de l’eau et est préjudiciable à l’enracinement des plantes en profondeur. Il faut également éviter les situations favorisant le ruissellement en surface. Si un risque de manque d’eau d’irrigation est anticipé, la première action à étudier est d’ajuster l’assolement avec des cultures nécessitant moins d’apports d’eau. En cours de campagne d’irrigation, se pose ensuite la question de gérer un volume d’eau limitant. Rappelons que l’irrigation améliore et régularise les rendements et apporte donc une meilleure sécurisation du revenu.
P.A. : Comment assurer une efficacité maximale de l’irrigation ?
T.D. : Un des principes à respecter est d’irriguer lorsque les apports sont les mieux valorisés par les plantes. En cas de déficit hydrique, l’irrigation sur maïs sera valorisée à partir du stade « 10 feuilles » et jusqu’au stade « humidité des grains 45 % ». En blé, les apports d’eau seront valorisés dans la période comprise entre le stade « 2 nœuds » et 15 à 25 jours après l’épiaison, selon la nature du sol.
L’utilisation d’outils de pilotage et d’aide à la décision, reposant notamment sur le bilan hydrique ou des sondes, permet également d’ajuster au mieux les apports. En maïs, ces outils donnent la possibilité de se passer d’un à deux tours d’eau sur une campagne d’irrigation. De même, au moment du choix variétal, avancer d’un groupe de précocité en maïs peut économiser un tour d’eau mais réduit le rendement de l’ordre de sept quintaux en moyenne.
Les semis précoces participent aussi à l’adaptation au risque de restriction d’accès à la ressource en eau intervenant souvent en fin de cycle. Par ailleurs, un réglage adéquat du matériel et un contrôle régulier éviteront les pertes et les surdosages.
P.A. : En ressources limitantes, quelle stratégie d’irrigation adopter ?
T.D. : Si le volume d’eau d’irrigation nécessaire pour assurer un développement normal de la culture n’est pas disponible, le choix habituel est de réduire la surface cultivée. Néanmoins, cela n’est pas toujours possible selon les contraintes de la rotation ou encore selon les débouchés accessibles. Certains producteurs irriguent donc avec un volume potentiellement insuffisant. ARVALIS a ainsi travaillé à la mise au point d’une conduite de l’irrigation visant à améliorer la productivité des apports dans ce type de situation. Parmi les conduites évaluées, centrer les apports autour de la floraison du maïs en adaptant leur dose et leur fréquence afin de couvrir la période de plus grande sensibilité au stress hydrique s’est montrée plus performante. Le niveau de rendement atteint avec cette conduite reste inférieur à celui obtenu en volume non limitant. En revanche, pour un volume limitant équivalent, elle présente un gain de rendement jusqu’à 20 % par rapport à une conduite non optimisée. ARVALIS poursuit ses travaux pour intégrer ce type de conduite dans les outils de pilotage.
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