Stockage des grains - Ventiler par temps humide, c’est possible
En automne, la pluie et le brouillard sont fréquents. Bien souvent, la ventilation de refroidissement des grains est arrêtée, les opérateurs pensant que le climat humide va réhumidifier les grains. Cependant, il est préférable de profiter des températures basses pour poursuivre la ventilation de refroidissement, même en période d’hygrométrie élevée.
Pour garantir le maintien de la qualité des grains, il est nécessaire de les refroidir le plus rapidement possible pour bloquer les cycles de reproduction des insectes ravageurs, voire de les tuer.
Pour cela, il faut mettre en place une stratégie de ventilation de refroidissement en trois paliers, dès la récolte, pour abaisser la température des grains aux alentours de 5°C en début d’hiver.
Il s’agit bien d’une course contre la montre pour empêcher la prolifération des insectes. Or parfois certains stockeurs ont des scrupules à ventiler lorsque l’hygrométrie est forte, de peur de ré-humidifier le grain stocké.
Un équilibre d’humidité grain/air
Lors de l’injection de l’air pendant les phases de ventilation, deux phénomènes se produisent simultanément : le grain cède des calories à l’air lorsqu’il se refroidit et des échanges hydriques se produisent . L’équilibre hydrique entre les grains et l’air au moment où le grain se refroidit est déterminé par les courbes de sorption entre l’air et le grain (figure 1). A noter que chaque espèce possède sa propre courbe d’équilibre.
Figure 1 : Courbe d’équilibre d’humidité grain/air pour le blé
Jusqu’à une humidité relative de l’air de 80 %, la ventilation ne pose pas de problème : la teneur en eau du grain correspondante sera inférieure ou égale à 15 %.
En revanche, pour une hygrométrie supérieure à 80 %, la teneur en eau du grain à l’équilibre risque d’être supérieure à 15 %.
L’échauffement de l’air ventilé fait baisser son humidité relative
L’air qui pénètre dans les tas ne possède pas les mêmes caractéristiques que l’air ambiant. Lors du passage dans le ventilateur, l’air ambiant est mis sous pression ce qui génère un échauffement. Or l’humidité relative de l’air est le rapport entre la quantité de vapeur d’eau présente dans l’air et la capacité de saturation de l’air en vapeur. Plus l’air est chaud, plus il peut contenir de l’eau sous forme de vapeur. L’échauffement lié à la montée en pression fait donc mécaniquement baisser l’humidité relative de l’air qui pénètre dans le grain.
Généralement, l’échauffement de l’air dans les stockages fermiers est de l’ordre de 1 voire 2°C. En cas de forte hygrométrie, un tel réchauffement est à peine suffisant pour faire baisser l’hygrométrie sous les 80 %. Les valeurs se situent plutôt aux alentours de 85 %. Le point d’équilibre se trouve alors vers 16 % de teneur en eau, il provoque une légère ré-humidification en pied de stockage.
Des risques plus importants en arrêtant la ventilation
Faut-il accepter une légère reprise en eau localisée plutôt que de laisser le grain chaud ? Décaler la réalisation des paliers notamment en automne, donne l’occasion aux populations d’insectes de se reproduire. L’effet sera désastreux au printemps ou on assistera à une explosion du nombre d’individus.
Par ailleurs, décaler la date de ventilation et attendre les premiers froids plus secs entraînera des risques de condensation sur les parois. En effet l’air réchauffé par le grain atteindra sa température de point de rosée au contact des parois froides : l’eau se condensera et sera responsable de phénomènes de croûtage et de développement de moisissures. Ces dernières seront potentiellement génératrices de mycotoxines de stockage telles que l’ochratoxine.
Face à ces conséquences, l’option de ventiler par temps humide est celle qui générera le moins de nuisances.
Cas d’un refroidissement avec des colonnes de ventilation
Une bonne partie des colonnes de ventilations fonctionnent en dépression. L’air est aspiré par le ventilateur situé en haut de la colonne, il passe alors directement de l’extérieur dans le grain et n’est pas soumis au réchauffage dans le ventilateur. Même dans ce cas de figure, l’évaluation du ratio bénéfices/risques reste en faveur du refroidissement rapide. Il faudra rester vigilant sur les phénomènes de ré-humidification sur le haut du tas qui seront plus marqués et risquerons de former une couche compacte. Dans ce cas, elle devra être décompactée pour ne pas former une barrière empêchant l’air de refroidissement de circuler dans le grain.
Surveiller la réalisation des paliers à l’aide d’un thermostat
Afin de minimiser les risques, il est impératif de déclencher la mise en route et l’arrêt du ventilateur par un thermostat et de suivre l’évolution des températures du grain sur la partie supérieure du tas. Le thermostat sera le garant du déclenchement de la ventilation au bon moment lorsque l’air est froid, la surveillance du refroidissement permettra d’arrêter la ventilation dès la réalisation du palier et de ne pas faire de « sur-ventilation ».
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