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Qualité du maïs fourrage : comment interpréter son bulletin d’analyses

L’analyse de la composition chimique d’un maïs fourrage est essentielle afin d’ajuster les rations des ruminants au plus proche de leurs besoins énergétique et protéique, tout en limitant le gaspillage azoté notamment. Par ailleurs, le bulletin d’analyse reflète les conditions de culture (conduite agronomique, météo, stade de récolte etc.), le rendant utile pour comprendre l’impact des pratiques culturales. Déchiffrage d'un bulletin d'analyse.

Maïs fourrage : comment interpréter un bulletin d'analyse

La qualité des fourrages lue dans le proche infra-rouge

L’analyse des fourrages est réalisée selon différentes méthodes. Mais en pratique, l’essentiel est réalisé par infra-rouge, avec un spectromètre fixe ou portatif, une méthode moins couteuse (environ 30 € en laboratoire) et plus rapide que la chimie.    

L’analyse de laboratoire permet de mesurer la teneur des différents composants chimiques : fibres (NDF, ADF, ADL, cellulose brute), amidon, sucres solubles, matière grasse, minéraux ainsi que la digestibilité enzymatique. Ces paramètres permettent ensuite de calculer la valeur alimentaire du maïs fourrage (UF, PDI, UE) à partir d’équations basées sur les mesures in vivo.

Quand prélever l’échantillon : le jour de la récolte ou après fermentation ?

Le prélèvement de l’échantillon à analyser peut se faire à la récolte ou après fermentation. Il est en effet possible de prédire la valeur alimentaire de l’ensilage à partir d’un échantillon « vert » ou « fermenté ». Un prélèvement d’échantillon à la récolte aura l’avantage de disposer d’une analyse de fourrage avant l’ouverture du silo, pour anticiper le calage de la ration. L’échantillonnage sera aussi plus représentatif du silo en prélevant les bennes régulièrement au cours du chantier. Néanmoins, en cas de conservation atypique (pertes de jus pour un ensilage humide, acidification lente pour un ensilage très sec), l’analyse du maïs fermenté (3 semaines minimum) sera plus pertinente.

Rappelons que pour réaliser un bon échantillonnage, il faut :

  • Prélever l’ensilage sur toute la surface du front d’attaque du silo ou régulièrement au cours du chantier de récolte, puis mélanger dans une caisse, pour confectionner un échantillon d’au moins 500 g brut ;
  • Stabiliser rapidement l’échantillon (congélateur, étuve) ;
  • Compléter la fiche de renseignements fournie par le laboratoire, avec a minima les informations suivantes : état du maïs (« vert » = avant conservation, ou fermenté), la proportion de maïs (en cas de mélange avec un haricot ou autre plante compagne).  

Les clés d’interprétation des différents indicateurs

Nul besoin d’être chimiste ou nutritionniste pour interpréter une analyse de fourrage. Les principaux facteurs influençant la qualité du maïs sont dans l’ordre : les conditions de culture, le stade de récolte et la variété. Le tableau 1 propose un référentiel moyen pour chaque paramètre d’intérêt à partir de 47646 analyses de maïs ensilage réalisées entre 2020 et 2023, ainsi que des pistes d’interprétation.

Tableau 1 : Valeurs repères et interprétations d’un bulletin d’analyse de maïs ensilage
Composition chimique du maïs fourrage (exprimées en % de la matière sèche sauf pour le CSPS)
tab

32-33 % de MS : le compromis entre rendement, qualité de conservation et valeur alimentaire

Première donnée généralement mesurée : la teneur en matière sèche (% MS). La fourchette 30-35 % de MS plante entière correspond à l’objectif pour bien conserver et bien valoriser son maïs fourrage.

Une récolte trop précoce est peu avantageuse : pertes de rendement au champ et par écoulement de jus au silo (sucres, azote), teneur en acides gras volatils élevée, mauvaise ingestion. A l’inverse, un maïs récolté trop tard présente aussi des inconvénients : difficulté de tassement (porosité élevée), acidification retardée et pertes au désilage, dégradabilité de l’amidon et digestibilité des fibres diminuées (baisse de l’efficacité alimentaire), risque augmenté de mycotoxines. Au-delà de 35-36 % MS, les gains potentiels (pas systématiques) de rendement et de teneur en amidon ne compensent généralement pas les défauts de qualité.

Le taux de matières minérales (ou cendres) est à surveiller, surtout s’il est élevé (> 6 % MS). Si c’est le cas, il s’agit probablement d’une contamination de terre (boue, poussières) lors de la récolte, induisant un risque de prolifération des bactéries butyriques et la dilution de la valeur alimentaire du maïs. Les maïs récoltés très humides présentent aussi une teneur en matières minérales élevée.

L’énergie est apportée par l’amidon et les fibres digestibles

L’amidon est la forme ultime de stockage des glucides dans le grain. Les conditions climatiques de la floraison à la fin de cycle ont un impact majeur sur la teneur en grains. En conditions favorables, la mise en place d’un nombre élevé de grains et leur bon remplissage permet d’atteindre une teneur en amidon supérieure à 35 % MS, d’autant plus si le stade de récolte est tardif. A l’inverse, en cas de stress hydrique important autour de la floraison, la production de grains peut être fortement réduite voire nulle, d’autant plus en cas de mauvais enracinement ou de semis tardifs. A noter que la dégradabilité de l’amidon dans le rumen baisse avec l’avancée en maturité (-1 point par point de MS en plus), mais elle est favorisée par le bon éclatement du grain et la durée de fermentation.

Constituants directement issus de la photosynthèse, les sucres solubles sont nécessaires au processus de fermentation du fourrage. Leur teneur diminue avec la maturité du maïs. A la récolte « en vert », la teneur en sucres solubles doit être au moins égale à 5-6 % de la MS afin de fournir suffisamment de substrat aux micro-organismes responsables de l’acidification. Des teneurs élevées (> 10 % sur le maïs fermenté) sont parfois observées en cas de stress hydrique fort, stoppant la migration des sucres vers le grain.

La digestibilité de l’appareil végétatif se dégrade avec l’avancée en maturité de la plante. Entre 33 et 38 % MS, la digestibilité du NDF (dNDF) baisse de 4 points, ce qui équivaut à une perte d’environ 0,4 litre de lait par vache et par jour pour une ration composée de 45 % de maïs fourrage.

La valeur énergétique moyenne du maïs fourrage se situe autour de 0,91 UFL/kg MS (0,95 UFL2018). Les deux composantes majeures de l’énergie du maïs fourrage sont la teneur en amidon et la digestibilité de la partie « tige + feuilles ». Ainsi, pour une même valeur énergétique, les maïs peuvent présenter des profils très différents, généralement appelés « fibre », « mixte » ou « amidon ». Ceci implique une complémentation adaptée de la ration.

L’effet de la variété sur la valeur énergétique et ses composantes est significatif : il explique 10 à 15 % de la valeur UFL. Le classement des variétés sur ces critères est disponible dans l’outil VarMaïs.

Une teneur en protéines corrélée au rendement

La teneur en matières azotées totales (MAT) est déficitaire par rapport aux besoins des ruminants. Elle est peu variable et très corrélée au rendement de la culture, par effet de concentration ou dilution. Une sous-fertilisation (notamment dans les zones à haut potentiel de rendement), des conditions estivales peu favorables à la minéralisation de l’azote du sol ou un mauvais enracinement peuvent pénaliser l’absorption de l’azote par la plante et également expliquer des teneurs en MAT faibles. A même potentiel de rendement, une variabilité de l’ordre de 0,5 à 1 point est observée entre les variétés.

Une mesure de laboratoire pour évaluer l’éclatement des grains

Les calculs de valeur alimentaire ne prennent pas encore en compte tous les paramètres. Par exemple, l’éclatement du grain et la taille des particules n’entrent pas dans les équations de prévision des valeurs nutritives. Une méthode permet cependant d’estimer le niveau d’éclatement du grain du maïs : la méthode du CSPS (Corn Silage Processing Score), accessible dans plusieurs laboratoires français depuis 2018. Un CSPS inférieur à 50 indique un éclatement insuffisant, alors qu’un niveau supérieur à 70 est considéré élevé. Il conviendra de minimiser les valeurs UFL et PDI(E) d’un maïs présentant un CSPS faible, d’autant plus que ce maïs sera distribué aux animaux après une durée de conservation courte.

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