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Champagne-Ardenne

Ne pas anticiper les semis de céréales

La campagne céréales 2023/2024 s’est révélée très pluvieuse, dès mi-octobre – et ce, jusqu’aux moissons –. Ces conditions ont eu des impacts sur la conduite des implantations : 4 % des surfaces champenoises n’ont pu être emblavées. Un niveau toutefois bien inférieur à la moyenne nationale – 12 % – en raison des bonnes capacités de ressuyage en sols de craie et des parcelles déjà semées avant les pluies en Barrois. Comme dit l’adage, les années se suivent mais ne se ressemblent pas : pour cette nouvelle campagne, il ne semble pas urgent de sortir les semoirs.

Semis de blé en Champagne-Ardenne

Combiner plusieurs solutions pour gérer les vulpins-ray-grass, et surtout, ne pas semer tôt sur les parcelles sales !

Certaines parcelles ont été particulièrement sales l’an passé : peu de créneaux pour désherber à l’automne, une gamme d’herbicides qui se réduit en céréales et des résistances, des pratiques récurrentes qui favorisent la levée des graminées (semis précoces, cultures d’automne, travail du sol simplifié) et une météo idéale pour le développement des adventices (douceur et humidité régulière).

Sur ces parcelles, une stratégie reposant uniquement sur l'utilisation d'herbicides est vouée à l’échec, même en cas de double passage à l’automne. Ce n’est pas une nouveauté malheureusement, vous l’observez au printemps lorsque les graminées dépassent des céréales.

Il faut absolument combiner plusieurs solutions agronomiques. Plus on en mettra en œuvre, plus il y aura de chances de réussite. En effet, les leviers agronomiques n’assurent pas du 100 % à chaque fois, car ces pratiques sont plus dépendantes du climat.

Dans notre boîte à outils, pour réussir le désherbage :
- Faux-semis superficiels (quelques centimètres) associés à un décalage de la date de semis de 20 jours, pour permettre aux graminées de lever et de les détruire.
- Labour, 1 année sur 3-4.
- Alternance de cultures de printemps et d’automne.
- Diversification des modes d’action herbicides en intégrant différentes cultures dans la rotation.

En Champagne, les semis tardifs ont finalement donné de bons résultats

Pour la campagne 2023/2024, les semis tardifs ont donné des rendements équivalents, voire supérieurs à ceux de début octobre. C’est le cas environ deux années sur dix ; les raisons peuvent être liées à une pression bioagresseurs mieux maîtrisée (adventices, JNO, maladies) ou à un évitement d’un stress climatique, comme en 2016 avec les pluies début juin à floraison des semis précoces. Au printemps 2024, la pression septoriose était extrême sur certaines variétés en semis précoce, alors que c’était beaucoup mieux maîtrisé pour ceux de semis de novembre.

Une synthèse (figure 1) présente les écarts de rendement entre différentes dates de semis par rapport à un semis de début octobre.

  • Avec un décalage de 15-20 jours (semis au 20-25 octobre) : les pertes de rendement sont quasiment négligeables (en moyenne -3 %, allant de -10 % à +7 % par rapport au semis de début octobre), d’autant plus que les hivers doux actuels permettent de rattraper ce retard au départ.
  • Avec une implantation réalisée en novembre : sur la première quinzaine, la perte de rendement est en moyenne de 8 % (-25 % à +7 %). Sur la seconde quinzaine, elle atteint en moyenne 15 % (-25 % à +11 %). Ces pertes sont généralement élevées en précédent betteraves lorsque les printemps suivants sont secs.
Figure 1 : Synthèse d’essais ARVALIS en Champagne-Ardenne à différentes dates de semis - Rendements en % de la date de semis précoce
Figure 1 : Synthèse d’essais ARVALIS en Champagne-Ardenne à différentes dates de semis - Rendements en % de la date de semis précoce

Pour faire face à des aléas climatiques plus fréquents, il faut diversifier ! Donc pas tout début octobre !

Une des particularités du changement climatique, et sûrement la plus préjudiciable dans notre zone, est la fréquence plus importante d’évènements extrêmes… imprévisibles par nature. Excès de pluies, sécheresse, froid tardif, chaleur, faible rayonnement…

Pour répartir les risques, il faut diversifier les cultures, variétés et dates de semis, afin que les parcelles ne soient pas toutes au même stade en cas de stress ponctuels. Sur certains terroirs de la région, les précédents betterave, luzerne, oléo-protéagineux offrent la possibilité d’implanter les céréales à différents créneaux de semis. Pas tout début octobre, pas tout en semis tardif non plus ! Dans les autres zones, il faudra jouer sur différentes précocités variétales et dates de semis.

Demain : il faudra sûrement revoir les densités de semis

Avec la récurrence des automnes-hiver doux, les biomasses en sortie hiver sont souvent trop denses pour les semis début octobre. Cela provoque un trop grand nombre de tiges à épi 1 cm qui vont consommer de l’eau, de l’azote, du rayonnement. En cas de facteurs limitants, les pertes de rendement sont plus importantes pour ces situations ; et de fortes régressions de tiges sont observées courant montaison (pas plus d’épis au final), parfois des problèmes de fertilités et remplissage des grains.

Sans oublier que ces excès de végétations sont favorables à la verse et aux maladies.

En 2023/2024, une réduction de 20 % de la densité de semis (230 grains/m²) n’engendrait pas de pertes par rapport au standard de 300 grains/m², et permettait même de gagner 3 % de rendement. Une sur-densité en semis précoce (+100 grains par m²) entraînait une perte de 8 q/ha.

Il faudra sûrement revoir nos préconisations de densités de semis pour les semis début octobre : des travaux d’ARVALIS sont en cours dans la région sur ce sujet.

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