Semis 2020 - Les performances des variétés de blé tendre conduites en agriculture biologique
Deux inscriptions en 2012, trois en 2019 et une en 2020 : le flux des variétés inscrites en France après une évaluation en agriculture biologique s’accélère. Ces variétés sont testées dans le réseau de criblage(*) au côté de variétés repérées pour leur profil pouvant présenter un intérêt en bio, issues du catalogue européen ou du catalogue conventionnel français. Le point sur les performances agronomiques et technologiques de 16 variétés récemment introduites dans ce réseau.
Sans être l’unique critère d’achat, la teneur en protéines des blés bio reste une attente forte des utilisateurs. Le classement variétal sur la teneur en protéines étant négativement corrélé à la productivité, le rendement en azote exporté dans le grain (QN grains) est un bon indicateur de l’efficacité d’une variété à valoriser l’azote disponible en optimisant rendement et protéines. Quelques variétés se distinguent par une teneur en protéines un peu plus élevée que celle attendue compte-tenu de leur rendement (figures 1 à 3).
En agriculture biologique, la compétitivité vis-à-vis des adventices est aussi un critère très apprécié. Quant à la résistance aux maladies foliaires, elle est attendue, voire incontournable lorsqu’il s’agit de rouille jaune. Comme les deux-tiers de la collecte de blé bio sont destinés à la meunerie, une bonne aptitude à la panification est également attendue par les acheteurs.
Figure 1 : Teneur en protéines exprimée en fonction du rendement des variétés cultivées en zone Nord - Moyennes ajustées calculées sur les essais conduits en agriculture biologique sur la période 2003-2019
Les courbes en pointillées représentent les quantités d’azote exportées dans les grains.
En zone Nord, Alessio, Arminius, Graziaro, Lennox, Posmeda et Chevignon présentent une teneur en protéines élevée pour leur rendement.
Figure 2 : Teneur en protéines exprimée en fonction du rendement des variétés cultivées en zone intermédiaire/Centre - Moyennes ajustées calculées sur les essais conduits en agriculture biologique sur la période 2003-2019
Les courbes en pointillées représentent les quantités d’azote exportées dans les grains.
En zones intermédiaires, Izalco, Hendrix, Geny, RGT Venezio, Attlass, Orloge et Rubisko présentent une teneur en protéines élevée pour leur rendement.
Figure 3 : Teneur en protéines exprimée en fonction du rendement des variétés cultivées en zone Sud - Moyennes ajustées calculées sur les essais conduits en agriculture biologique sur la période 2003-2019
Les courbes en pointillées représentent les quantités d’azote exportées dans les grains.
En zone Sud, Centurion, Rubisko, Orloge et Filon présentent une teneur en protéines élevée pour leur rendement.
• Les variétés « protéines »
• Les bons compromis entre rendement et protéines
• Les variétés productives
• Caractéristiques des variétés de blé tendre présentes dans les essais 2019 en agriculture biologique
Les variétés « protéines »
Les variétés à teneurs en protéines élevées ont des potentiels de rendement plus faibles de 5 à 10 % que les variétés de compromis. Togano est devenue la référence de ce créneau ; elle succède à Saturnus, dont la résistance a été contournée par la rouille jaune.
Très précoce à épiaison, Izalco CS présente un très bon niveau de protéines (Renan + 8 %), tout en maintenant un niveau de rendement équivalent à ce dernier. De même taille que Renan, il a un pouvoir couvrant assez faible, d’où une concurrence vis-à-vis des adventices sans doute assez faible. Il est, en revanche, très résistant à la rouille jaune, et son poids spécifique est très élevé. Izalco CS révèle une très grosse force boulangère (W) avec un bon rapport ténacité/extensibilité (P/L) à l’alvéographe. À l’essai de panification, la pâte lisse bien sans collant, elle est équilibrée à courte au façonnage, un peu élastique. Les coups de lame peuvent être parfois insuffisants mais les volumes sont d’un excellent niveau.
Très précoce à épiaison, Forcali se positionne sur le créneau protéines, avec 5 % de rendement en moins par rapport à Renan, mais 5 % de protéines en plus. Nettement plus court que Renan, son pouvoir couvrant est également très inférieur. Il est assez résistant à la rouille jaune. Son PS est très élevé. Forcali a un profil alvéographique intéressant, avec un W proche de 200 à 11 % et un rapport P/L très équilibré. Au test de panification, cette variété présente un très beau profil de pâte, un peu court au façonnage. Le produit fini se caractérise par un bel aspect de pain et de bons volumes.
Les bons compromis entre rendement et protéines
Parmi les variétés de blé tendre les plus cultivées en agriculture biologique, Renan, figure historique de ce mode de culture, et Energo sont les références sur ce créneau.
Demi-tardif à épiaison, Alessio est un peu plus productif que Renan, avec des teneurs en protéines supérieures de 3 % à ce dernier. Il est, de plus, très résistant à la rouille jaune. Il fait 10 cm de plus que Renan mais semble nettement moins couvrant. Son PS est très élevé. Alessio présente un bon W avec un P/L un peu élevé. C’est un blé fort, caractérisé par un léger retard de lissage et par une absence de collant au pétrissage. La pâte est courte et élastique au façonnage. Le produit fini manque parfois de développement en lien avec l'excès de force, mais il présente des volumes supérieurs à Renan.
Blé tardif à épiaison inscrit en Autriche en 2017, Edelmann apporte en zone Nord un gain de rendement de 9 % par rapport à Renan en ne perdant que 0,3 point de protéines. Probablement pénalisé par sa tardiveté, son équilibre protéines-rendement est un peu moins favorable en zone Centre. Avec quelques symptômes observés en 2019, sa sensibilité à la rouille jaune doit être surveillée. Il est assez haut sur tige et son PS est très élevé. Edelmann présente un profil technologique proche de Renan dans l’expérimentation conduite sur les récoltes 2018 et 2019, tant d’un point de vue de la rhéologie des pâtes appréciée à l’alvéographe qu’à l’essai de panification. Ainsi sa force boulangère est équivalente à Renan (autour de 180 à 11 % de protéines), avec un P/L équilibré. À l’essai de panification, la pâte hydrate faiblement. La variété a un profil équilibré à court au façonnage. Les pains présentent un très bel aspect avec des volumes élevés. La mie est crème à jaune. Le résultat global est d’un très bon niveau.
Blé demi-tardif, Graziaro apporte entre 5 et 10 % de rendement par rapport à Renan, tout en maintenant une teneur en protéines proche de celui-ci en moyenne depuis trois ans. Très haut sur paille (Renan + 30 cm), il présente un meilleur pouvoir couvrant que Renan au stade « épi 1 cm » et équivalent dès « 2 nœuds », mais attention au risque verse. Il est assez résistant à la rouille jaune. Son PS est élevé. Graziaro présente un W seulement correct mais avec un P/L très bien équilibré et régulier. La pâte lisse bien, sans collant au pétrissage ; elle est équilibrée à courte au façonnage. Les coups de lame sont bien développés et les volumes sont bons.
Blé demi-tardif à demi-précoce inscrit en Suisse en 2017, Posmeda affiche une bonne productivité mais une teneur en protéines assez faible (de 0,5 à 1 point de moins par rapport à Renan). Il est moyennement résistant aux rouilles. Un peu plus haut que Renan, son pouvoir couvrant est assez bon. Son PS est élevé. Posmeda présente une bonne force boulangère, située autour de 200 à 11 % de protéines comme Renan. Son P/L est relativement équilibré. En panification, la pâte hydrate moyennement, au niveau de Renan dans l’expérimentation. Au façonnage, les pâtes sont courtes. Les pains donnent des volumes moyens équivalents à Renan. La valeur boulangère est du niveau de Renan sur les deux années d’essai. La mie est crème à jaune.
Blé demi-tardif à épiaison inscrit en 2015 en Allemagne, Royal offre quasiment le même compromis rendement-protéines que Renan. Assez haut sur tige, son pouvoir couvrant se situe à un niveau intermédiaire entre celui de Renan et celui d’Attlass. Il est moyennement résistant à la rouille jaune. Son PS est très élevé. Royal présente un bon W avec un P/L qui s'équilibre à partir de 11 % de protéines. Dans le pétrin, on note un léger retard de lissage sans collant. La pâte est courte et élastique au façonnage, elle tient bien à la mise au four. Le coup de lame est parfois insuffisant en lien avec l'excès de force mais les volumes sont très élevés.
Les variétés productives
Elles présentent des potentiels de rendement 10 à 15 % plus élevés que ceux des variétés de compromis. Leurs teneurs en protéines sont, en revanche, régulièrement inférieures à 10,5 %, en particulier dans les milieux à faible disponibilité en azote. Ce défaut de protéines peut être compensé par un bon comportement en panification. Attlass est la référence historique sur ce créneau.
Très précoce à épiaison, Centurion se positionne entre Attlass et Renan en matière de productivité et de teneur en protéines. Il s’est montré assez résistant aux rouilles jaune et brune. Un peu plus court que Renan mais aussi plus précoce à montaison, son pouvoir couvrant semble être dans la moyenne. Son PS est assez bon. Centurion a un W moyen à 11 % de protéines et un P/L relativement élevé. L’hydratation de la pâte est faible au pétrissage. Le profil au façonnage est court. Les pains présentent des volumes faibles mais proches du témoin Renan. La mie est crème à jaune.
Demi-tardif à demi-précoce, et parmi les plus cultivés en agriculture conventionnelle, Chevignon présente en agriculture biologique une excellente productivité (Attlass + 5 à 10 %). Sa teneur en protéine est, en revanche, environ 2 points inférieure à celle de Renan. Il est assez résistant aux rouilles et à la septoriose. Un peu plus court que Renan, son pouvoir couvrant n’est pas très bon. Son PS est corrects. En conséquence de ses faibles taux de protéines, Chevignon présente une force boulangère très faible. Le P/L est toutefois équilibré. En panification, l’hydratation au pétrissage est faible ; la pâte a un profil équilibré à extensible au façonnage. Les pains ont un bel aspect, avec des volumes satisfaisants, équivalents à Renan. La valeur boulangère est globalement très bonne malgré les faibles protéines. La mie est crème à jaune.
Très précoce à épiaison et à montaison, Filon présente une productivité très élevée en AB, en particulier dans le centre et le sud de la France. Il est moyennement résistant à la rouille jaune et assez sensible à la rouille brune. Assez court, son pouvoir couvrant n’est pas très bon. Son PS est correct. Filon présente des teneurs en protéines inférieures de 2 points à Renan sur 2018 et 2019. La force boulangère est faible (environ 130 à 11 % de protéines). Le P/L est relativement équilibré. Les pâtes hydratent peu au pétrissage, mais le profil est équilibré à extensible au façonnage. Les pains présentent des volumes faibles mais proches de Renan. La mie est jaune.
Blé précoce inscrit en 2019 en France par expérimentation spéciale en AB, Geny obtient près de 20 % de rendement de plus que Renan, alors que sa teneur en protéines est seulement environ 1 point plus faible. Il présente un assez bon niveau de résistance à la rouille jaune. Avec une hauteur proche de Renan, son pouvoir couvrant semble assez bon, en particulier en début de montaison. Son PS est assez élevé (1 kg/hl inférieur à Renan). Geny présente un bon profil alvéographique, avec une force boulangère très élevée et un P/L équilibré. La pâte hydrate moyennement au pétrissage et lisse peu mais ne colle pas. Au façonnage, elle manque légèrement d’allongement et est équilibrée en élasticité. Les coups de lame et les volumes sont bons.
Blé demi-alternatif, demi-tardif à demi-précoce à épiaison, Gwenn a franchi avec succès les épreuves d’inscription 2018 et 2019 en AB en France. Très productif, il apporte 15 % de rendement de plus que Renan tandis que sa teneur en protéines est inférieure de 1,5 point. Malgré quelques légers symptômes de rouille brune, il présente un bon niveau de résistance aux maladies foliaires. Un peu plus haut que Renan, son pouvoir couvrant semble correct. Son PS est d’un assez bon niveau. Variété BPS, Gwenn offre un très bon W, autour de 190 à 11,5 % de protéines, avec un P/L relativement équilibré. Son comportement en panification varie en fonction de la teneur en protéines. Au-dessus de 9,5 %, l’hydratation de la pâte au pétrissage est correcte, et la pâte est équilibrée en allongement. Le développement des coups de lame et les volumes sont bons. En dessous de 9,5 % de protéines, des défauts de pâte et de pain pénalisent fortement le résultat final.
Demi-précoce à épiaison, LG Absalon se distingue par son haut niveau de résistance aux maladies. En AB, avec une productivité assez élevée mais des teneurs en protéines assez faibles, il est proche d’Attlass sur l’équilibre rendement-protéines. Assez court, son pouvoir couvrant est moyen. Son PS est bon. LG Absalon a été testé sur les récoltes 2017 et 2018. La variété présente un W correct ; le P/L peut être un peu élevé. La pâte hydrate peu (du niveau de Renan). Au façonnage, le comportement est variable de court à extensible. Les pains ont des volumes satisfaisants et équivalents à Renan. La mie est jaune.
Blé précoce à épiaison reconnu pour sa résistance aux maladies foliaires, LG Armstrong présente, en conduite bio, des rendements élevés et une teneur en protéines assez faible en zones Centre et Sud. Très court, son pouvoir couvrant n’est que moyen. Son PS est élevé. LG Armstrong présente une force boulangère élevée, proche de 200 à 11 % de protéines, légèrement supérieure à Renan. Le P/L est, en revanche, très élevé. Côté fournil, les pâtes ont une forte capacité d’absorption d’eau, 2 points au-dessus de Renan. Le profil au façonnage est équilibré. Les pains ont des volumes assez faibles, environ 100 cc inférieurs à Renan. Le résultat final est d’un assez bon niveau. La mie est crème à jaune.
Très précoce à épiaison, Orloge est productif en agriculture biologique, en particulier en zone Sud, mais sa teneur en protéines est assez faible, proche de celle d’Attlass. En 2019, il s’est montré assez sensible à la rouille jaune et moyennement sensible à la rouille brune. Assez court, son pouvoir couvrant est correct. Son PS est assez faible. Orloge a été testée sur les récoltes 2017, 2018 et 2019. La variété présente un W correct, autour de 150 à 11 % de protéines ; le P/L est relativement équilibré. À l’essai de panification, l’hydratation au pétrissage est faible, 1 point en dessous de Renan. Le profil de la pâte est extensible au façonnage. Les pains ont un bel aspect avec des volumes corrects équivalents à Renan. Le comportement boulanger est globalement d’un bon niveau. La mie est crème.
Blé demi-tardif, Gwastell a une productivité 10 % supérieure à Renan. Il présente d’assez bons niveaux de résistance aux rouilles. Il s’est distingué en 2019 par son très bon pouvoir couvrant dès le stade « début montaison ». Son poids spécifique (PS) est assez bon. Évalué au test biscuitier CTCPA, il confirme des résultats répondant aux attentes des utilisateurs, avec une quasi-absence de rétreint, une densité correcte et un aspect de surface satisfaisant.
Caractéristiques des variétés de blé tendre présentes dans les essais 2019 en agriculture biologique
(*) réseau animé par l’ITAB et ARVALIS, et constitué d’essais réalisés par de nombreux partenaires en France et en Belgique : ABN, Agribio 04, AgriBio Union, Agri-Obtentions, Agrobio 35, ARVALIS, Bio-Agri, la chambre d’Agriculture (CA) du 47, la CA du 86, la CA d’Alsace, COCEBI, CRA PL, CRAW, CREABio, Dijon Céréales, FDGEDA du Cher, FRAB NA, l’Inrae, La Dauphinoise, Lemaire Deffontaines, NORIAP, Océalia, Province Liège, Qualisol, SCARA, SeineYonne, Semences de l'Est, Sèvre et Belle, Terrena, UNICOR, Val de Gascogne et Vivescia.
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