Intervenir dès l’interculture pour gérer l’ambroisie à feuilles d’armoise
En ce début d’été, où l’ambroisie peut s’installer dans les chaumes, la surveillance des parcelles pour repérer sa présence est recommandée. Les intercultures d’été sont des périodes propices à la destruction de cette plante invasive, par voie mécanique ou chimique, avant sa floraison. La lutte en interculture est un complément incontournable de la lutte en culture pour maîtriser l’ambroisie à court et à long terme.
L’ambroisie : une plante pionnière qui craint la concurrence
L’ambroisie est une plante annuelle de la famille des composées (astéracées comme le tournesol). Plusieurs espèces du genre Ambrosia sont présentes sur le territoire, mais la plus connue et la plus répandue est l’ambroisie à feuille d’armoise (Ambrosia artemisiifolia L.). Ses graines germent en avril-mai. Elle fleurit principalement en août-septembre et arrive à maturité en septembre-octobre. Le pollen de l’ambroisie à feuilles d’armoise est très allergisant (rend allergique) et allergène (induit un symptôme d’allergie) : il suffit de 5 grains de pollen par mètre cube d’air pour déclencher des symptômes. La plante est à l’origine d’importantes épidémies d’allergies au moment de sa floraison.
L’ambroisie est une plante pionnière, qui colonise préférentiellement les terrains remaniés : sols nus, lits de rivières, chantiers, bords de routes… Sensible à la concurrence, elle est pratiquement absente des milieux fermés (prairies, forêts…).
Ces différentes caractéristiques font que, en milieu agricole, elle se développe surtout dans les systèmes de cultures annuelles, et plus particulièrement dans les cultures de printemps et les chaumes d'été.
Sa destruction dans ces intercultures d’été vise à diminuer les émissions de pollen dans les secteurs agricoles tout en évitant d’accroître le potentiel semencier.
L’interculture d’été, une période propice
L’interculture d’été est une période très propice au développement de cette adventice. Après la récolte de la céréale à paille, du colza ou du pois protéagineux, l’ambroisie a le champ libre pour se développer. Il n’y a plus de concurrence et elle peut croître, aidée par sa bonne résistance à la sécheresse. Sa croissance est d’autant plus importante et rapide que des pluies surviennent au cours de l’été, associées à des températures chaudes.
Heureusement, l’interculture est également une période idéale pour combattre l’ambroisie en complétant la lutte en culture, qui peut s'avérer parfois insuffisante ; l’objectif primordial étant d’empêcher la pollinisation et la grenaison.
Evaluer le risque sur les parcelles
Les niveaux d’infestations peuvent être très différents d’une parcelle à l’autre. Avant la récolte, les plantes restées jusqu’alors sous le couvert de la culture sont en état de vie ralentie. Avec le passage de la moissonneuse-batteuse, les plantes les plus grandes vont être coupées mais toutes, grandes et petites, vont aussitôt bénéficier d’une mise à la lumière, en l’absence de toute concurrence. Celles qui sont coupées vont produire de nouvelles tiges et toutes vont croître rapidement.
La présence d’ambroisie à la récolte peut avoir plusieurs origines :
- Levée en culture d’hiver dès mars-avril, en absence de contrôle par désherbage, elle reste à l’état latent sous la végétation.
- Un faible peuplement épi, lié à des difficultés d’implantation - zones de mouillères, zones compactées ou un printemps sec - laisse de l’espace à l’ambroisie et permettent sa levée et sa croissance.
- Les passages de roues pour la pulvérisation et l’épandage d’engrais sont fréquemment infestés par les ambroisies, de même que les bordures de champ.
A contrario, un désherbage en culture réussi et une culture dense et homogène conduisent à de faibles risques de présence d’ambroisie.
Si la culture est déjà colonisée par l’ambroisie, une intervention post-récolte est urgente car la pollinisation aura lieu quelques semaines après. Il est prudent de ne pas se fier aux dates calendaires repérées par habitude, la pollinisation pourrait intervenir dès la fin juillet.
En cas de non colonisation par l’ambroisie, l’agriculteur dispose de plus de latitude pour gérer l’interculture.
Le déchaumage pour détruire l’ambroisie et gérer le stock semencier
Le choix du déchaumage seul suppose qu’il n’y ait pas de vivaces sur la parcelle car son action conduirait à les multiplier par bouturage.
Le déchaumage peut remplir deux fonctions :
- Détruire les ambroisies présentes avant qu'elles fleurissent (fin juillet / début août), pour les empêcher d’émettre du pollen et de produire des graines.
- Faire lever les graines d’adventices ou de la culture (pertes à la récolte) pour les détruire par la suite et diminuer ainsi le stock semencier. Cette fonction peut concerner l'ambroisie les étés particulièrement pluvieux (comme en 2007), mais elle est surtout vraie pour d’autres adventices comme les chénopodes, les amarantes, les morelles ou encore les renouées.
Attention, dans la pratique, les déchaumages n’ont pas toujours l’efficacité attendue pour diverses raisons :
- Travail trop profond ne laissant pas les plantes arrachées en surface. Ces ambroisies se repiquent et repartent en végétation s'il pleut par la suite.
- Travail avec des outils non adaptés : écartement trop important entre dents provoquant des "alignements d'ambroisies", passages de roues sur-creusés, non travaillés.
- Travail trop grossier, peu favorable à la levée des adventices.
- Interventions trop tardives sur plantes trop développées difficiles à détruire.
Pour un déchaumage efficace vis-à-vis des ambroisies, il est donc conseillé de :
- Reprendre préalablement les passages de roues de façon spécifique avec un outil à dents.
- Sur le reste de la parcelle, travailler à une profondeur qui permette un bon déracinement (environ 5 cm) et de façon homogène, ce qui peut nécessiter deux passages et des équipements adaptés : dents rigides combinées à des disques de nivellement, socs larges avec ailettes, disques plus serrés à angles d’entrures plus élevés. Veiller au bon arrachage des plantes en les laissant en surface, pour permettre leur dessèchement.
- Faciliter les levées d’adventices en combinant l'outil de déchaumage avec un rouleau pour un meilleur rappuyage.
- Intervenir juste après la récolte afin de profiter de l’humidité résiduelle du sol. En cas de récolte de la paille, intervenir après des pluies, sinon au plus tard avant la floraison de l’ambroisie. Cela peut conduire à plusieurs passages ou une application herbicide.
Une application d’herbicide en dernier recours, indispensable s'il y a des vivaces
En présence de vivaces sur la parcelle, de risque d’érosion en cas de pente, de difficulté de déchaumer sur un sol trop sec, l’intervention herbicide peut être privilégiée.
Il s’agit de détruire les adventices présentes : vivaces, ambroisies et autres adventices annuelles.
En présence de vivaces, seuls les produits systémiques sont efficaces, tels que le glyphosate majoritairement utilisé, herbicide total et non persistant.
Lire aussi : « Sous quelles conditions peut-on encore avoir recours au glyphosate en France ? »
Pour réussir la destruction des vivaces, il est préférable de les laisser redémarrer après la moisson afin d’avoir suffisamment de surface foliaire. Essayer de viser des conditions climatiques favorables (températures inférieures à 25°C et hygrométrie de l’air supérieure à 60 %), même si elles sont rarement réunies en été. Il faudra de toute façon intervenir avant le stade début floraison de l’ambroisie.
Pour lutter contre l’ambroisie, 720 g/ha de matière active glyphosate (soit 2 l/ha de produit dosé à 360 g/l) sont suffisants. Par contre, en présence de vivaces, il faudra adapter la dose à l’espèce la plus difficile à détruire.
Le glyphosate étant sensible à la présence d’ions calcium et magnésium dans la bouillie, il est nécessaire de corriger les eaux dures avec du sulfate d’ammonium. On veillera également à réduire le plus possible le volume hectare (inférieur à 80 l/ha).
En cas de semis d’un couvert végétal en interculture
L’ambroisie est très sensible à la concurrence. Dans les essais de semis de couverts, il n’a pas été constaté de levée, ou très peu, alors que les levées d’autres adventices étaient denses.
Néanmoins, avant le semis du couvert, il est indispensable de détruire les ambroisies présentes par voie mécanique ou herbicide.
Intervention mécanique par déchaumage ou herbicide ?
Pour choisir entre l’une ou l’autre technique ou les deux, les principaux critères sont :
1- Présence ou absence d’ambroisie à la récolte de la culture en début d’été : sa présence nécessite une intervention précoce.
2- Présence de vivaces sur la parcelle : à contrôler par un désherbant systémique.
3- Projet de semis d’un couvert : pour le réussir, il est nécessaire de travailler le sol pour créer un lit de semences et semer sur un sol propre, indemne d’ambroisie.
Ces trois critères une fois croisés aboutissent aux préconisations suivantes :
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