Protection du blé tendre - Gestion des maladies foliaires en bio : un enjeu limité
ARVALIS et la Chambre d’agriculture de Région Ile-de-France ont mis en place des essais depuis le printemps 2020 pour évaluer l’intérêt des solutions proposées aux agriculteurs bio pour contrôler les maladies foliaires du blé tendre. Dans le contexte des deux campagnes d'essais, l’enjeu d’une protection semble très limité.
Les principaux facteurs limitant des céréales à paille bio sont l’azote et la gestion des adventices. A l’exception des rouilles, et notamment de la rouille jaune dans la moitié nord de la France, un agriculteur récemment converti en agriculture biologique pourra s’étonner de ne jamais entendre parler de maladies du blé.
La septoriose, qui était la maladie la plus fréquente et donc la plus nuisible sur ses blés conventionnels, n’est jamais évoquée. Faut-il pour autant ne pas s’intéresser aux produits proposés visant à gérer l’état sanitaire des blés ?
ARVALIS et la Chambre d’agriculture de Région Ile-de-France (CARIDF) se sont associés depuis 2020 pour tenter d’apporter des éléments de réponse.
Figure 1 : Facteurs a priori en faveur ou en défaveur de la protection vis-à-vis des maladies foliaires du blé tendre conduit en AB
Le protocole commun mis en place visait plusieurs objectifs :
- tester des produits proposés aux agriculteurs bio en Île-de-France, dans différentes conditions pédoclimatiques et systèmes de grandes cultures bio de la région ;
- évaluer une intervention positionnée en préventif en lien avec le mode d’action annoncé des produits utilisés. Dans les essais 2021, les interventions sont appliquées en deux passages : le premier à 2 Nœuds puis un second à Dernière Feuille Etalée. En 2020, seul le premier passage avait été réalisé ;
- se donner les chances d’exprimer un effet de la protection fongicide et limiter les effets nutritionnels. Pour cela, les essais ont été positionnés après des précédents légumineuses. Les blés qui suivent les légumineuses sont généralement les blés les moins carencés en azote des rotations. Ils sont donc les meilleurs candidats pour répondre à une protection foliaire.
Pas de différence significative entre modalités en 2021
Différents produits à base de soufre sont aujourd’hui utilisés pour gérer la septoriose des blés conventionnels. Son effet a été démontré ces dernières années. En 2021, quatre produits, dont trois à base de soufre, ont été testés dans trois essais (tableau 1).
Tableau 1 : Solutions de protection foliaire évaluées sur blé tendre bio en 2021
*Ce coût a été estimé en prenant en compte un prix indicatif des produits. Selon les fournisseurs, ce prix peut varier. Le coût de passage n’a pas été intégré.
**Non homologué sur blé
Les interventions ont été positionnées en préventif au printemps 2021, où la septoriose est arrivée tardivement, en lien avec la période sèche de début montaison. Les conditions sont ensuite devenues favorables à son développement.
Des notations maladies ont été exploitées dans 2 essais sur 3 (dans les essais localisés dans le Loiret et l'Essonne). L’efficacité des modalités sur la réduction des symptômes de septoriose est évaluée par rapport au témoin non traité. Sur le regroupement des deux essais, l’analyse statistique ne permet pas de conclure à une différence significative entre les traitements (figure 2). Cependant, les deux modalités avec du soufre et l’association soufre + cuivre se classent en tête, avec respectivement 29 % et 38 % d’efficacité dans ce contexte de faible pression de septoriose (intensité moyenne de symptômes de 11 % sur les témoins non traités).
Figure 2 : Efficacité (en % du regroupement des essais) d'une protection foliaire sur la réduction des symptômes de septoriose sur blé tendre bio (synthèse de 2 essais 2021 – ARVALIS/CARIDF)
Différences non significatives, p=0,48 ; ETR = 15,92
Pris individuellement, les essais ne présentent pas non plus de différences de rendement significatives (tableau 2). Lorsque l’on fait la synthèse des essais, l’analyse des rendements bruts, comme des rendements nets (rendement brut déduit du coût du produit) ne montre aucune différence significative (figure 3).
En conclusion, dans le contexte des essais 2021, aucune valorisation des produits testés n’a été mise en évidence sur le rendement. Pour rappel, dans les essais 2020, l’enjeu d'une protection foliaire était limité.
Tableau 2 : Impact sur le rendement (en q/ha), essai par essai, d’une protection foliaire sur blé tendre bio (3 essais 2021 ARVALIS/CARIDF)
Figure 3 : Impact sur les rendements bruts et nets (en q/ha) d'une protection foliaire sur blé tendre bio (synthèse de 3 essais 2021 – ARVALIS/CARIDF).
Différences non significatives avec pour l’analyse des rendements bruts : p=0,48 ; ETR = 15,92 et pour l’analyse des rendements nets : p = 0,71, ETR = 1,04
Le rendement net (q/ha) est égal au rendement brut mesuré (q/ha) auquel a été déduit le coût du produit exprimé en équivalent quintaux par hectare.
Rendement net (q/ha) = Rendement brut (q/ha) – [coût de la modalité (€/ha) / Prix du quintal (€/q) ]
Le coût des deux passages (2x10 €/ha) n’est pas pris en compte dans ce calcul, soit encore - 0,4 q (avec une hypothèse de prix du blé de 48 €/q)
Rappel des résultats 2020
En 2020, quatre produits avaient été testés dans quatre essais : Vacciplant Grandes Cultures à 1 l/ha, Nectar Céréales à 5 l/ha, Héliosoufre S à 5 l/ha et Pur’Mel à 3,5 l/ha (tableau 3).
Tous ces produits avaient été apportés en une seule application au stade épi 1 cm pour un essai et à 1 nœud pour les trois autres. Les interventions avaient bien été positionnées en préventif au printemps 2020. Ce dernier a été particulièrement défavorable à la septoriose (montaison dans le sec). Aucune notation maladies n’avait pu être réalisée. Seul l’impact sur le rendement avait fait l’objet d’analyses.
Pris individuellement, les essais, qui étaient précis, ne présentaient pas de différences de rendement significatives (tableau 4).
En faisant la synthèse des 4 essais, l’analyse des rendements bruts avait mis en évidence des différences significatives entre modalités : la meilleure protection affichait un gain de rendement brut de 1,8 q/ha (figure 4). Mais, en analysant les rendements nets (rendements bruts déduits du coût du produit), les différences étaient devenues non significatives (figure 5).
En conclusion, dans le contexte 2020, l’enjeu d'une protection foliaire était limité.
Tableau 3 : Solutions de protection foliaire évaluées en traitement précoce dans les essais 2020
*Ce coût a été estimé en prenant en compte un prix indicatif des produits. Selon les fournisseurs, ce prix peut varier. Le coût de passage n’a pas été intégré.
Tableau 4 : Résultats (en q/ha), essai par essai, d’une Protection foliaire précoce sur blé tendre bio (4 essais 2020 ARVALIS/CARIDF)
Figure 4 : Rendements bruts d’une protection foliaire précoce sur blé tendre bio (synthèse de 4 essais 2020 ARVALIS/CARIDF)
Figure 5 : Rendements nets d’une protection foliaire précoce sur blé tendre bio (synthèse de 4 essais 2020 ARVALIS/CARIDF)
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