Désherbage des céréales : à raisonner selon les dates de semis de ses parcelles
Les conditions climatiques actuelles sont à nouveau propices au désherbage des céréales, sur des sols ressuyés. Pour réussir ses stratégies de sortie d’hiver, il faut prendre en compte la date de semis de sa parcelle, ainsi que l’historique de désherbage à l’automne et le niveau de salissement. Dans de rares cas où il y a impasse, le retournement de la culture pourrait être envisagé. Passage en revue des différentes situations possibles.
Les conditions météorologiques de l’automne ont complexifié les chantiers de semis et de désherbage. L’état de salissement des parcelles est variable selon la date de semis, l’efficacité des programmes d’automne, la pression initiale en adventices et l’état de résistances aux modes d’action des herbicides de sortie d’hiver (HRAC 1 et 2).
Parcelles semées en octobre et novembre
La majorité des parcelles de céréales semées en octobre et novembre sont maintenant au stade plein tallage, tout comme les adventices graminées.
Situation A : prélevée ou postlevée en bonnes conditions d’efficacité
Si une prélevée a pu être réalisée ou bien une postlevée avant 1-2 feuilles des adventices, le programme de désherbage d’automne vis-à-vis des graminées doit présenter de bonnes efficacités (hors cas particulier des densités adventices extrêmement élevées mettant en difficulté le programme d’automne en 1 passage, dans ce cas se référer à la situation B).
La pression adventices est normalement bien maîtrisée et le désherbage de sortie d’hiver devrait être orienté selon la flore restante ou émergente (dicotylédones ou graminées) sur la parcelle.
Situation B : désherbage d’automne peu efficaces avec adventices sensibles
Si la parcelle n’a pas pu être désherbée à l’automne ou si la postlevée a été réalisée après 3 feuilles des adventices, l’efficacité de désherbage n’est pas optimale, selon la pression initiale. Il sera nécessaire de réintervenir spécifiquement pour gérer les graminées.
Les cultures de céréales étant au-delà de 3 feuilles, très certainement comme les adventices (hors cas de levées tardives), beaucoup de produits racinaires ne sont plus autorisés après ce stade ou techniquement moins intéressants (plus le stade des adventices avancent moins elles sont sensibles aux produits racinaires). Cela incite à passer vers des solutions foliaires avec les modes d’action HRAC 1 et 2.
Tableau 1 : Quelques exemples de produits foliaires efficaces contre ray-grass non résistants sur blé
Rappel sur les conditions d’intervention
Il est également important d’intervenir précocement dans de bonnes conditions. D’autant plus en situations de fortes infestations sans résistances avérées. Ne pas avoir de gel le jour de l’application et jours suivants, ni de fortes amplitude thermiques (> 15°C). Les conditions poussantes avant et après l’intervention optimisent l’efficacité et réduisent le risque de phytotoxicité.
Cette année, il faudra être vigilant à ces conditions d’intervention, notamment vis-à-vis des risques de phytotoxicité en cas d’application sur des cultures stressées (hydromorphie, problème enracinement…).
Tableau 2 : Effets des conditions d’intervention sur les applications herbicides
Tableau 3 : Adjuvants conseillés selon l’herbicide et effets attendus
Situation C : désherbage d’automne peu efficaces et adventices résistantes
Attention, on confond souvent résistances et mauvaises conditions d’interventions. Bien vérifier l’état de résistances par des tests en laboratoire ou vérifier les conditions d’intervention les années antérieures, pouvant souvent expliquer un manque d’efficacité.
Dans le cas de résistances avérées aux modes d’action de sortie d’hiver (HRAC 1 et 2), si le salissement en graminées est trop important, la situation n’est plus gérable. Dans ce cas, la seule solution est d’arrêter les frais et retourner la parcelle.
Si aucun désherbage n’a pu être fait à l’automne, les frais engagés sont moins importants, ce qui facilite la décision de retournement. De même si, en plus du salissement, le peuplement des céréales n’est pas suffisant ou le potentiel de la culture fortement impactée, cela participe également à prendre la décision de retourner. Cela permettra d’implanter une culture de printemps et limiter l’augmentation du stock semencier, responsable du salissement des parcelles à court et moyen terme.
Dans le cas de salissement faible ou modéré, la décision de retourner ou non est plus difficile à prendre. Cela doit tenir compte de l’état de salissement, l’état de la culture, notamment si son potentiel de rendement est affecté (< 100 pl/m², hydromorphie…) ou non (peuplement > 150-200 pl/m², peu de signe d’hydromorphie…) et les frais déjà engagés à l’automne.
Pour rappel, en cas de resemis, voici les cultures sensibles selon les herbicides utilisés à l’automne.
Parcelles semées tardivement après fin novembre jusqu’au 31 janvier
Ces situations ont pu bénéficier du décalage de dates de semis sur la gestion des adventices. Le labour plus fréquent cette année est également intéressant lorsque celui-ci n’a pas été réalisé depuis deux – trois ans. Néanmoins, si le labour est trop fréquent, cela remonte en surface des graines d’adventices en capacité de germer. Vigilance sur les levées tardives également.
Situation A : stades de cultures avant 3 feuilles non désherbées avec pressions modérées à fortes en graminées
Les parcelles semées en janvier avant le 1er février sont considérées comme des cultures d’hiver d’un point de vue réglementaires sur l’usage des produits phytosanitaires. Ainsi, elles peuvent accéder aux solutions herbicides habituellement conseillées à l’automne (dans le respect des stades et périodes autorisées…).
On peut donc utiliser des produits « racinaires » : prosulfocarbe, chlortoluron (CTU), flufénacet, DFF… Cette stratégie est à réserver aux situations à forte pression en graminées et à éviter sur cultures déjà stressées. On peut aussi moduler les doses avec, par exemple, CTU 2,5 + Compil 0,15, Défi 2,5 + Compil 0,15, ou encore Battle Delta 0,4.
Situation B : cultures au-delà du stade 3 feuilles
Dans ces situations, les produits racinaires ne sont plus réglementairement ou techniquement pertinents. Basculer sur les produits foliaires de sortie d’hiver : base sulfonylurées (+ DFF). Attention aux résistances.
Pour résumer
Les conditions ne sont donc pas toujours optimales pour avoir un programme herbicide à l’automne efficace, ce qui complexifie le désherbage de sortie d’hiver.
Pour les semis avant décembre, avec un désherbage d’automne peu ou pas efficace :
- Pas de résistances avérées aux sulfonylurées et FOP/DEN : intervenir tôt avec des produits foliaires en bonnes conditions pour maîtriser les ray-grass.
- Résistances aux sulfonylurées et FOP/DEN avérées : pas de solution miracle, en cas d’infestations modérées à fortes en graminées, le retournement de la parcelle reste la seule solution.
Pour les semis de décembre et janvier :
- Parcelles avant 3 feuilles : en cas de pression en graminées connue sur la parcelle et visible, l’usage de produits racinaires est permis en adaptant les doses (hors cas de produits non autorisés après le 31 décembre, vérifier les conditions d’usage).
- Après 3 feuilles et pression importante, basculer sur les produits foliaires de sortie d’hiver avec une base sulfonylurées (+ DFF). Attention aux résistances.
Il est important de désherber puis de fertiliser pour maximiser l’efficacité du désherbage.
Réagissez !
Merci de vous connecter pour commenter cet article.