Ravageurs : contrôler les limaces en associant leviers agronomiques et lutte chimique
Pour contrôler les fortes populations de limaces dans les parcelles de céréales, la stratégie de lutte doit être basée sur la mise en œuvre de pratiques culturales adéquates, en complément de l’usage raisonné d’anti-limaces.
Les nouvelles conduites de culture (travail du sol simplifié, semis direct, couverts végétaux en interculture) et des conditions climatiques douces et humides favorisent le développement des limaces. Pour combattre le bio-agresseur, l’utilisation de mesures agronomiques préventives est indispensable.
Le travail du sol profond (labour) présente une bonne efficacité en perturbant l’habitat du ravageur. L’enfouissement des repousses et des couverts végétaux réduit l’humidité en surface et les prive d’une ressource alimentaire. Certains individus peuvent aussi être entraînés au fond et se nourrir alors de la matière végétale en décomposition. Lorsque le travail du sol est réalisé peu de temps avant le semis, ces limaces enfouies ne pourront remonter à temps au niveau des graines et des plantules. Par la modification de la structure du sol, en asséchant et réduisant les mottes et les infractuosités, le labour détruit aussi leurs refuges.
Le déchaumage a un effet similaire. Il sera plus efficace s’il est réalisé dès la moisson lorsque la terre de surface est encore fraîche et contient œufs et jeunes limaces. Sa répétition est d’autant plus importante en cas de travail simplifié remplaçant le labour. Dans les terres à fort potentiel, la quantité de chaumes forme un tapis de plusieurs centimètres, toujours humide et véritable réserve à limaces. Le déchaumage, même répété, n’est alors pas suffisant pour réduire les populations. La meilleure solution serait le ramassage des pailles à défaut d’autorisation de les brûler.
Perturber l’habitat des limaces
Le tassement du sol élimine les mottes et retarde pendant au moins huit jours le déplacement des limaces qui s’y trouvent bloquées. Le roulage reste le seul travail du sol utilisable en semis direct, technique favorisant les limaces par une moindre perturbation du milieu de vie. Cependant, tout manque de levée ne peut être systématiquement attribué aux limaces : de la paille, entraînée à l’ouverture du sillon, peut former un espacement autour de la graine et provoquer son dessèchement. Une préparation fine du lit de semence et un bon enfouissement de la semence mettent ces dernières hors de portée du parasite.
Les limaces grises ou noires ne peuvent pas creuser dans le sol. Seules les graines visibles en surface, ou situées au milieu de mottes hébergeant des individus, peuvent être consommées. Une diversification de la rotation est aussi recommandée en évitant le retour trop fréquent de colza, plante la plus appétante pour les limaces. En interculture, un couvert peu attractif comme la moutarde est préférable.
Des modalités de piégeage à respecter
Le piégeage est utile pour définir la densité de population active, la période et donc le nombre d’applications de granulés anti-limaces. Un piège standardisé de 0,50 m de côté est utilisé. Il est conseillé de placer au moins quatre pièges couvrant au total 1 m², éloignés de quelques mètres, pour pallier autant que possible à l’hétérogénéité de l’infestation. Il doit être réalisé avant le semis en période humide. Il est inutile de piéger en période sèche, même en arrosant la terre et le piège.
Après les avoir humidifiés à saturation, les pièges sont à poser (face aluminium du piège visible) le soir pour éviter tout risque de dessèchement au cours de la journée. Ne pas arroser le sol au moment de la pose, ni placer de granulés anti-limaces sous le piège, pour ne pas altérer la mesure. Ils sont ensuite à relever le lendemain matin avant l’ensoleillement. Le piégeage est à renouveler autant de fois que nécessaire. À défaut de pouvoir le réaliser, les Bulletins de Santé du Végétal de certaines régions donnent une indication sur le risque climatique, en s’appuyant sur le modèle limace de l’ACTA.
L’anti-limaces doit être appétent
Au niveau des anti-limaces, il ne reste plus que deux substances actives commercialisées : le métaldéhyde avec près de 20 spécialités différentes ainsi que le phosphate ferrique, avec SLUXX ou BABOXX et une nouvelle spécialité Ironmax Pro récemment mise sur le marché pour la prochaine campagne, autorisé en agriculture biologique. Noter que Limatak B n’est plus commercialisé, mais peut encore être utilisé jusqu'au 30 novembre 2016.
Figure 1 : Molluscicides disponibles pour les semis 2016
Ces dernières années, les spécialités à base de métaldéhyde ont gagné en qualité : tenue à la pluie, absence de poussière, anti-moisissures, régularité de taille, appétence pour les limaces. Ce paramètre est un des critères clés. En céréales à paille, il faut protéger 300 graines/m² avec des granulés, dont le nombre varie de 25 à 65 granulés/m² en fonction des spécialités et des doses d’application. La limace a encore cinq fois plus de chance de rencontrer une graine ou plantule avec 65 granulés/m². La période de sensibilité d’une céréale aux limaces se situe entre la germination de la graine et le stade trois feuilles. En cas de risque élevé (20 limaces/m²), un traitement préventif est recommandé. Il sera appliqué avant le semis et/ou entre le semis et la levée, puis à la levée si nécessaire. En cas de faibles populations, une application au moment des premières attaques sur plantules peut être suffisante (figure 2). Au-delà du stade 3 feuilles, il n’est plus utile de traiter car la céréale compense par son tallage.
Figure 2 : Essai de consommation, en cages (1 m²) et en extérieur, par la limace grise de plantules de blé. Mesures réalisées au stade 3 feuilles après avoir introduit des limaces grises au stade 1 feuille.
Source : ARVALIS – Institut du végétal, essai Boigneville (91), 2013.
Même à 50 limaces/m², les conséquences sur les plantes restent limitées.
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