Céréales : ne pas démarrer trop tôt son programme fongicide
Voici quelques clés de raisonnement sur le positionnement du T1 en céréales. A prendre en compte : la sensibilité de la variété, le climat, la présence de symptômes…
Depuis plusieurs campagnes, le traitement fongicide au stade 2 nœuds ou avant l’étalement de la dernière feuille (aussi appelé T1) ne fait plus recette. Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène : séquences climatiques peu favorables aux maladies, efficacité des solutions utilisées en T2 (stade dernière feuille), progression de la tolérance des variétés à la septoriose.
En moyenne, le poids du T1 est de 1,8 q/ha brut, et n’est rentable que dans 27 % des situations, hors arrivée précoce des rouilles (synthèse de 378 essais de 2013 à 2021). Le coût estimé du T1 est d’environ 3 q/ha.
Impasse du T1 ou pas ?
L’impasse du T1 est préconisée pour les variétés peu sensibles à la septoriose (note septoriose ≥ 6,5), sauf arrivée précoce de la rouille. Dans le Sud-Ouest, selon une enquête menée par ARVALIS en 2021, un quart des variétés cultivées le sont et ne nécessitent pas de T1 (traitement avant étalement de la dernière feuille). Citons, par exemple, Agenor, Izalco CS, LG Armstrong, Prestance, Rgt Cesario, Rgt Letsgo.
Pour les autres variétés, il est essentiel de s’adapter aux conditions de l’année et de suivre l’évolution des maladies (BSV, observation des symptômes ou outils d’aide à la décision), en particulier pour les 16 % de variétés cultivées les plus sensibles (ex : Oregrain, Sy Moisson, Tiepolo). S’appuyer sur les seuils de déclenchement au stade 2 nœuds (figure 1).
Figure 1 : Seuils de déclenchement du traitement de début montaison (T1) pour la septoriose
En cas de rouille jaune, un traitement peut être déclenché dès le stade épi 1 cm en présence de foyers actifs, ou dès les premières pustules à partir de 1 nœud pour les variétés sensibles à moyennement sensibles.
Actuellement, le risque est septoriose est faible. Les symptômes sont situés sur les feuilles basses et le climat n’est pas favorable à son évolution. D’autres facteurs agronomiques sont à prendre en compte : date et densité de semis, travail du sol et rotation, fertilisation azotée (figure 2), qui peuvent avoir un impact sur le niveau d’inoculum de la maladie et sa dispersion.
Figure 2 : Leviers agronomiques pour gérer le risque septoriose
Quid des mélanges de variétés ?
Les mélanges de variétés permettraient de ralentir le contournement des résistances variétales par les pathogènes, d’améliorer le contrôle des maladies par des effets mécaniques. Une plus grande résilience pourrait aussi s’exprimer sous l’effet de stress abiotiques et biotiques plus aléatoires. La nuisibilité des maladies serait ainsi plus contrôlée en cas de forte diminution de la protection phytosanitaire. Une thèse conjointe INRAE/ARVALIS a montré que la culture de mélanges permettrait 7 % d’économie de produits phytosanitaires pour lutter contre la septoriose, en comparaison de la moyenne des quatre variétés du mélange. Ce gain reste néanmoins inférieur à celui obtenu avec la variété la plus résistante.
Si un traitement précoce est nécessaire : quelles solutions choisir ?
Si un traitement précoce est nécessaire, l’utilisation de produits de biocontrôle est privilégiée comme le soufre ou le phosphanate de potassium. Ces derniers peuvent être associés entre eux ou avec une base triazole.
En cas de présence de rouilles, la base triazole est indispensable et peut être renforcée avec une strobilurine.
En présence de piétin-verse ou d’oïdium, des produits spécifiques doivent être envisagés. Cependant, le traitement du piétin-verse par l’utilisation de fongicide est peu efficace. En cas de risque agronomique élevé (précédent blé, sol limoneux battants), il est indispensable de choisir une variété tolérante, seule solution efficace. Concernant le traitement de l’oïdium, l’agronomie est primordiale : densité de semis et fertilisation azotée sont à raisonner en priorité.
Figure 3 : Performances des solutions fongicides contre la septoriose du blé – 15 essais (2017 à 2020) – à droite : niveau d’efficacité – à gauche : rendements
Et pour les orges d’hiver ?
Vérifier l’état des parcelles au stade 1 nœud et si l’état sanitaire est satisfaisant, un seul traitement est à envisager au stade « sortie des barbes ». C’est le cas le plus courant dans notre région. Une stratégie à deux traitements est envisageable pour les variétés très sensibles aux maladies, en cas de présence précoce, notamment d’oïdium, de rhynchosporiose, de rouille naine…
Utiliser le baromètre maladies
Le Baromètre Maladies permet de calculer un risque associé aux principales maladies du blé tendre rencontrées dans la région. Basé sur des informations agronomiques et climatologiques, il calcule instantanément un niveau de risque sur 7 jours, centré sur le jour de la simulation, pour cinq maladies : le piétin-verse, la septoriose, la rouille jaune, la rouille brune et la fusariose des épis. Calculés grâce à des modèles agro-climatiques, les risques indiquent le développement probable de chaque maladie et sont affichés en trois catégories sur la période la plus pertinente pour raisonner vos interventions.
Associés à votre expertise, les résultats fournis par le Baromètre Maladies vous aident dans le raisonnement des interventions sur vos parcelles.
Figure 4 : Simulation du baromètre maladies pour la variété Oregrain semée le 25 octobre 2021, station météo d’Agen
Zoom sur les prévisions de stades
Les stades sont proches des normales avec une légère avance constatée pour les blés les plus précoces (semis d’octobre à début novembre).
Tableau 1 : Prévisions de stades du blé tendre et de l’orge d’hiver - Exemple de la station de Bergerac (données réelles jusqu’au 20 mars 2022 puis données fréquentielles)
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