Blés conduits en bio : surveiller la présence de carie
La carie peut représenter un problème de taille en agriculture biologique, faute de traitement totalement efficace sur les semences. Retour sur le cycle de ce champignon et les précautions à prendre au moment du semis et de la récolte.
La carie commune du blé (Tilletia caries ou Tilletia foetida) est une maladie fongique fréquente qui touche essentiellement le blé tendre. Mais d’autres espèces s’avèrent sensibles telles que le blé dur et l’épeautre.
Si la contamination des plantes a lieu avant le stade 2 feuilles, la maladie ne s’observe que tardivement, au moment de la maturité des épis. Les grains cariés sont remplis de spores de coloration noire ayant pris la place de l’amidon. A la récolte, l’enveloppe du grain éclate et les spores se disséminent. Un nuage noir au battage est caractéristique de blés fortement cariés. Un grain carié contient en effet des millions de spores. Ces dernières dégagent une odeur nauséabonde de « poisson pourri » caractéristique, mais non systématique.
Les grains, impropres à la consommation animale ou humaine, sont déclassés et doivent être détruits.
Les spores libérées viennent contaminer les grains des épis sains et le sol qui a supporté cette récolte cariée. « 30 à 40 spores suffisent pour contaminer expérimentalement un grain sain » (R. Champion, GEVES-INRA). Elles peuvent être aussi disséminées par le vent sur plusieurs centaines de mètres, polluant les champs voisins. Autre origine possible de contamination : les moissonneuses-batteuses, en passant d’une parcelle infectée à une parcelle saine.
Schéma 1 : Cycle de la carie commune
Pour en savoir plus sur le cycle du champignon, consultez la fiche Carie commune - Maladie sur Blé tendre, blé dur, triticale
Gérer une parcelle cariée et les parcelles environnantes
A la récolte, en cas de présence avérée ou de suspicion de carie, ces parcelles doivent être récoltées en dernier. Si ce n’est pas le cas, tous les blés récoltés ensuite seront susceptibles d’être contaminés.
Purger la moissonneuse avec une culture non affectée par ce champignon. Un nettoyage minutieux est indispensable. Comment bien nettoyer sa moissonneuse-batteuse - YouTube
Si la contamination est élevée, un brûlage de la parcelle est souhaitable, avec une autorisation préfectorale.
La transmission par la semence est la voie dominante de la contamination. Mais celle par le sol représente la situation la plus grave car ce champignon peut se conserver pendant de nombreuses années. Et ce, d’autant plus qu’il n’existe pas de méthode de diagnostic au niveau de la parcelle permettant de déceler la présence de cette maladie avant le semis.
Les parcelles de blé, blé dur et épeautre situées dans un rayon de 500 mètres sont à surveiller. Par principe de précaution, les grains ne seront pas utilisés pour réaliser de la semence de ferme. Aussi, il est nécessaire de prévenir les agriculteurs voisins de la parcelle cariée.
La parcelle cariée devra faire l’objet d’un labour (destruction des repousses + enfouissement des spores indispensables). Retarder le labour favorise l’épuisement du stock de spores tombées au sol (une fois enfouies dans le sol, elles peuvent par contre résister des années).
Idéalement, un travail superficiel sera à réaliser les années suivantes. Il conviendra de ne pas implanter de cultures sensibles au moins les cinq années suivantes. Côté céréales, l’avoine et l’orge sont résistantes, alors que le seigle y est très peu sensible. Le triticale n’a jamais été détecté sensible à la carie dans les essais menés en France, mais des cas ont été rapportés en Europe, certainement en présence de races de carie spécifiques.
Un nettoyage minutieux du matériel ayant travaillé dans la parcelle contaminée sera réalisé.
Prévenir un problème de carie lors de la prochaine récolte
Sur les parcelles indemnes de carie, le meilleur levier préventif est d’utiliser des semences saines. Si l’achat de semences certifiées garantit un bon état sanitaire des grains, il est indispensable de s’en assurer par des analyses en cas d’utilisation de semences de ferme bio (environ 80 € par échantillon).
Il est recommandé de ne pas aller au-delà d’une contamination initiale de 50 spores par grain (soit environ 1000 spores par gramme), détectable uniquement par analyse (recommandations du programme européen Liveseed, 2019).
L’utilisation de traitements de semences autorisés en bio permet d’apporter une protection supplémentaire. Le vinaigre, substance de base autorisée à 1 l/q à 10 % acide acétique maximum (à diluer dans de l’eau (1/1 l), et le traitement de semences Copseed (sulfate de cuivre tribasique) affichent une bonne efficacité même si elle n’est pas totale.
Attention, un surdosage de vinaigre peut être phytotoxique
Cette désinfection des semences ne pourra cependant pas lutter contre les spores de carie présentes dans le sol.
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