Prairies temporaires ou permanentes : deux approches très différentes pour les apports PK
Le phosphore (P) et le potassium (K) sont des éléments majeurs pour la croissance des plantes. Ils contribuent respectivement au développement racinaire et à la croissance foliaire. Ils influencent donc la productivité et la pérennité des prairies. Comment piloter au mieux ces éléments afin d’optimiser les apports en fonction des besoins de vos prairies

En prairie temporaire, privilégier l’analyse de terre et la méthode Comifer
Pour les prairies temporaires de moins de 3 ans qui s’intègrent dans une rotation, les apports de P et K se raisonnent en appliquant la méthode de calcul préconisée par le Comifer sur cultures annuelles à partir d’une analyse de sol.
Outre cette analyse qui fournit les informations sur les teneurs en P2O5 et en K2O échangeable dans le sol, trois autres critères entrent en ligne de compte : l’exigence de la culture, le passé récent de fertilisation et la gestion des résidus de récolte des précédents (exportés en cas de prairie).
Ne pas confondre l’exigence avec l’exportation d’une culture en P et K. Une culture peu exigeante en phosphore (ou potasse) peut exporter beaucoup de phosphore (ou de potasse), et inversement. Par exemple, un foin de luzerne va exporter 6,3 kg P2O5/t MS et 26,2 kg K2O/t MS alors que la luzerne est très exigeante vis-à-vis du phosphore et moyennement exigeante vis-à-vis de la potasse.
Globalement, les espèces prairiales sont moyennement exigeantes en P et K. Il faut néanmoins être vigilant sur le niveau d’exportation en P et K à l’échelle d’une rotation fourragère pour ne pas pénaliser une autre culture.
Une fois l’ensemble des quatre critères connu, un tableau à triple entrée - disponible dans la brochure du Comifer - permet de déterminer un coefficient multiplicateur des exportations afin de calculer la dose à appliquer (tableaux 1 et 2).

(Source : Comifer 2019)

(Source : Comifer 2019)
Pour positionner la teneur effective du sol concerné dans le tableau, il faut se référer aux valeurs des teneurs-seuils Timpasse et Trenforcé par classe d’exigence de la culture. Ces teneurs-seuils, définies régionalement et par type de sol, sont disponibles via la brochure du Comifer consultable gratuitement en ligne.
Sur prairie permanente, réaliser une analyse de plante pour piloter sa fertilisation
L’application de la méthode de calcul du Comifer n’est pas adaptée pour les prairies permanentes, compte tenu de leur capacité à aller puiser les éléments fertilisants plus en profondeur grâce à leur développement racinaire. De plus, sous prairie permanente, on observe un fort gradient de concentration du phosphore et du potassium dans les premiers centimètres du sol (figure 1), ce qui pose la question de la profondeur de prélèvement pour l’analyse de sol.

L’analyse d’herbe au printemps, alors plus pertinente que l’analyse de sol, rend compte non seulement de la disponibilité de ces éléments dans le sol mais également de l’aptitude de la plante à les prélever.
Concrètement, les prélèvements doivent être réalisés en pleine pousse de l’herbe, avant épiaison, en l’absence de stress climatique et en condition d’azote non limitante. Aussi, les indices de nutrition calculés à partir des teneurs en N, P et K de la plante ne sont interprétables que pour les prairies comportant moins de 20 % de légumineuses.
Pour réaliser cette analyse, le mode opératoire est relativement simple : il suffit de prélever 15 à 20 poignées d’herbe par parcelle coupées à 5 cm du sol et de constituer un échantillon représentatif d’environ 500 g de matière brute à envoyer au laboratoire.
Les indices de nutrition se calculent ensuite en appliquant les formules suivantes :
Une fois les calculs effectués, en tenant compte des pratiques de fertilisation sur la parcelle et des objectifs de production, plusieurs préconisations sont possibles (figure 2).

(Source : Comifer 2019)
En pratique, comment raisonner les apports ?
Comme pour l’azote, la fertilisation P et K sera la plus efficace si elle est apportée aux alentours des 200 degrés-jours cumulés (base 0°C) depuis le 1er janvier.
Des doses d’apport de 60 kg P2O5/ha et 160 kg K2O/ha sont généralement suffisantes pour atteindre au moins 95 % de la production maximale de la prairie, quel que soit le potentiel de la parcelle.
Les effluents d’élevage apportés régulièrement sur les prairies, a minima tous les deux ans à des doses équivalentes à un apport de 25 à 30 t/ha de fumier de bovins, permettent dans bon nombre de cas de couvrir les besoins en P et K, donc de faire l’impasse sur un apport minéral.
Concernant les formes d’apport, alors que la totalité de la potasse apportée par un engrais minéral ou organique est soluble et disponible pour la plante, ce n’est pas le cas pour le phosphore. En effet, pour les apports organiques, au même titre que l’azote, il existe un coefficient d’équivalence pour le phosphore. Il est en moyenne de 85 %, mais peut varier selon l’élevage et le type d’effluent (tableau 3).

Source : brochure « Valorisation agronomique des effluents d’élevage de porcs, bovins, ovins, caprins, volailles et lapins » – IFIP, ARVALIS, Idele, ITAVI)
Pour les apports minéraux, certaines formes sont plus efficaces que d’autres pour le phosphore. Ainsi, les superphosphates et phosphates diammoniques sont efficaces dans tous les types de sol (solubles au moins à 90 % dans l’eau), alors que les scories ne sont efficaces que dans les sols à tendance acide. Les phosphates naturels (autorisés en agriculture biologique) sont insuffisamment efficaces, quel que soit le type de sol.
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