Marchés céréaliers - Comment expliquer la volatilité des prix ?
Dans un marché mondialisé, les prix des céréales sont influencés par de nombreux facteurs dont les effets peuvent s’additionner ou se neutraliser. Le poids de ces facteurs varie selon les conditions du moment. Retour sur les mécanismes en jeu dans l’évolution des prix des céréales.
Le prix d’un produit, à un moment donné, reflète l’équilibre entre l’offre et la demande pour alimenter un marché.
En règle générale, l’offre en céréales est constituée d’une récolte annuelle par pays, dont la quantité et la qualité sont principalement influencées par les conditions météorologiques. Avec des millions de producteurs à travers le monde, la production est très atomisée. Les stratégies de ces derniers sont influencées par des facteurs locaux très variables entre les zones de production.
En face, la demande est un facteur qui s’adapte peu à la production céréalière. Des variations annuelles sont possibles mais la demande mondiale est globalement en augmentation, en lien avec la croissance démographique.
Les débouchés non alimentaires (biocarburants, biochimie) se révèlent être, selon les périodes, des facteurs d’équilibre du marché ou, à l’inverse, d’amplification de pénurie.
Les quantités de céréales produites peuvent varier significativement d’une année à l’autre et être ainsi supérieures ou inférieures à la demande. Les stocks font office de « tampon » entre l’offre et la demande.
La qualité des récoltes, elle aussi variable selon les conditions annuelles, entre également en ligne de compte. Les critères qualités sont à la base de l’accession aux marchés, plus particulièrement à l’export avec des cahiers des charges spécifiques selon les destinations (50 % du blé français est exporté).
Des marchés sensibles à des faibles variations de production
La séparation géographique des bassins de production et de consommation des céréales génère des échanges, à l’origine de l’existence des prix mondiaux. Or, les volumes échangés représentent moins de 20 % de la production mondiale. Ainsi, une faible variation de cette dernière peut avoir un impact important sur les échanges internationaux.
Dans les pays producteurs qui privilégient l’approvisionnement de leurs marchés intérieurs, toute baisse de leur production aboutit mécaniquement à une baisse des quantités exportables. Cela peut se traduire par une hausse des prix si les stocks mondiaux ne peuvent compenser cette baisse ou si la demande mondiale augmente.
L’année 2010 illustre bien ce phénomène. Une forte baisse de la production de blé en Russie (-20 Mt) a alors amené les autorités russes à approvisionner leur marché intérieur par le biais d’un embargo sur les exportations. Sur une production mondiale de 650 Mt de blé, la production russe ne représente qu’un pourcentage limité. Mais les 15 Mt habituellement fournies par la Russie ont pesé en proportion beaucoup plus importante sur les échanges mondiaux du blé qui s’élevaient alors à 130 Mt. D’où l’augmentation des prix constatée à l’été 2010.
Des facteurs externes de plus en plus influents
La volatilité des cours est synonyme d’un plus grand intérêt pour les investisseurs extérieurs à la recherche de profits potentiellement plus élevés. Les marchés agricoles, comme la plupart des secteurs de l’économie, sont ainsi influencés par la financiarisation qui accentue les effets de la volatilité des cours.
Les échanges mondiaux de marchandises pèsent sur les taux de change et la valeur des monnaies, en lien avec l’état de l’économie des pays qui les émettent. Ainsi en 2015, le prix du blé en dollar américain a chuté sur le marché mondial en raison d’un record de production et de stocks. Mais comme la valeur de l’Euro a elle-même chuté par rapport au dollar, le prix du blé payé aux producteurs en Euro a été réduit dans une moindre mesure. Une revalorisation de l’Euro entraînera l’effet inverse. La France, exportatrice nette en blé, est directement confrontée aux prix mondiaux en dollar, d’autant plus que les mécanismes de régulation des prix de l’Union Européenne ont été fortement réduits ces dernières années.
Les décisions géopolitiques sont aussi un facteur d’influence important sur les marchés des céréales, en particulier s’ils sont contrôlés par l’État, comme dans les pays du pourtour méditerranéen. Enfin, les coûts de transport agissent directement sur les prix payés aux producteurs. Avec des coûts historiquement faibles, les débouchés des pays exportateurs s’en trouvent élargis. L’évolution des prix du transport maritime est liée à ceux du pétrole, à la disponibilité des bateaux ou encore à l’intensité des échanges de matières premières (pétrole, minerais, céréales…).
Une variabilité des prix plus marquée depuis 2006
Jusqu’en 2006, les stocks mondiaux de céréales restaient suffisants pour absorber les variations de production et assurer leur rôle « tampon » entre l’offre et la demande. La campagne 2006-2007, caractérisée par une forte baisse de la production et des stocks céréaliers, associée à une demande mondiale en hausse, a marqué le début d’une plus forte instabilité des prix agricoles. Des baisses de production dans des pays importateurs, une croissance démographique et des modes de consommation qui évoluent, accentuent les échanges internationaux de céréales.
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