Quel impact de l'ACS sur le fonctionnement hydrique des sols ?
L’empirisme et les modélisations le laissaient supposer, les mesures en expérimentation le confirment, dans une certaine mesure : l’Agriculture de Conservation des Sols (ACS) accroît le Réservoir Utile et surtout la vitesse de circulation de l’eau grâce à une porosité fonctionnelle tout au long de la campagne. Du moins, dans le Sud-Ouest, où s’est déroulé le projet multipartenarial Bag’ages de 2016 à 2021.
L’ACS repose sur le triptyque réduction forte (voire absence) de travail du sol, couverture permanente du sol (plantes vivantes ou sous forme de résidus maintenus en surface) et diversification des cultures. Le tout, dans le but de favoriser le stockage du carbone dans le sol et de ne pas déstructurer ce dernier par le travail du sol. A priori, les propriétés physiques, chimiques, biologiques et le fonctionnement hydrique d’un sol conduit en ACS se différencient d’un sol conduit en labour.
C’est ce qu’a vérifié le projet Bag’ages1 sur sept sites du Sud-Ouest, dont quatre étaient couplés avec des parcelles attenantes conduites en labour (au moins une année sur deux)).
Tableau 1 : Caractéristiques des sept sites d’étude du projet Bag’ages
Jusqu’à 10 mm d’augmentation de Réservoir Utile en semis direct
Le premier facteur de variabilité du réservoir utile2 (RU) du sol est le site, donc le type de sol.
Cependant, les sols conduits en ACS stockent plus d’eau, essentiellement dans les horizons superficiels - et donc indépendamment de la profondeur d’enracinement -, dans des proportions qui demeurent toutefois modérées : pas de différence significative dans l’un des sites conduit en strip-till, 5 % à 10 % en sols limoneux (6 à 10 mm en terres noires du Béarn) et jusqu’à 24 % (5 mm) en argilo-calcaire.
Pour chaque site, le réservoir utile a été déterminé par établissement des courbes de rétention en eau à partir d’échantillons prélevés à plusieurs profondeurs.
Un enracinement plus profond et généralement plus dense en ACS
Les profondeurs maximales et la densité d’enracinement du maïs ont été relevées de 2017 à 2019 sur trois sites. La dynamique de prospection racinaire n’est pas la même. Quel que soit le site, les systèmes en ACS sont plus performants. L’ACS permet donc a priori l’accès à un RU de plus grande taille au sens spatial du terme.
Une meilleure circulation de l’eau en ACS
Le labour permet d'atteindre des vitesses de conductivités hydrauliques à saturation (Ks, mesurée en mm/heure avec des infiltromètres à disque) beaucoup plus faibles qu'en ACS. Autrement dit, l’eau circule plus vite en ACS, qu’il s’agisse d’infiltration ou de ressuyage.
La circulation favorisée par une porosité plus stable et fonctionnelle
Au cours d’un cycle cultural, on observe en labour une valeur maximale de Ks après travail du sol qui finit par s’effondrer en fin de cycle. En ACS, cette valeur reste relativement stable au cours du temps.
Parallèlement, au sein d’un site, la masse volumique apparente (communément appelée densité apparente) est stable à l’échelle d’un cycle végétatif en ACS alors qu’en labour, elle augmente, ce qui traduit son instabilité. Cela s’explique en labour par le fait que l’action mécanique va créer temporairement une structure plus « aérée » après le semis qui va finir par s’estomper sous l’effet des passages d’engins, de la pluie, de l’entraînement des particules en profondeur, etc.
Ainsi, un sol conduit en ACS, pas ou peu perturbé, conserve un réseau stable de micro et mésoporosités fonctionnel, qui infiltre ou ressuie plus d’eau et plus vite qu’un sol conduit en labour. Schématiquement, les fins tuyaux restent en bon état tout au long de la campagne en ACS, alors que les grands tuyaux créés par le labour s’effondrent. Ce que montrent l’évolution de la masse volumique en labour et sa stabilité en ACS.
Conséquence du changement climatique, les cycles de l’eau à la parcelle se traduisent de plus en plus fréquemment soit par des périodes d’excès, soit par des périodes de déficits forts. L’ACS pourrait donc être une partie de la réponse à cette problématique.
1 Le projet est financé par l’Agence de l’Eau Adour Garonne et le Conseil régional d’Occitanie. Il est Coordonné par l’UMR AGIR (sous la direction de Lionel Alletto). Il rassemble des coopératives, des Chambres d’agriculture, des associations et des instituts techniques (dont ARVALIS)
2 La « réserve utile » représente l’état de remplissage du « réservoir utile » à un instant donné
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