Alimentation des ruminants : organiser son plan de pâturage en trois étapes
Piloter le pâturage de son troupeau n’est pas toujours aisé. Il est nécessaire de réaliser un prévisionnel des surfaces à pâturer tout en sachant qu’il faudra les adapter durant l’année en fonction des conditions climatiques. Quelques conseils pour gérer et anticiper le pâturage à venir.

La pousse de l’herbe reprend dans les prairies. Même si la croissance reste faible pour le moment, la mise à l’herbe des animaux ne saurait tarder dès que les conditions de portance seront suffisantes. Néanmoins, avant de faire sortir les animaux, plusieurs éléments doivent être préparés en amont pour que la saison de pâturage soit optimisée et se déroule dans de bonnes conditions.
En premier lieu, il convient de vérifier l’état des clôtures des parcelles sélectionnées pour le pâturage. Elles feront également l’objet d’un suivi régulier tout au long de la saison.
Ensuite, il faut prévoir son plan de pâturage avec la méthode Herbo-LIS®, développée par ARVALIS à partir de nombreuses mesures dans différents contextes pédoclimatiques sur une diversité d’exploitations agricoles. Elle s’articule autour de trois grandes étapes : prévoir le chargement de chaque surface pâturée, ajuster la conduite du pâturage en cours de saison et faire le bilan au moment de rentrer les animaux.
Allouer les surfaces à pâturer en fonction du chargement et du potentiel de la prairie
La première étape de la méthode Herbo-LIS® doit être réalisée en fin d’hiver, avant que la pousse réelle de l’herbe ne reprenne. Il s’agit d’organiser un plan prévisionnel de pâturage et de prévoir les récoltes des prairies au printemps. L’objectif est d’allouer à chaque surface en herbe son type d’exploitation (fauche ou pâturage) afin de connaître la surface disponible pour le pâturage du troupeau. D’autre part, il est essentiel de constituer des lots d’animaux et de sélectionner les parcelles qui leur seront allouées tout au long de la saison. Enfin, la dernière étape consiste à vérifier que les lots sont bien adaptés en termes de chargement en fonction de la production des prairies sélectionnées et des pratiques de fertilisation associées. L’évaluation du chargement est importante : selon le type d’animal, son âge et son niveau de production, le chargement à l’hectare varie.
Evaluer le chargement en bovin lait
Pour les vaches laitières, les EVL (Equivalents Vache Laitière) permettent d’adapter le chargement des lots à pâturer selon les besoins des animaux (tableau 1).

Concrètement, 1 EVL correspond à une vache laitière qui a vêlé à l’automne, avec un poids vif moyen entre 600 et 650 kg et une production moyenne autour de 20 à 22 kg de lait par jour à 4 % au printemps. Par ailleurs, pour 1 EVL, on estime que la capacité d’ingestion au pâturage s’élève à 14 kg MS d’herbe par jour, complémenté par un aliment concentré à hauteur de 0,5 à 1 kg/jour et une hauteur de sortie du pâturage de 6 cm environ.
Ainsi, au printemps, pour une prairie produisant environ 7 t MS/ha/an, le chargement pourra s’élever à 3 EVL par hectare, soit 0,35 ares/EVL. Mais cette surface par EVL n’est pas fixe, elle devra être adaptée au cours de l’année en fonction des conditions de pousse.
En bovin viande, le chargement se calcule autrement
En élevage bovin allaitant, ce sont les EVV (Equivalents Vache Veau) qui sont calculés et qui prennent en compte le poids de l’animal : 1 EVV correspond à la consommation d’une vache de 710 kg et d’un veau de 110 kg, soit 17,2 kg MS par jour.
Pour un potentiel de prairie moyen (entre 5 et 8 t MS/ha/an), la surface nécessaire pour le pâturage au printemps est de l’ordre de 40 ares/EVV. Cette surface devra être augmentée avec l’avancée dans la saison pour passer à 80 ares/EVV en été lorsque l’offre en herbe est la plus limitée.
Ainsi, pour un lot de 12 vaches de réforme de 760 kg (10 EVV), il sera nécessaire de prévoir 4 ha de pâturage au printemps et 8 ha en été.
Lire aussi : « Production de viande bovine - Quelles performances du pâturage face aux aléas climatiques ? »

Pour gérer la répartition des lots d’animaux au sein des prairies, la technique du pâturage tournant a fait ses preuves et peut être mise en œuvre quand cela est possible. Elle consiste à découper les prairies en paddocks les plus homogènes possibles selon la topographie, la nature des sols et la précocité de pousse de l’herbe (espèces constituants la prairie) tout en ayant un minimum de 5 paddocks. La rotation des animaux sur les paddocks s’étale sur 28 jours au total, avec 7 jours maximum de présence afin de laisser un minimum de 21 jours de repousse entre chaque passage. Enfin, il est préconisé de faire entrer les animaux dans un paddock seulement quand la hauteur d’herbe est de 10 à 12 cm (repère indicatif : mi-mollet) et de les faire sortir avant que la hauteur d’herbe n’ait atteint 5 cm (repère indicatif : talon).
Ajuster la conduite du pâturage au cours de l’année
Le pâturage est étroitement lié à la pousse de l’herbe et in fine aux conditions climatiques de l’année. Ainsi, il est indispensable de faire évoluer la gestion du pâturage selon le climat et les stocks d’herbe sur pied disponibles. Pour ce faire, des mesures de hauteur d’herbe à l’aide d’un HerboMètre® peuvent être réalisées tout au long de la saison afin d’estimer la quantité d’herbe disponible et ainsi répartir les lots de façon cohérente sur les prairies ou débrayer des paddocks pour les récolter. Pour ceux ne possédant pas cet outil de mesure, il est toujours possible d’estimer la hauteur de l’herbe à l’aide d’une simple observation visuelle au niveau de sa botte. Attention toutefois : les mesures via l’HerboMètre® sont des hauteurs d’herbe compressée, il ne faut donc pas se fier à une hauteur réelle sur la botte mais bien aux repères ci-dessous.

Faire le bilan de la saison de pâturage
La dernière étape de cette méthode est à mettre en place lorsque la saison de pâturage s’achève et que les animaux sont de retour en bâtiment. A cet instant, il est pertinent de réaliser un bilan du pâturage de l’année afin d’évaluer l’état des animaux, la charge de travail, les quantités d’herbe sur pied consommées en vue de relever les axes d’amélioration pour la prochaine campagne.
Par exemple, si, en fin de campagne, les stocks fourragers viennent à manquer et que l’on fait le constat que de l’herbe a été gaspillée au pâturage, il est alors pertinent pour l’année suivante de réduire les surfaces disponibles au pâturage de printemps.
Cette méthode est une ligne directrice à suivre pour gérer au mieux son pâturage tout au long de l’année et simplifier le travail des éleveurs.
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