Alimentation des ruminants - Maïs fourrage récoltés trop secs : quelles conséquences ?
Un maïs ensilé au-delà de 35 % perd de sa digestibilité et demande quelques ajustements dans la gestion des rations et du silo.
Lorsque les conditions de culture ont été normales, le stade optimal de récolte du maïs fourrage correspond à environ 32-33 % de matière sèche de la plante entière. C’est le meilleur compromis entre le rendement et la qualité du fourrage récolté.
Une récolte avant 30 % MS peut parfois être nécessaire, sur un semis tardif, en année froide, avec une précocité variétale inadaptée à l’offre climatique. Dans ce cas, le rendement et la qualité (teneur en amidon) du fourrage récolté sont affectés. Au silo, il peut y avoir écoulement de jus, riches en sucres et protéines. Des précautions doivent être prises pour limiter ces pertes : augmenter la longueur de coupe, ajout de paille, ensilage sec, pulpe déshydratée… Avec ces maïs moins riches en amidon, les rations devront être complétées en énergie.
Une récolte à 35-38 % MS permet, quand les conditions sont favorables, de gagner jusqu’à 0,5 à 0,7 t MS/ha, mais cela dégrade la qualité du fourrage récolté et rend la conservation plus délicate. Au final, une récolte tardive ne permet pas d’augmenter la quantité par hectare d’unités fourragères (UF) réellement valorisés par les animaux. Le stade 32-33 % MS reste le bon compromis technico-économique.
Au-delà de 35 % MS, l’amidon est moins digestible dans le rumen
La valeur UFL « potentielle » du fourrage, calculée à partir d’une analyse de laboratoire, tend à augmenter jusqu’à un certain niveau de maturité, grâce à l’augmentation de la teneur en amidon.
Il faut aussi prendre en compte le niveau de valorisation ruminale de l’amidon lié à sa maturité. Des travaux récents ont montré l’impact négatif de la maturité du grain sur la dégradabilité ruminale de l’amidon. En clair, plus un grain est mûr, plus la part d’amidon « by-pass » (qui passe dans le rumen sans être valorisé par les micro-organismes) est importante. Ainsi, entre 30 % MS et 40 % MS plante entière, la dégradabilité de l’amidon dans le rumen baisse de 8 points. Ceci a pour conséquence de diminuer le risque acidose d’une ration riche en amidon, mais aussi de diminuer la quantité d’énergie disponible pour la synthèse des protéines microbiennes dans le rumen. La perte est d’environ 2 g de PDIE par kg de matière sèche de maïs.
Au-delà de 35 % MS, la digestibilité des tiges et feuilles chute
En fin de cycle, la digestibilité de la partie végétative peut brusquement se dégrader sous l’influence de la sénescence de la plante et de la dégradation des conditions de végétation. Il n’y a alors aucun intérêt à attendre pour récolter. Les essais ARVALIS - INRA montrent que la digestibilité des fibres végétales de type NDF (Neutral Detergent Fiber, qui est une mesure de la quantité de parois végétales) diminue de 4 points lorsque la récolte est effectuée à 38 % MS contre 33 % MS. L’impact direct de cette baisse de digestibilité des fibres NDF est évalué à 0,4 kg de lait par vache et par jour selon une récente synthèse d’essais. Malgré une augmentation de la teneur en amidon, la valeur énergétique valorisable par l’animal n’augmente pas car elle est contrebalancée par la plus faible digestibilité des fibres.
Le tableau 1 présente une synthèse des données de rendement et de valeur alimentaire mesurées dans les essais ARVALIS. Malgré une augmentation de la teneur en amidon avec celle de la teneur en matière sèche, la valeur énergétique valorisable par l’animal n’augmente pas car cela est freiné par une moindre digestibilité dans le rumen et la plus faible digestibilité de la partie tiges et feuilles de la plante (fibres NDF).
Tableau 1 : Évolution du rendement, de la composition chimique et de la valeur énergétique du maïs fourrage plante entière, en fonction du stade de végétation (% MS)
Source : essais ARVALIS 2011-2014
Au-delà de 35 % MS, il faut revoir la composition de la ration
La modification de la composition chimique de la plante liée à sa maturité nécessite de revoir le rationnement pour limiter le risque d’acidose lié à l’augmentation de la teneur en amidon du maïs. Un maïs fourrage à forte teneur en amidon doit être limité en quantité et associé à une part importante d’herbe pour limiter la teneur en amidon de la ration à un niveau raisonnable, de l’ordre de 23-24 % de la matière sèche.
Une ration basée sur un maïs récolté à 40 % de MS et 37 % d’amidon devra comporter au minimum 5 kg de MS d’herbe pour ramener la teneur en amidon de la ration à un niveau correct pour ne pas déstabiliser le rumen. En conséquence, la densité énergétique de la ration sera abaissée et la production laitière diminuée.
Au-delà de 35 % MS, c’est prendre des risques sur la qualité de la récolte et de la conservation
Une récolte avec un taux de MS élevé augmente les risques de pertes : mauvaise conservation au silo, reprise de fermentation sur le front d’attaque au moment du désilage. Pour limiter ces pertes, des précautions doivent être prises (augmenter la finesse de hachage pour viser 10 mm en « sortie goulotte d’ensileuse », veiller au bon éclatement des grains, améliorer le tassement du fourrage, réduire la taille du front d’attaque pour avancer plus rapidement lors du désilage). Mais ces précautions ne peuvent garantir l’absence de pertes.
Pour en savoir plus, commandez la nouvelle brochure « Maïs fourrage : objectif qualité du champ à l’auge » des éditions ARVALIS.
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