Céréales à paille - Inondations des parcelles : des impacts dépendants du stade et du niveau d’eau
Les fortes pluies des mois passés ont parfois provoqué des inondations dans les parcelles, suite à la sortie de rivières de leur lit. L’hydromorphie des sols peut avoir des conséquences sur la culture en fonction du stade, mais aussi du niveau d’eau stagnant dans la parcelle.
Lors d’inondations des parcelles, les cultures peuvent avoir seulement leurs racines sous l’eau du fait des sols engorgés ou être totalement submergées. L’hydromorphie des sols provoque une anoxie, c’est-à-dire une baisse de la disponibilité de l’oxygène nécessaire à la respiration des cellules. Résultat, il y a un ralentissement voire un arrêt du métabolisme de la plante. En particulier, les racines cessent de fonctionner, et induisent deux effets : la fermeture des stomates (et donc un blocage de la photosynthèse) et un arrêt de l’absorption d’azote.
Les différentes espèces de céréales à paille ne présentent pas la même sensibilité à l’excès d’eau ; la hiérarchie pourrait s’établir comme ceci (de l’espèce la plus tolérance à la plus sensible) : Seigle = Triticale > Blé tendre > Orge d’hiver >= Blé dur
Les conséquences d’un engorgement des sols vont dépendre de la période à laquelle il intervient.
La germination, le stade le plus sensible
En cas d’engorgement d’un sol, le taux de levée de la culture chute fortement en quelques jours, pour atteindre 0 après 15 jours. Les références sont issues de travaux anglais (Cannell et Belford, 1982), vraisemblablement dans des conditions naturelles fortement défavorables (sol argileux).
Tableau 1 : Evolution du taux de levée de graines en cours de germination soumises à un ennoiement temporaire (source Cannell et Belford, 1982)
Durée d’ennoiement | Pourcentage de levée (min-max) | Nombre d’observations |
1 j | 90 (75-99) | 9 |
3 j | 75 (60-85) | 4 |
4 j | 60 (40-65) | 4 |
10 j | 5 (0-5) | 2 |
16 j | 0 | 1 |
Compte tenu des forts cumuls de pluie de cet automne, il est possible que des phénomènes de battance soient apparus et aient affecté encore davantage la qualité de levée.
Des conséquences limitées au tallage
Le tallage est a priori la phase la plus tolérante au stress hydrique (entre le stade début tallage et le stade redressement) et l’engorgement des sols a des impacts limités sur le fonctionnement de la plante.
Au cours de cette période, les besoins instantanés en photosynthèse sont faibles : en cas d’hydromorphie, la seule composante du rendement pouvant être altérée est le niveau de tallage. Ainsi, même si le tallage est très faible à épi 1cm, la plante a normalement ébauché, au niveau du plateau de tallage, des bourgeons axillaires qui pourront monter si les conditions le permettent, ce qui permet un « rattrapage » de la culture.
Par contre, si l’engorgement du sol perdure à la fin du tallage et courant montaison, la montée à épi et la fertilité épi seront affectées.
Un essai fortement touché par de l’hydromorphie (dès le stade tallage et jusqu’à la montaison) a été suivi à proximité d’Ouzouer-le-Marché (41) en 2001. Comparées aux valeurs obtenues sur un essai proche, non pénalisé par les excès d’eau, les différentes composantes de rendement ont été touchées :
- Tallage (NT3F) : - 45%
- Densité d’épis : - 33%
- Fertilité épi : - 8%
- Grains/m² : - 41%
- PMG : + 7%
- Rendement : - 34% (65-70 q/ha au lieu de 100-105)
En particulier, les cultures sont restées en situation de carence azotée pendant la quasi-totalité de leur cycle (figure 1).
Figure 1 : Comparaison des biomasses et des statuts azotés de parcelles hydromorphes et de parcelles saines (Ouzouer-le-Marché, 2001)
Et en cas de submersion temporaire des cultures ?
Les références disponibles proviennent d’inondations qui ont eu lieu dans la vallée du Rhône au cours des automnes 2002 et 2003 (stade 2-3 feuilles) ; la submersion a duré 3 à 5 jours, suivie d’hydromorphie marquée dans le mois suivant. Des pertes de plante et des tallages particulièrement faibles ont été constatés. On peut donc supposer qu’au stade tallage, une submersion d’une petite semaine engendrera une pénalisation de la culture, mais pas sa disparition complète.
Dans ces situations de fonds de vallée, les sols sont le plus souvent profonds et permettent des rattrapages de fin de cycle (montée à épi, PMG) favorables ; les grilles de décision de retournement doivent donc être ré-étalonnées en fonction de la capacité accrue de rattrapage, mais aussi des possibles cultures de remplacement (tournesol, maïs en sec).
Réagissez !
Merci de vous connecter pour commenter cet article.