CIVE : des critères de qualité d’ensilage plus souples qu’un fourrage classique
Bien que la plupart des bonnes pratiques d’ensilage soient valables pour un usage en fourrage comme en méthanisation, des expérimentations montrent que le processus de méthanisation est moins « sensible » à certains paramètres de fermentation, tels que le pH ou la présence de bactéries et d’acides butyriques.
La fermentation est l’étape-clé sur laquelle repose tout le procédé de stockage par ensilage. Des bactéries en conditions anaérobies (sans oxygène) convertissent les sucres solubles de la plante en acides organiques. En l’absence d’oxygène, l’accumulation de ces acides stoppe le développement d’autres micro-organismes qui pourraient dégrader la qualité de la récolte. Celle-ci est ainsi préservée sur de longues durées.
Le stockage par ensilage est un procédé communément employé depuis près de 150 ans pour les fourrages à destination de l’alimentation animale. Il a été largement étudié dans ce cadre et plusieurs critères ont été définis pour juger de la qualité d’un ensilage selon ses caractéristiques de fermentation : pH compris entre 3,8 et 4,5 selon la teneur en matière sèche, teneur élevée en acide lactique, concentration basse en autres acides (acide acétique, acide butyrique, acide propionique).
Peu ou pas de pertes énergétiques liées à la fermentation
La plupart des fermentations « désirables » dans l’ensilage (fermentations lactiques homofermentaires) n’entraînent pas ou peu de pertes énergétiques. En revanche, d’autres voies métaboliques induisent des productions de gaz (CO2 et H2) à l’origine de pertes de masse, et parfois de potentiel énergétique de la matière ensilée.
Figure 1 : Schéma simplifié de la fermentation d'ensilage
La production de CO2 lors de la fermentation entraîne des pertes de masse qui ne sont pas synonymes de pertes énergétiques, le pouvoir énergétique de la molécule de CO2 étant nul. Le potentiel méthanogène est alors préservé au cours de la réaction et concentré dans la matière. Ainsi, plus de 20 % de la masse sèche du silo peut être perdue lors de l’étape de fermentation sans impact significatif sur le potentiel méthanogène global des CIVE.
A l’inverse, la production d’hydrogène (H2), une molécule très petite et très légère, n’engendre quasiment aucune perte de masse. En revanche, l’hydrogène est très dense énergétiquement et sa production en grande quantité lors de la fermentation secondaire pourrait engendrer des pertes énergétiques conséquentes à l’échelle du silo. Heureusement, la production de H2 lors de la fermentation ne représente que quelques pourcents du potentiel énergétique global, tant que les conditions anaérobies sont bien respectées.
Des critères de qualité d’ensilage différents entre élevage et méthanisation
Des résultats expérimentaux confirment ces prévisions théoriques. Les pertes de masse liées à la fermentation ne causent pas de pertes de potentiel méthanogène (figure 2). De la même façon, le pH et la présence d’acide butyrique n’impactent pas le potentiel méthanogène de l’ensilage (figure 3). Les variations de potentiel observées sont limitées (généralement +/-10 %).
Les critères de qualité définis pour l’élevage pour évaluer la fermentation ne doivent donc pas être appliqués directement dans le cadre de la méthanisation.
Figure 2 : Variation du potentiel méthanogène au cours de la fermentation d’ensilage en fonction des pertes de masse ayant lieu lors de cette étape pour 52 expériences de stockage
MO = Matière Organique
Figure 3 : Variation du potentiel méthanogène au cours de la fermentation d’ensilage en fonction du pH final
Bien évidemment, la question de l’appétence ou de l’ingestibilité ne se posent pas pour la méthanisation. En revanche, la nature des acides produits peut avoir une influence sur la stabilité aérobie de l’ensilage lors de l’ouverture du silo. Et la présence d’acide butyrique peut également causer des nuisances olfactives.
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