Campagne blé tendre 2023/2024 : des rendements globalement en retrait
Excès de pluies sur dix mois, faibles rayonnements au printemps et pression maladies extrême… : les conditions de la campagne 2023/2024 ont fortement impacté l'élaboration du potentiel de rendement.
Des conditions de semis compliquées et un hiver plutôt favorable
Les semis se sont étalés jusque tard en saison, du fait de la pluie survenue fréquemment à partir du 15 octobre. Toutefois, les températures élevées pour l’automne ont engendré une avancée record du stade épi 1 cm pour les semis d’octobre, avec 19 jours d’avance par rapport à la moyenne sur vingt ans.
Un printemps sombre et pluvieux : des conditions peu favorables pour les composantes de rendement
Ces conditions impactent les composantes de rendement de la manière suivante :
- La densité d’épis est en retrait de -10 à -15 % en Craie par rapport à la moyenne sur dix ans (Figure n°1), toute date de semis considérée. En Barrois, la densité épis est quant à elle dans la moyenne sur dix ans en sols superficiels (du fait de l’accès à l’eau en continu, déplafonnant le potentiel habituel) et en retrait de -5 % à -15 % en sols profonds. La concurrence pour la lumière lors de la montaison, due au manque de rayonnement (Figure n°2, cercle orange clair), a continué à limiter le potentiel photosynthétique, ne permettant qu’à certaines talles de monter à épi.
Figure n°1 : Densité épis en fonction du nombre de tiges à plus de 3 feuilles. Observatoire ARVALIS.
Losanges jaunes : données historiques
Carrés rouges : données de l’année (le nombre correspond au département d’essai)
Figure n°2 : Rayonnement journalier et stade des blés. Station météo Inrae / Météo France de Fagnières (51).
En vert : les stades selon semis précoce à intermédiaire.
En violet : stades selon semis tardif
- La fertilité épis en Craie est quant à elle dans la moyenne sur dix ans ou supérieure (Figure n°3), d’autant plus en Barrois, ayant connu des printemps secs ces dernières années. Cela a permis de compenser le manque d’épis et d’arriver à des nombres de grains/m² proches de la moyenne (20 000gr/m²).
L’avance constatée à épi 1 cm n’est plus que de 4 jours en moyenne à épiaison, du fait de la fraîcheur printanière. Tandis que le froid de fin avril semble avoir eu un impact très limité sur la composante fertilité.
Figure n°3 : Nombre de grains/m² en fonction du nombre d’épis. Observatoire ARVALIS.
Losanges jaunes : données historiques
Carrés rouges : données de l’année (le nombre correspond au département d’essai).
Cercle rouge = zone Champagne-Ardenne
- Les pluies fréquentes du printemps ont favorisé une pression maladies qui affecte directement le remplissage des grains et le poids de mille grains (PMG) (en plus du manque de rayonnement), comme rarement observée ces dernières années. Les écarts T-NT peuvent atteindre entre 20 et 35 q/ha de nuisibilité dans les différents essais.
La septoriose étant majoritairement présente à partir de 2 nœuds et jusque post-floraison, tandis que la rouille brune s’est exacerbée autour de Dernière Feuille Etalée dans certaines zones et sur les variétés les plus sensibles.
Les fusarioses de l’épi ont malheureusement fait leur apparition avec les pluies autour de floraison. Les températures fraîches ayant potentiellement davantage favorisé Microdochium que Fusarium graminearum, ce qui est un moindre mal, cette deuxième étant sujette à la production de mycotoxines de type DON.
Cela a rappelé l’importance de l’optimisation de la protection fongicide, pour permettre une efficacité liée à une intervention au bon stade de la culture (malgré la météo capricieuse limitant les créneaux), à une dose adaptée et sans oublier de considérer la sensibilité variétale.
Une fin de cycle catastrophique
En début de phase de remplissage, le faible rayonnement limite la taille des enveloppes des grains, engendrant de mauvais PMG (Figure n°4). Malgré l’arrivée de conditions plus lumineuses et chaudes en cours de remplissage, le manque de rayonnement et la fraîcheur font leur retour, associée à la pression maladies continue jusqu’en fin de cycle, ne permettant pas de rehausser les trajectoires de remplissage des grains. D’autant que les cumuls de pluie abondants ont également impacté ce remplissage des grains.
Toutefois, trois dynamiques de remplissage se distinguent :
- Les situations fortement dégradées dès le début de la phase de remplissage : semis précoce, manque de rayonnement, forte pression maladies ;
- Les situations pour lesquelles la cinétique se tasse entre le début et la fin du remplissage : cinétique légèrement en dessous de la moyenne dès le départ, qui évolue peu (gain de 3 g de PMG en 10 jours)
- Les situations qui suivent la courbe moyenne de remplissage : semis tardifs et bon contrôle des maladies foliaires.
Les rendements ont donc globalement été en retrait par rapport au potentiel de la région (Figure n°5). Les poids spécifiques (PS) ont également été affectés, à considérer au regard des enjeux industriels dès le stockage des grains.
Figure n°4 : Cinétique de remplissage des blés. Observatoire ARVALIS
Figure n°5 : Rendement des blés. Observatoire ARVALIS
Figure 6 : Bilan des composantes et qualité des blés en Champagne-Ardenne, récolte 2024
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