Blé tendre d’hiver : bilan d’une campagne inédite
Le climat de la campagne 2022 est marqué par des extrêmes : les épisodes de pluies se comptent sur les doigts d’une main au printemps et les températures ont atteint des sommets sur la fin de cycle des blés.
Des semis souvent difficiles mais un hiver rassurant
Courant octobre, les semis ont pu être réalisés dans de moyennes à bonnes conditions alors que les blés de maïs implantés plus tardivement (après le 1er novembre) l’ont souvent été dans des conditions difficiles. Les récoltes du maïs s’étant faites tardivement du fait des pluies et de la fin de cycle très lente en 2021, les sols ont parfois été matraqués par les passages d’engins sur sols humides. Les différentes préparations de semis dans ces situations ont été forcées : cela a pu alors pénaliser les implantations des blés et provoquer des retards et manques à la levée.
L’hiver relativement doux et peu pluvieux a aidé les blés à s’implanter. Les reliquats d’azote en sortie d’hiver étaient à des niveaux relativement élevés (souvent supérieurs à 50 kgN/ha). Ce qui a permis aux blés de redémarrer rapidement en février et de présenter des biomasses très correctes.
Une montaison prometteuse
Des premiers apports d’azote ont été réalisés dans le sec à partir de mi-février: leur valorisation par la plante a été très limitée. Il est d’ailleurs recommandé de limiter les doses apportées à cette période (40 à 50 kgN/ha) car les besoins au tallage sont faibles, d’autant plus que les reliquats étaient forts. Les pluies attendues de fin mars/début avril ont permis de valoriser un maximum l’azote apporté au stade épi 1 cm et d’ainsi maintenir la biomasse en place. Les besoins en fin de cycle ont été plutôt élevés du fait du bon peuplement et les apports réalisés fin avril ont été bien valorisés.
Les conditions de printemps ont permis un développement rapide du blé qui est arrivé à floraison avec près de 10 jours d’avance sur la moyenne pluriannuelle. Les maladies foliaires sont restées très discrètes en raison des faibles pluies. Seule la rouille jaune s’est développée mais a pu être rapidement maîtrisée.
Entre mai et juin, les épisodes pluvieux ont été très ponctuels et attendus. Les parcelles ont clairement manqué d’eau en mai. L’irrigation des blés a été intensive dans certains secteurs avec trois à quatre tours d’eau réalisés.
La fin de cycle s’est accélérée avec des températures record début juin. Le remplissage s’est fait rapidement avec, sur certains secteurs, des blés qui ont subi de l’échaudage.
Des récoltes très hétérogènes mais en moyenne correctes
Les récoltes ont démarré la première semaine de juillet. Le 25 juillet, l’ensemble de la plaine était moissonné. Les rendements sont très hétérogènes (de 30 à 110 q/ha). Sont mis en cause les conditions d’implantation, la valorisation des apports d’azote, le stress hydrique et thermique... La moyenne régionale atteint 70 q/ha, légèrement en deçà de la moyenne pluriannuelle sur 20 ans qui s’élève à 73 q/ha. La qualité des blés est bonne : les taux de protéines sont très bons et les poids spécifiques (PS) moyens à bons. La qualité sanitaire, elle, est exceptionnelle malgré le risque agronomique a priori élevé dans notre région du fait des précédents maïs fréquents.
Figure 1 : Suivi des pluies, exemple de Sélestat (67)
Figure 2 : Suivi des températures, exemple de Sélestat (67)
Synthèse d’essais variétés des partenaires régionaux
De nouvelles variétés testées en Alsace
Une sélection de treize variétés, dont quatre nouvelles inscriptions, a été testée dans un réseau de onze essais menés par les partenaires techniques alsaciens (figure 3). Plus la note GEVES-Arvalis est élevée, meilleur est le comportement de la variété.
Figure 3 : Caractéristiques des variétés de blé tendre
S’appuyer sur les résultats de l’année mais garder un regard sur l’historique
Figure 4 : Résultats de rendements du tronc commun en Alsace en 2022
Figure 5 : Résultats de poids spécifiques des essais du réseau tronc commun blé animé par ARVALIS avec la Chambre d'Agriculture d'Alsace, le Comptoir Agricole de Hochfelden, la CAC de Colmar, Ets Gustave Muller, Ets Walsch et Ets Armbruster.
Figure 6 : Résultats des teneurs en protéines des essais du réseau tronc commun blé animé par ARVALIS avec la Chambre d'Agriculture d'Alsace, le Comptoir Agricole de Hochfelden, la CAC de Colmar, Ets Gustave Muller, Ets Walsch et Ets Armbruster.
La moyenne des six lieux non irrigués et des cinq lieux irrigués atteint 98,3 q/ha. Il s’agit d’essais en petites parcelles qui maximisent le rendement de 10 à 15 % environ. Les niveaux de rendements des différentes variétés sont peu différents statistiquement (seul Fructidor décroche). Certaines variétés présentent des résultats plus dispersés que d’autres selon les sites, conséquence probable des différences de dates de semis et conditions d’implantation et de l’accès à l’eau au printemps.
On peut également s’appuyer sur les résultats plus larges de la synthèse ARVALIS des plaines précoces qui comprend 11 essais dont un en Alsace ainsi que les résultats pluriannuels.
Que pensent les partenaires de ce panel de variétés ?
Celles qui nous ont séduites :
- LG ABILENE (nouveauté) : ses performances rendements et protéines la mettent en haut de tableau. Variété à suivre sur le créneau des variétés précoces.
- PRESTANCE : sa note DON est limite (5) mais son rendement est élevé et son poids spécifique (PS) très bon. Variété à suivre.
- CHEVIGNON, SACRAMENTO, FILON, ARCACHON, ROCINANTES sont des références pour l’Alsace avec des répartitions spécifiques sur certains secteurs (séchants/sols profonds, zones froides/plaine du Ried…)
- FRUCTIDOR reste présent sur le territoire malgré sa productivité désormais dépassée par les nouveautés.
- SOLINDO CS est une variété correcte au niveau rendements et qualité, sur le créneau barbu.
- HYLIGO, témoin hybride retenu dans le réseau, s’en sort bien niveau rendement.
Celles qui ne nous semblent pas les mieux adaptées :
- CELEBRITY et BALZAC (nouveautés) : leurs niveaux de résistance aux fusarioses et DON sont trop risqués pour le territoire.
- KWS CONSORTIUM (nouveauté) : son rendement moyen et sa note fusarioses ne sont pas au niveau attendu.
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