Premiers résultats sur la tolérance du lin fibre à la sécheresse
ARVALIS a conduit Une première campagne d’étude du comportement du lin fibre sous contrainte hydrique sur la plateforme PhénoField* d’Ouzouer-le-Marché (41) en 2023. En voici les premiers enseignements.
Afin d’évaluer la tolérance des variétés de lin fibre au stress hydrique et les processus physiologiques qui y sont associés, ARVALIS a mis en place deux protocoles expérimentaux sur Phénofield. Le premier a permis d’étudier le comportement de 23 variétés de lin sous deux modalités d’alimentation en eau : à l’évapotranspiration maximale (ETM), donc sans stress hydrique, et à 50 % de l’ETM. Le second essai a, quant à lui, permis de suivre les composantes physiologiques (biomasse, surface foliaire, quantité d’azote absorbée, rendement grain…) à des stades clés du cycle de la culture pour deux variétés (Aretha et Vivéa) soumises aux deux mêmes modalités d’alimentation en eau que pour le premier essai.
Pas de « variétés miracles »
Aucune variété de lin fibre ne se distingue pour sa capacité à tolérer un stress hydrique. Toutes subissent un fort impact sur le rendement.
Des observations pas réellement surprenantes compte tenu de la faible variabilité génétique de l’essai « Variétés ». À 50 % de l’ETM, les rendements en vert non battu (3 t MS/ha) ainsi que la teneur en eau de la biomasse aérienne (15 %) sont plus faibles qu’à l’ETM, respectivement 5,5 t MS/ha et 30 %. D’après les données issues des capteurs, la fin du pic de surface de vert, qui inclut la surface des feuilles, est enregistré deux semaines plus tôt sur la modalité stressée, signe d’une maturité plus précoce (figure 1). Ces essais corroborent les impacts observés dans la plaine en 2023, avec une intensité du stress hydrique comparable.
Figure 1 : Dynamique d’évolution de la fraction en vert avec stress hydrique (50 % de l’ETM) et sans stress hydrique (ETM)
Source : Données collectées sur la plateforme PhénoField en 2023
Le lin fibre atteint la maturité environ deux semaines plus tôt en cas de stress hydrique.
Un rendement fixé à la floraison en cas de fort stress hydrique
Le stress exprimé par la plante à partir de la floraison est le résultat d’un déficit hydrique qui a, en réalité, commencé 10 jours avant. Dans la situation présentant un fort niveau de stress hydrique, le rendement en fibre totale est fixé à la floraison, tandis que dans les situations bien alimentées en eau, celui-ci continue d’augmenter après la floraison, avec une dynamique distincte selon la variété (figure 2).
Figure 2 : Comparaison de l’évolution du rendement en fibre totale (t MS/ha) au cours du développement du lin, date à date, pour une même variété et selon le régime d’alimentation hydrique (à l’ETM ou à 50 % de l’ETM)
Source : Données collectées sur la plateforme PhénoField en 2023
Enfin, en situation de stress hydrique, pour une même variété, le rendement grain (t MS/ha) ainsi que le nombre de graines au m²diminuent. Cependant, le lin met en place une stratégie de conservation avec un indice de récolte plus élevé à 50 % de l’ETM qu’à l’ETM (ratio biomasse grain / biomasse totale). Cela suggère une allocation préférentielle de la biomasse produite vers les grains (tableau 1).
Tableau 1 : Impact du stress hydrique sur les composantes du rendement en grain du lin fibre
Les lettres entre parenthèses représentent les tests de statistiques de significativité pour une même variable : au moins une lettre identique indique un résultat non différent.
Source : Données collectées sur la plateforme PhénoField en 2023
Des essais satisfaisants au regard des conditions
Les résultats des essais peuvent paraître surprenants car les rendements à l’ETM sont inférieurs à ceux habituellement rencontrés par les liniculteurs. Ces essais ont été implantés en Beauce, une région où le lin fibre n’est pas cultivé, car les conditions climatiques n’y sont pas les plus favorables. De fait, la température de 28°C a été dépassée plusieurs fois courant juin 2023, impactant le développement du lin et sa production de biomasse. En outre, une contrainte technique de la plateforme expérimentale a nécessité de diminuer la densité de semis à 1600 grains/m², avec un écartement de 17,5 cm, contre habituellement 12,5 cm au semis. Néanmoins, les résultats obtenus sont riches d’enseignements, et offrent d’ores et déjà des pistes de réflexion pour les sélectionneurs.
De plus, les nombreux capteurs que comptent le dispositif PhénoField ont permis l’acquisition d’un grand nombre de données. Un pas supplémentaire vers la construction d’un modèle de culture dédié au lin fibre, qui permettra à l’avenir d’aider à identifier de possibles voies d’adaptation au changement climatique.
* PhénoField est une plateforme de phénotypage haut débit située dans la Beauce. Elle est équipée d’abris mobiles automatiques, couplés à des systèmes d’irrigation, permettant de gérer l’alimentation en eau des cultures.
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