Engrais organiques - Inutile de fractionner ou d'anticiper les apports sur maïs bio
À moins de profiter d’une intervention de binage, mieux vaut rester sur une stratégie d’un seul apport d'engrais organique de type PAT (protéines animales transformées) entre 6 et 10 feuilles du maïs en agriculture biologique. C'est la conclusion de quatre essais réalisés en 2018 et 2019 par ARVALIS, en partenariat avec les Chambres d’agriculture de Dordogne et des Landes.
En agriculture biologique, l’utilisation par le maïs des apports d’azote réalisés sous forme organique nécessite une minéralisation préalable de l’azote qu’ils contiennent. Celle-ci dépend fortement des conditions climatiques et peut être ralentie par temps froid, ce qui pose la question du fractionnement ou de l’anticipation des apports pour sécuriser leur efficacité.
Quatre essais ont été conduits dans le Lot-et-Garonne (St Etienne de Villeréal), dans les Landes (Souprosse) et en Dordogne (Rampieux) en 2018 et 2019. Un engrais organique 10-6-0 à base de poudres de viande, d’os et de farines de plumes a été utilisé dans tous les essais. À dose azotée totale équivalente (150 kg N/ha), le fractionnement a été testé dans les quatre essais tandis que l’apport anticipé a été testé partout sauf à Rampieux. Les apports « classiques » ont été réalisés au stade 8-10 feuilles du maïs en 2018 et vers 6 F en 2019.
Fractionnement ou anticipation : pas d’effet significatif sur le rendement
La fertilisation a systématiquement augmenté les rendements par rapport au témoin non fertilisé. En moyenne, sur les 4 essais, la stratégie de fractionnement en deux apports (une première moitié de la dose vers 2-3 F et le reste entre 6 et 10 F selon les essais) ne permet pas d’amélioration sensible du rendement par rapport à la stratégie de fertilisation plus classique en un seul apport entre 6 et 10 F (figure 1).
Figure 1 : Rendements du maïs (en % du témoin non fertilisé) obtenus pour une stratégie de fertilisation en un seul apport versus une stratégie en deux apports pour une dose équivalente de 150 kg N/ha (4 essais 2018 et 2019)
Rendement témoin non fertilisé : Souprosse 2018 : 83,0 q/ha, St Etienne de Villeréal 2018 : 57,5 q/ha, Souprosse 2019 : 70,6 q/ha, Rampieux 2019 : 99,2 q/ha
De plus, des tendances contradictoires ont pu être observées d’un essai à l’autre, avec des gains de rendement en 2018 à St Etienne de Villeréal (+10 %) et en 2019 à Rampieux (+4 %), pas de différence à Souprosse en 2018 et des pertes de rendement à Souprosse en 2019 (-13 %).
L’anticipation de l’apport vers 2-3 F a également été comparé à l’apport classique et au fractionnement en 2 apports. Les écarts moyens de rendement entre ces 3 stratégies restent assez faibles et aucun classement n’apparaît de manière évidente (figure 2).
Ainsi, à Saint Etienne de Villeréal, l’apport anticipé semblait être plus performant que l’apport « classique » mais moins intéressant que la stratégie en 2 apports alors que l’on observe le classement inverse à Souprosse en 2019.
Figure 2 : Rendements du maïs (en % du témoin non fertilisé) obtenus pour différentes stratégies de fertilisation (1 seul apport tardif, 1 seul apport précoce ou 2 apports successifs) pour une dose totale équivalente à 150 kg N/ha (3 essais 2018 et 2019)
L’apport classique entre 6 et 10 feuilles du maïs reste la référence pour les PAT
Le mode de fractionnement et la période d’apport semblent avoir assez peu d’incidence sur le rendement du maïs. Toutefois, les cultures de vente puis les cultures intermédiaires qui précédaient le maïs étaient des légumineuses ou des mélanges céréales – légumineuses dans les quatre essais. Les fournitures d’azote par le sol étaient importantes (reliquat d’azote minéral au semis compris entre 75 et 200 kg N/ha suivant les essais).
Dans ces conditions où l’azote n’est pas limitant au semis, le fractionnement des apports de PAT sur maïs ne présente pas de réel intérêt et n’est donc pas recommandé puisqu’il constitue un passage supplémentaire… à moins d’être couplé à une autre opération culturale (binage par exemple).
Il semble d’ailleurs judicieux de réaliser les apports d’engrais organiques juste avant un binage. Cette opération permettra d’une part de détruire les adventices et d’éviter qu’elles n’absorbent les éléments nutritifs de l’engrais destinés au maïs. D’autre part, le binage assurera une incorporation partielle de l’engrais et favorisera ainsi sa minéralisation.
A l’inverse, les apports d’engrais dans des situations où la pression d’adventices est déjà forte sont à proscrire, sous peine de favoriser leur développement et d’accroître leur pouvoir compétitif sur le maïs.
Stratégie différente pour les engrais à forte proportion d’azote ammoniacal
Le fractionnement des apports d’engrais azotés peut toutefois être préconisé pour certains fertilisants utilisés en AB, autres que les PAT. C’est par exemple le cas des engrais obtenus par fermentation bactérienne lors de l’hydrolyse des protéines végétale (à partir de mélasse de canne à sucre, de maïs ou de tapioca) pour produire des acides aminés. Ces engrais, apparus il y a un an ou deux sur le marché, contiennent environ 50 %, voire plus, d’azote sous forme ammoniacale. Compte tenu de leur composition, ils sont potentiellement exposés à d’importantes pertes d’azote par volatilisation ammoniacale. Le fractionnement des apports et leur enfouissement est alors fortement recommandé pour limiter ces pertes et améliorer leur efficacité agronomique.
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