Comment adapter le désherbage des céréales au contexte de cet automne ?
De nombreuses questions se posent toujours sur la mise en œuvre du désherbage dans le contexte si atypique de cet automne. Comment concilier efficacité, sélectivité vis-à-vis de la culture et respect de la réglementation
Sur les parcelles semées dès le mois d’octobre, certaines ont pu être désherbées en prélevée ou en postlevée précoce. Dans ces situations, la maîtrise des adventices est plutôt satisfaisante cette année : malgré les fortes pluies qui ont suivi, le désherbage a bien fonctionné dans la majorité des cas.
Les désherbages réalisés plus tardivement à la fin novembre sur des céréales autour de 3 feuilles, sont un peu plus lents d’action, le bilan d’efficacité est encore prématuré.
Comment gérer les parcelles semées en octobre et déjà très infestées de graminées développées ?
De nombreuses parcelles semées en octobre n’ont pas pu être désherbées, faute de créneau favorable. D’autres, désherbées tôt, auraient nécessité un rattrapage d’automne en raison de leur forte infestation en graminées. Dans ces situations très délicates, pour ne pas dire ingérables, avec une forte infestation de graminées d’automne déjà très développées (tallage), il convient de bien s’interroger sur la conduite à tenir.
En effet, au-delà du stade tallage des graminées, leur maîtrise est compromise car l’efficacité des herbicides, quels qu’ils soient, sera médiocre. Ainsi, si l’on tente un rattrapage « pompier » avec des antigraminées foliaires seuls ou combinés en mélange, on s’expose à deux risques :
- ne pas obtenir l’efficacité suffisante malgré des coûts de désherbage élevés,
- limiter les possibilités de ré-implantation d’une culture de remplacement au printemps s’il est décidé de ne pas conserver la parcelle.
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La rémanence des produits utilisés est alors à prendre en considération dans le choix de la culture de remplacement.
Semis tardifs : le décalage contribue largement au désherbage
Seul point positif au retard des semis suite aux pluies, il contribue à réduire considérablement le risque de salissement. Compte tenu des conditions d’implantation difficiles, avec des ré-engorgements régulier des parcelles, il est préférable dans ces situations de reporter le désherbage à plus tard.
On envisagera un désherbage de postlevée précoce uniquement dans les parcelles semées fin novembre où l’on constate actuellement des levées de ray-grass malgré le semis retardé. Dans ce cas, intervenir en bonnes conditions : pas de pluies abondantes annoncées dans les jours qui suivent l’application, pas d’amplitude thermique supérieure à 15°C et pas de gelées marquées (minimales inférieures à 3°C). On interviendra sur des adventices très jeunes, avec des produits racinaires comme Fosburi ou bien un Défi + Compil, possibles jusqu’au stade 3 feuilles des cultures. Le retour du froid et des pluies semble cependant limiter les fenêtres d’intervention dans l’immédiat.
Semis de janvier : un statut « céréale d’hiver » prolongé pour les usages phytosanitaires
D’un point de vue réglementaire, le nouveau catalogue des usages, paru en août 2023, considère désormais comme céréale d’hiver les céréales semées avant le 1er février*. Ainsi, un blé semé courant janvier demeure un blé d’hiver, ce qui ouvre la possibilité de le désherber avec les herbicides habituellement appliqués à l’automne. Toutefois, des précautions sont à prendre : avec des spécialités dont l’AMM spécifie une interdiction d’application au-delà du 31 décembre (par exemple Merkur) ou pour lesquelles la firme mentionne explicitement des conditions d’emploi particulières. Par ailleurs, dans ces conditions de semis très tardifs, le risque de salissement sera grandement limité, tout particulièrement vis-à-vis des adventices dites automnales. De fait, il limitera l’emploi des herbicides « dits d’automne ». Si leur emploi devait s’envisager en début d’année civile, bien valider avec la firme cette possibilité.
Pour les semis qui seront réalisés à partir du 1er février, la culture devient « culture de printemps » du point de vue des usages phytosanitaires. Dans ce cas, la liste des herbicides possibles se restreint (voir tableau 1).
Tableau 1 : Liste des herbicides autorisés pour un usage « céréale de printemps »
(1) : L’utilisation de buses à injection d’air homologuées "réduction des Zones Non Traitées" est obligatoire.
(2) : Pour les spécialités d'Adama, préconisées sur blé dur d'hiver, triticale et épeautre. Pour les spécialités de Nufarm, préconisées sur blé dur d'hiver, triticale et cultures de printemps.
(3) : Traitement automne-hiver : 1 application tous les 3 ans (stade BBCH 13-19).
(4) : Se référer aux indications d'ARVALIS et Adama pour la sensibilité des variétés de blé tendre.
(5) : Pas d'application au stade pointant sur blé dur.
(6) : Utiliser un dispositif homologué pour limiter la dérive de pulvérisation des produits .
(7) : Pour Mamut/Mohican/Toiseau/Diflanil SD: utilisation possible sur blé tendre de printemps, blé dur de printemps et seigle de printemps à 0,375 l/ha.
(8) : Suite à une utilisation sur céréales d'hiver, ne pas appliquer ce produit ou tout autre produit contenant de la métribuzine plus d'une année sur trois.
(9) : Dose recommandée de 0,36 l/ha sur blé dur.
(10) : Pour Replica seulement, pas d'utilisation sur épeautre.
(11) : Pour Obelisk seulement, utilisation à 0,3 kg/ha sur cultures de printemps et 0,48 kg/ha sur cultures d'hiver.
Du côté des antidicotylédones, la plupart des produits ont l’homologation hiver et printemps, à l’exception de Beflex, Picosolo, Compil, Alliance WG et quelques spécialités de metsulfuron qui n’ont pas d’usage sur blé tendre et blé dur de printemps.
*NB : ce classement au titre du catalogue des usages phytosanitaires n’a rien à voir avec le statut des cultures du point de vue de la réglementation PAC.
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