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Bretagne

Céréales : quelles adaptations techniques envisager avec les retards de semis ?

Les implantations de céréales ont pris du retard, en raison des fortes pluies enregistrées régulièrement depuis fin octobre. Malgré ce décalage, pas besoin de modifier les variétés pour des semis jusque mi-décembre. Ni les densités jusque fin novembre, pour des recommandations autour de 220-240 gr/m². Après cette date, il faudra les augmenter pour sécuriser le peuplement, notamment en sols plus compliqués (hydromorphes, battant…).

Semis tardif de blé tendre en Bretagne

Concernant la perte potentielle de rendement à retarder les semis, les essais de 2011-2014 nous montrent que l’écart entre un semis fin octobre et fin novembre-début décembre reste minime. Le climat breton est avantageux sur ce point, en comparaison à d’autres régions davantage pénalisées par ces retards (fin de cycle plus exposée aux stress climatiques).

Des semis retardés par les pluies régulières

La récolte 2024 est déjà marquée par la particularité des semis retardés, tout comme en 2019.

Au 6 novembre, les semis des blés et orges sont réalisés à 35-40 %, contre 70 % l’an dernier à la même date (source Céré’Obs).

Depuis mi-octobre, plus de 250 mm sont tombées en l’espace d’un mois sur le sud et l’ouest de la Bretagne. L’Est des Côtes-d’Armor et l’Ille-et-Vilaine ont reçu 120 à 177 mm, ce qui reste supérieur à la médiane des vingt dernières années.

Carte 1 : Somme de pluie entre le 15 octobre et le 11 novembre 2023
Carte 1 : Somme de pluie entre le 15 octobre et le 11 novembre 2023

Pas d’inquiétudes pour des semis jusque début décembre

Les essais dates et densité de semis réalisés de 2011 à 2014 permettent d’avoir du recul sur les pertes de potentiel de rendement du blé en semis tardif. Sur les trois ans d’essais, pour une densité de semis recommandée autour de 220-240 gr/m², pour une même variété (ici Apache et Bermude), en pourcentage du rendement maximum de chaque essai, on n’observe pas, en moyenne, de diminution du potentiel. Pour des semis tardifs, la perte maximale atteint 10 % du rendement de l’essai.

Figure 1 : Effet de la date de semis pour une densité 220-260 g/m2 (% rendement maximum à la même variété / 3 lieux, 5 années, 6 variétés)
Figure 1 : Effet de la date de semis pour une densité 220-260 g/m2 (% rendement maximum à la même variété / 3 lieux, 5 années, 6 variétés)

Par contre, des densités faibles, à 120 gr/m², engendrent plus de pertes de rendement pour des semis tardifs, de l’ordre de 5 % de perte en moyenne. Ce chiffre reste modeste au vu de la faible densité de semis. Cela traduit la très grande capacité de compensation et plasticité du blé, capable de produire plus ou moins d’épis par plante selon la densité de plantes levées.

Quelles densités de semis pour des semis tardifs ?

Les essais évoqués précédemment permettent également d’analyser l’optimum de densité en fonction de la date de semis. À partir de mi-novembre, une densité de semis au minimum de 220-240 gr/m² permet d’assurer le potentiel de production. Attention à ne pas sur densifier pour éviter les problèmes de verse et maladies au printemps.

Figure 2 : Effet de la densité de semis pour une date de semis tardive (fin novembre / début décembre / 3 lieux, 3 années, 3 variétés)
Figure 2 : Effet de la densité de semis pour une date de semis tardive (fin novembre / début décembre / 3 lieux, 3 années, 3 variétés)

Pour des sols plus difficiles (pierrosité, hydromorphie, superficiel, battant) et en cas de pression limaces, augmenter la densité de 10 %.

Un repère peut être d’augmenter de 1 % la densité de semis par jour de retard à partir de mi-novembre.

Pour en savoir plus sur les densités fonction du PMG et type de sol : consultez le guide régional Choisir et décider (page 20).

Pas d’intérêt à modifier sa variété avant décembre

Concernant la variété, retarder les semis peut avoir deux conséquences phénologiques :

  • Ne pas avoir suffisamment de jours vernalisants pour permettre à la variété d’épier (notion d’alternativité)
  • Enregistrer une épiaison plus tardive et sensible aux conditions de stress de fin de cycle (notion précocité épiaison).

Voici un tableau résumant ces deux critères, avec les caractéristiques phénologiques minimum par mois de semis (zone nord Seine).

Tableau 1 : Note d’alternativité minimum et note de précocité à épiaison minimum selon le mois de semis dans la zone nord Seine
Tableau 1 : Note d’alternativité minimum et note de précocité à épiaison minimum selon le mois de semis dans la zone nord Seine

Du point de vue de l’alternativité, pas de raison en Bretagne de modifier la variété avant janvier. Par exemple, Chevignon ou KWS extase ont une note d’alternativité de 3 et 2 respectivement, ce qui amène à pouvoir les semer jusque fin décembre.

Concernant le retard de cycle, un mois de retard au semis, c’est 15 jours de retard à épi 1 cm et 7 jours à épiaison. De la même manière, 2 mois de retard au semis engendrent un décalage de 1 mois à épi 1 cm et 10-12 jours à épiaison. Changer de précocité pour un semis de fin décembre permet de raccourci le cycle de 4-5 jours à épiaison (avec une variété plus précoce à épiaison de 1 note).

Tableau 2 :  Date médiane des stades de la variété Chevignon et Celebrity (précocité épiaison 6 et 7) en fonction de trois dates de semis sur la période 2000-2022 (modèle phénologique ARVALIS)
Tableau 2 :  Date médiane des stades de la variété Chevignon et Celebrity (précocité épiaison 6 et 7) en fonction de trois dates de semis sur la période 2000-2022 (modèle phénologique ARVALIS)

Dans les secteurs avec des conditions de fin de cycle difficiles liées à des températures échaudantes et stress hydrique (Est Bretagne et/ou sol superficiel), il faudra réfléchir à s’orienter vers des variétés plus précoces à épiaison à partir de mi-décembre pour limiter le retard en fin de cycle et l’exposition aux stress climatiques.

Et pour l’orge et le triticale ?

L’orge d’hiver est plus sensible au froid que le blé tendre. Elle est également très sensible à l’anoxie racinaire (manque d’oxygénation des racines lié à un excès hydrique ou une structure de sol dégradée). D’un point de vue de la phénologie, les variétés d’orges d’hiver (2 et 6 rangs) sont pour la majorité au moins ½ alternatives (note d’alternativité ≥ 5) ; il y a donc peu de risque de voir la précocité des cultures déraper vers trop de tardivité.

Chez le triticale, les variétés se distinguent par des notes d’alternativité très étalées. Il convient donc de mettre en œuvre la même démarche que le blé tendre : si possible, privilégier des variétés de plus en plus précoces lors que les semis tardent, et tenir compte de l’alternativité dès que les implantations approchent de Noël. À la différence du blé tendre, beaucoup de variétés sont alternatives, voire de printemps.

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