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Céréales à paille : les faits marquants de la campagne 2023-2024 en Auvergne

Les céréales ont connu une campagne 2023-2024 en Auvergne marquée par un climat pluvieux tout au long de leur cycle. Associée à une forte nuisibilité des bioagresseurs cette année, la récolte est très hétérogène : un cumul de difficultés dans les sols hydromorphes, de bons rendements dans les sols superficiels, et des déceptions dans de nombreux sols profonds. Plus que jamais les facteurs explicatifs des rendements sont nombreux. Le point sur quelques éléments d’interprétation de cette campagne.

paysage

Une campagne pluvieuse du semis à la récolte

Le premier élément que l’on retiendra est la présence continue de pluies, des semis jusqu’à la récolte, plaçant cette campagne parmi les plus pluvieuses des 20 dernières années.

Les interventions d’automne en ont été perturbées : retard des semis jusqu’en novembre, nombreuses implantations dans de mauvaises conditions et peu de fenêtres de désherbage.

Figure 1 : Evolution des cumuls de pluie durant la campagne 2023/24 par rapport à la médiane 20 ans – station météo de Lurcy-Levis (à gauche) et Clermont-Ferrand (à droite)

    L’impact des excès d’eau a été variable selon un gradient Sud/Nord et en fonction de l’hydromorphie des sols. Combinés à d’autres facteurs plus locaux comme des températures minimales approchant les -4°C en plaine et pouvant provoquer des gels d’épis, ces excès d’eau ont conduit à des densités d’épis de 5 à 10 % inférieures à la moyenne. A noter que dans les secteurs les plus pluvieux du nord de la région, les apports d’azote début montaison ont été retardés le temps que les sols ressuyent.

    Jusqu’à la récolte, la pluie a perturbé les chantiers dont la réalisation en conditions non-portantes implique un risque de tassement à prendre en compte pour les campagnes à venir.

    Une nuisibilité importante des bioagresseurs

    La pression des adventices a été très importante cette année, avec des créneaux d’intervention très limités qui n’ont pas permis une gestion optimale, notamment des graminées, sur l’automne. Outre l’impact direct sur le rendement, la présence de graminées adventices dans les parcelles avant récolte a pu favoriser la présence d’ergot et a largement augmenté le stock semencier dans les sols.

    Les pluies continues ont bien évidemment favorisé le développement des maladies. On retient particulièrement, cette année, en Auvergne, la présence de septoriose et de rouille brune tardive dans les blés. Après des printemps plutôt secs ces dernières campagnes, la nuisibilité de la septoriose s’est rappelée à nous cette année : elle varie entre 19 et 26 q/ha de moyenne dans les essais blé en Sologne Bourbonnaise. Orges et triticales n’ont pas été épargnées par les maladies foliaires, avec de l’oïdium, puis de la rhynchosporiose. En fin de cycle, une bonne partie des orges a également connu une flambé de ramulariose combinée aux habituelles grillures.

    Figure 2 : Ecart de rendement traité non traité des variétés de blé tendre - essais ARVALIS à Saint-Pourçain-sur-Besbre (03)

      Figure 2 : Ecart de rendement traité non traité des variétés de blé tendre - essais ARVALIS à Saint-Pourçain-sur-Besbre (03)

      Le risque fusariose des épis était lui aussi très important, avec un climat humide et des pluies constantes autour de la floraison, comme en atteste l’impact sur le rendement dans nos essais fongicides. Pour autant, les dépassements de seuil de mycotoxines n’ont pas été généralisés, en partie grâce aux interventions fongicides réalisées et peut-être en raison de l’équilibre de la flore présente sur les épis : les printemps frais et humides favorisent les champignons de type Michrodochium, qui ne produisent pas de DON contrairement aux Fusarium.

      Une fin de cycle atypique

      Fin avril, à l’approche du stade méiose, qui correspond à la formation du pollen, le rayonnement - et surtout les températures minimales - ont pu atteindre les seuils critiques dans certains secteurs. Au regard des dates de semis très étalées, et donc des stades hétérogènes dans la plaine, il n’y a pas eu d’accident généralisé sur la fertilité épis. Au contraire, le nombre de grains par épis est globalement plutôt bon.

      Figure 3 : Rayonnement global (à gauche) et températures moyennes (à droite) entre le 9 mars et le 7 juillet 2024 – Station météo de Clermont-Ferrand (63)

        Cette année, le remplissage n’a pas été interrompu par des stress hydriques ou des coups de chaleurs, mais il a pu être pénalisé par l’hydromorphie et/ou la pression des bioagresseurs.

        Une qualité technologique limite à décevante

        Le poids spécifique (PS) s’élabore en deux temps :

        • le « PS potentiel » se détermine au début du remplissage des grains. Le faible rayonnement associé à la présence de pluies à ce stade a altéré la mise en place de ce potentiel.
        • Puis, de la maturité physiologique jusqu’à la récolte, les épisodes orageux, parfois importants dans certains secteurs d’Auvergne, comme celui du 20 juillet, ont altéré le PS en place. Pour rappel, le PS perd environ 0,5 point pour 10 mm de pluie.

        Au regard des rendements parfois faibles, on pouvait espérer une concentration de la protéine, d’autant plus que les conditions de valorisation des apports d’azote durant la montaison ont été correctes et que les biomasses étaient généralement élevées. Pourtant, les teneurs à la récolte ont été tout juste dans les normes, voire en-dessous.

        Les données recueillies dans nos essais jusqu’en post-récolte nous permettront d’explorer plusieurs hypothèses expliquant ces teneurs en azote faibles y compris dans des cultures bien développées :

        • une dynamique d’absorption de l’azote défaillante et éventuellement plus impactée que la dynamique du carbone par l’excès d’eau et/ou un mauvais enracinement ?
        • une remobilisation post-floraison de l’azote, de la plante vers le grain, moins efficace, éventuellement en lien avec la pression maladie ?

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