Blé tendre : c’est le moment de mesurer le risque de verse
Avec des blés situés entre épi 1 cm et 2 nœuds, c’est la bonne période pour se pencher sur le risque de verse, d’autant plus avec les facteurs favorables actuels : tallage important, début de montaison précoce, bonnes disponibilités en azote et pluies. Une estimation précise permettra de déclencher, ou non, une application de régulateurs dans les prochains jours.
Un contexte 2023 favorable à la verse
La douceur hivernale a permis la mise en place de biomasses importantes caractérisées par un tallage excédentaire dans beaucoup de situations. Le sec de février a temporairement ralenti la végétation mais le retour d’une pluviométrie normale à légèrement excédentaire (figure 1) et des températures dans la moyenne (figure 2) sur mars ont levé les derniers freins végétatifs.
Figure 1 : Ecarts de cumul de précipitations du 1er au 25 mars par rapport à la médiane 20 ans (2003-2022)
Figure 2 : Ecarts de sommes de températures du 1er au 25 mars par rapport à la médiane 20 ans (2003-2022)
En effet, ces pluies ont permis une bonne valorisation des apports d’azote, assurant, pour le moment, le maintien des talles mises en place, et donc, l’étiolement des tiges. Elles renforcent également le déséquilibre C/N des tissus constitutifs des tiges déjà existants au vu des quantités importantes d’azote absorbées en sortie hiver. Ce déséquilibre fragilise directement la tenue de tige.
Par ailleurs, mars se caractérise également par un déficit de rayonnement généralisé sur la région (figure 3). De plus, sur les parcelles les plus en avance et les plus développées, la montaison a débuté dès février, c’est-à-dire en jours dits courts. La concurrence précoce pour la lumière est donc importante, avec pour conséquences directes l’allongement excessif des premiers entrenœuds et l’étiolement des tiges, autrement dit, la fragilisation de la tige.
Figure 3 : Ecart de cumul de rayonnement du 1er au 25 mars par rapport à la médiane 20 ans (2003-2022)
La situation actuelle cumule de nombreux facteurs favorables à la verse. Il est indispensable d'estimer le risque de chaque parcelle afin d'établir une stratégie de régulation adaptée : éviter les traitements inutiles, et choisir un programme approprié à chaque situation.
Evaluer le risque verse avant d’intervenir
ARVALIS a établi des grilles de risque régionalisées qui hiérarchisent les facteurs de prédisposition principaux à savoir :
- La résistance variétale, caractérisée par la note de sensibilité à la verse propre à chaque variété.
Figure 4 : Classement des variétés de blé tendre par rapport à la tolérance à la verse
- L’état de la biomasse et ses facteurs de maintien (type de sol, nutrition azotée).
Figure 5 : Grille régionale d’évaluation du risque de verse sur blé tendre en Auvergne, Centre et Île-de-France
* Situations agronomiques avec : Reliquat Sortie Hiver très élevé ou apport d’azote précoce élevé ou apport régulier de matières organiques (forte minéralisation).
Le résultat de cette évaluation initiale est à combiner avec les conditions climatiques de début montaison :
- Si les conditions de fin mars / début avril sont chaudes et sèches avec de forts rayonnements, diminuer d’une classe le risque évalué fin tallage avec la grille.
- Inversement, en cas de printemps favorable à la verse (faible rayonnement, fort cumul de pluies), augmenter d’une classe le risque.
A chaque risque, sa stratégie !
Les régulateurs de croissance n’ont d’intérêt que si le risque verse est réel. Ils agissent sur l’élongation des cellules de la tige, pour aboutir à des entrenœuds plus courts ou à des parois plus épaisses, et donc, à des tiges plus solides. L’application d’un régulateur se décide donc en fonction de la note de risque obtenue à l’aide de la grille.
Figure 6 : Proposition de programmes de régulation en Auvergne, Centre et Île-de-France
* Certaines spécialités sont désormais interdites en mélange (classées H301). Se référer aux étiquettes.
Intervenir dans des bonnes conditions pour une efficacité optimale
Pour accroître l’efficacité et limiter la phytotoxicité, les applications sont à réaliser sur des cultures en bon état (indemnes de viroses, alimentées correctement en eau et azote), et dans des conditions climatiques favorables : temps poussant, lumineux et sans forte amplitude thermique (écarts inférieurs à 15 à 20°C). Il est nécessaire de tenir compte des conditions climatiques le jour de l’application mais aussi durant les trois à cinq jours suivants celle-ci (tableau 1).
Prenons l’exemple des applications de chlorméquat de chlorure de ces dernières semaines. Les créneaux possibles d’intervention ont été peu nombreux, obligeant parfois à intervenir sur des stades un peu limites. Les conditions qui ont suivi certaines interventions n’ont pas été optimales, notamment en février pour les parcelles les plus précoces. Dans ces cas, un bilan s’impose.
Tableau 1 : Conditions optimales de températures habituellement admises pour les principaux régulateurs
Exemple de lecture : pour une application à base de chlorméquat de chlorure, il faut que la température minimale enregistrée le jour du traitement soit supérieure à –1°C et qu’elle atteigne au moins +10°C. Dans les trois jours suivants, une température moyenne supérieure à 10°C est favorable, sans dépasser une température maximale de 20°C.
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