Automne très pluvieux : comment s’adapter et revoir les stratégies de désherbage ?
Avec des prévisions de quelques jours sans pluie, une potentielle fenêtre climatique s’ouvre pour le désherbage des céréales, notamment pour les parcelles à ressuyage plus rapide. Quelques précautions et priorisations sont à respecter.
Les 4 repères pour les semis précoces
Pour les parcelles semées avant le 17 octobre, voici les quatre notions qui vont conditionner les désherbages de postlevée si la fenêtre climatique se confirme :
- Priorité aux parcelles non désherbées,
- Stades des céréales et des adventices les plus développées limitant les solutions de désherbage racinaires et leurs efficacités,
- Portance des parcelles et état végétatif des céréales qui ont plus ou moins souffert des excès d’eau et ennoiements,
- Conditions climatiques au moment du désherbage.
La priorité va aux parcelles où les graminées posent régulièrement un problème, et en particulier aux semis précoces qui n’ont pas été désherbés en prélevée. Dans ces situations, les céréales sont au moins au stade 3 feuilles. Au-delà de ce stade, plusieurs matières actives ne sont plus utilisables (tableau 1). C’est le cas du prosulfocarbe avec la nouvelle règlementation (Défi, Roxy 800, Daiko…), mais aussi des spécialités comme Fosburi, Voltage, Battle Delta… De plus, une intervention en postlevée « tardive » - au-delà de 3 feuilles de la céréale - perd en efficacité. Les résultats d’essais mettent déjà en évidence une perte d’efficacité entre les stades 1-2 feuilles et 3 feuilles (figure 1). Compte tenu de l’année, il sera peut-être nécessaire d’adapter le programme et de renforcer les stratégies vis-à-vis des dicotylédones.
Tableau 1 : Herbicides racinaires possibles au-delà de 3 feuilles de la culture
BBCH 21 (début tallage) / BBCH 25 (mi tallage) / BBCH 29 (fin tallage) - CTU : Chlortoluron
Figure 1 : Efficacités sur graminées des herbicides appliqués en postlevée selon le stade de la culture (Fosburi à 0,6 l/ha à 1F ou 3F - essais 2002 à 2010)
Attention à la portance et aux risques de phytotoxicité
Bien évidemment, l’accessibilité et la portance de la parcelle restent la base. Pour les parcelles qui ont été en souffrance dans des sols sensibles à l’excès d’eau, avec de mauvaises implantations et/ou en mauvais état végétatif, il faut être très prudent en matière de désherbage : elles sont plus exposées à un risque de phytotoxicité consécutifs à un désherbage d’automne à base de produits racinaires.
Enfin, il faudra veiller aux conditions climatiques après traitement : reporter l’intervention si de nouvelles pluies sont prévues (risque de migration herbicide) dans des sols déjà à saturation. Eviter de traiter si les amplitudes thermiques sont élevées (> 15°C) ou si une chute brutale des températures sous les -3°C est prévue dans les 5-6 jours après applications, et en présence de vent.
Peut-on utiliser des antigraminées foliaires dès maintenant ?
Compte tenu des stades de développement des cultures et des adventices, il est possible d’utiliser des antigraminées foliaires, sous réserve que les conditions climatiques le permettent (température mini, amplitude thermique…). En premier lieu, l’utilisation d’antigraminées sulfonylurées (Othello, Kalenkoa, Abak, Levto WG…) est possible à l’automne mais a ses limites. D’une part, même si les résultats peuvent être bons, ils sont très dépendants du statut de résistance des populations de graminées. D’autre part, la réglementation interdit la possibilité de refaire un inhibiteur de l’ALS plus tard en saison.
Il est également possible d’utiliser des antigraminées foliaires classiques (Célio, Fenova Super, etc.) en mélange par exemple avec un produit racinaire. Le niveau d’efficacité sera toutefois très dépendant du statut de résistance historique des populations de graminées.
Figure 2 : Les règles de décision pour désherber les semis précoces de céréales à l’automne 2023
Et pour les semis tardifs de fin novembre à décembre ?
Pour les semis plus tardifs, le levier agronomique « date de semis » effectuera pleinement son effet pour réduire le niveau d’infestation initiale. De nombreuses références l’attestent (figure 3). De plus, le labour sera plus utilisé pour améliorer les conditions de semis, avec une efficacité indéniable sur les graminées. On s’orientera ainsi vers du désherbage de sortie d’hiver dans la majorité des situations. Les stratégies seront à adapter selon la flore présente. Eventuellement, pour les parcelles à fort risque ray-grass, une prélevée « simple » peut se concevoir sur des semis avant la fin novembre (en veillant toujours aux conditions climatiques et après évaluation des grains en surface).
Figure 3 : Impact de la date de semis sur la pression adventices – essais « CLIMATIKA » mis en place au Magneraud (17) en groies moyennes de 2020 à 2022
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